La Côte d’Ivoire est aujourd’hui confrontée à de graves difficultés économiques et sociales. Le régime Ouattara a accumulé tant de problèmes non résolus à l’issue de la période d’euphorie factice de l’appui de la France qu’il semble engagé dans une véritable impasse. Cela laisse présager un avenir sombre, voire franchement inquiétant pour ce pays où déjà plus de 75% des Ivoiriens vivent dans la pauvreté.
Les faits, c’est qu’au-delà des formules incantatoires de relance économique, la Côte d’Ivoire est un pays lourdement endetté et appauvri. En quelques mois de gouvernance Ouattara, la dette des entreprises et des ménages est passée de 700 milliards FCFA à 1000 milliards FCFA et la dette publique a plus que doublé de 4000 milliards FCFA à 10.000 milliards FCFA. Le montant exact de la dette due aux créanciers du Club de Paris représente la rondelette somme de 1,822 milliard de dollars (environ 911 milliards FCFA). L’économiste-banquier a été obligé de signer un accord de réduction de dette avec le Club de Paris pour amoindrir les intérêts entre le 1er juillet 2011 et le 30 juin 2014 de près de 78%. Déjà début novembre 2011, le Fonds monétaire international avait concédé à la Côte d’Ivoire un prêt de 616 millions de dollars (environ 308 milliards FCFA) ainsi qu’un allégement de dette de 8 millions de dollars (environ 4 milliards FCFA). Le régime Ouattara a également sollicité un allègement de la dette ivoirienne contractée auprès de ses créanciers privés et bilatéraux, l’accord avec le Club de Paris ne suffisant pas à éponger l’intégralité de la somme. La Côte d’Ivoire disposant de capacités de paiement fortement réduites, les créanciers ont consenti à différer et rééchelonner sur une période de dix ans le remboursement des échéances portant sur la dette court terme et post date butoir, et sur huit ans les arriérés sur ces créances. Tous les intérêts sur les montants concernés sont également différés. La communauté financière internationale a déjà été très généreuse en accordant à la Côte d’Ivoire des allègements importants et des emprunts très élevés. Ce sont ces «arrangements» qui permettent à l’administration Ouattara de régler les salaires (même s’ils ne sont pas virés au même moment). Et rien n’indique, tant au niveau des régies financières que de diverses ressources que le pays a une réelle capacité de résorption très profonde de cet endettement. Les tensions de trésorerie font planer des doutes sur la régularité des prochains virements. Et comme le budget national ne peut jouer efficacement son rôle de levier de l’économie, la léthargie est appelée à se poursuivre. D’où les rafistolages avec l’instauration de nouvelles taxes et les licenciements massifs abusifs pour économiser de l’argent.
Ouattara assis sur des braises
La Côte d’Ivoire est économiquement et financièrement asphyxiée. Ce qui explique cette frénésie psychédélique à obtenir le point d’achèvement dans le court terme. L’objectif initial affiché était celui de mars 2012, comme l’avait promis la vice-présidente de la Banque mondiale, la Nigériane Obiageli Ezekwesili. Mais les dures réalités du terrain économique ont amené les nouvelles autorités à différer cette ambition. On table sur la fin du premier semestre. Et là encore, rien n’est garanti au regard de nombreuses questions qui ne sont pas encore (totalement) réglées. Notamment celles liées à la réforme des finances publiques, au secteur agricole, à la gestion des dépenses publiques, aux infrastructures, au secteur privé.
En effet, il est important que tous les déclencheurs de l’initiative Ppte soient respectés. A l’état actuel des choses, certains problèmes restent en l’état.
Le code des investissements est au stade d’avant-projet. Il devra être discuté entre experts, validé en conseil des ministres, et soumis au parlement. Et attendre sa mise en œuvre pour appréciation. Le code des télécommunications doit être revu car celui en vigueur est archaïque pour les ambitions de la Côte d’Ivoire en matière de télécommunications. Le code de l’électricité est aussi attendu au regard des nouvelles donnes dans ce secteur. La législation pour ce secteur date de 1985 et ne répond plus aux besoins de son équilibre.
Le plus gros morceau concerne la filière café-cacao dont la réforme ne satisfait pas entièrement les autorités américaines. Cette filière est actuellement dominée outrageusement par la France à travers Armajero dont l’un des hauts dirigeants n’est autre que Loic Folloroux, le fils de Dominique Nouvian Ouattara, l’épouse de Alassane Ouattara). Alors que les sociétés pionnières telles que Cargill, ADM et autres d’obédience américaine, sont (presque) marginalisées. Lors de son séjour en terre ivoirienne, la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, l’a souligné au chef de l’Etat. Ce qui explique la « froideur » des administrateurs de la Banque mondiale (présentés pourtant comme les décideurs quant à l’initiative Ppte) lors de leur récente mission en Côte d’Ivoire. « Ce sont les organes compétents des deux administrations (Banque mondiale et Fmi, ndlr) qui décideront », expliquait leur porte-parole, Jorg Frieden.
Le point d’achèvement pour 2012 ? Ouattara en a vraiment besoin. Il est assis sur des braises. Il lui reste encore beaucoup à faire. On comprend la « prudence » du ministre de l’Economie et des Finances qui n’a pas inscrit les éventuelles ressources Ppte dans le budget 2012. Et le sourire narquois de Wayne Camard, lors de la rentrée budgétaire, en disait long quant à l’issue de cette ambition ouattariste. A moins que la communauté financière ne prenne la décision politique d’octroyer le point d’achèvement à la Côte d’Ivoire. Avant le départ définitif du président du groupe de la Banque mondiale, Robert Zoelick, le 30 juin prochain.
J-S Lia
Notre Voie
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