Manoeuvres pour épargner Soro et ses Com’zones
Alassane Ouattara rencontre aujourd’hui le procureur adjoint de la Cpi et successeur de Moreno Ocampo, Fatou Bensouda au Palais présidentiel. Un rendez-vous qui était initialement prévu pour se tenir hier dans la soirée à sa résidence. En toile de fond, le dossier ivoirien et probablement les conditions de l’exécution ou non des imminents mandats d’arrêt.
Alassane Ouattara, semble avoir bien préparé son coup. En se faisant passer pour un fervent défenseur de la justice impartiale, puis en clamant haut et fort son attachement à la lutte contre l’impunité. Dans les faits, Ouattara se découvre et tombe le masque. Son intention n’a jamais été de voir un de ses lieutenants, aussi coupable soit-il, se retrouver à la Cpi. Qui ne devrait à ses yeux recevoir que Laurent Gbagbo et ses proches. Aveuglé ou obnubilé par le fait de voir coûte que coûte Gbagbo à la Cpi, Ouattara n’a pas jugé les conséquences d’un tel acte ou du moins l’effet boomerang d’une telle action. À la réalité des faits, aujourd’hui le chef de l’Etat se retrouve coincé. Faut-il laisser faire et voir le piège «Cpi» se refermer sur plusieurs de ses lieutenants et non des moindres ? Y compris l’ex-premier ministre, Guillaume Soro, pour le massacre des gendarmes à Bouaké et plusieurs autres tueries des populations.
Dans ces conditions de vraie-fausse confusions, Ouattara sort la carte du NON à un «probable transfèrement à la Cpi d’autres Ivoiriens». Et le martèle haut et fort dans son interview-fleuve sur la Rti. Mais bien avant, une mise en scène digne des films hollywoodiens et qui visait à faire croire à l’opinion nationale qu’un mandat d’arrêt de la Cpi contre l’ex-première Dame, Simone Ehivet Gbagbo, était sur la table du Procureur. Mais la «magnanimité» de Ouattara étant passée par là, l’épée de «Damoclès» s’est plus ou moins éloignée de la tête de Simone Gbagbo. Mais à y voir de prêt, le chef de l’Etat préparait tout simplement les esprits des Ivoiriens à l’idée que des pro-Ouattara n’iront pas à La Haye. Et il a presque réussi son coup avec sa plaidoirie sur les antennes de la Rti, de pouvoir juger les Ivoiriens dans leur pays.
Les dessous de la visite de Bensouda
On se souvient encore que quelques jours avant le transfèrement du président Gbagbo à La Haye, Alassane Ouattara, en séjour privé à Paris, avait rencontré le procureur Moreno Ocampo. On croirait au même scénario, si et seulement si, quelques jours plus tôt, le chef de l’Etat, dans son one-man-show télévisé, n’avait pas révélé lui-même la «mascarade». La venue de Fatou Bensouda, qui va prendre officiellement le relais, après le départ en juin de Ocampo, n’est rien d’autre qu’une légitimation du projet de Ouattara. La justice internationale, même si en amont elle avait déjà pris partie pour le camp Ouattara au plus fort de la crise dite post-électorale avec les sorties fracassantes de Ocampo, est en train de confirmer qu’elle n’est que le relais des grandes puissances.
Ouattara, dans sa volonté d’éviter la Cpi aux siens, va déclarer certainement à l’issue de sa rencontre avec la procureure qu’au nom de la réconciliation, il a décidé de ne pas exécuter de mandats d’arrêts de la Cpi. Et que mieux, la justice ivoirienne est habilitée – maintenant comme par hasard – à juger des Ivoiriens en Côte d’Ivoire. Dans un tel scénario, Soro et ses Com’zones peuvent dormir tranquilles pour l’instant. Puisqu’ils vont continuer à jouir d’un règne de l’impunité, au grand dam des nombreuses victimes.
Gérard Koné
Le Nouveau Courrier
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