Enquête-Express par L’Intelligent d’Abidjan
Cours communes d’Abidjan Quand les factures d’eau et d’électricité divisent les locataires
Les factures d’eau et d’électricité sont très souvent objets de disputes entre locataires dans la plupart des cours communes d’Abidjan. En tout cas, pour ceux qui ont des compteurs communs. Si dans certains cas, le montant à payer est fixé en fonction du nombre de personnes pour les factures d’eau ou du nombre d’appareils pour l’électricité, il n’en est pas de même dans d’autres cas où les factures d’eau ou d’électricité sont divisées par le nombre d’appartements.
Enseignant dans un collège privé, M. Assoumou B. vient d’aménager dans le quartier ‘’Azur’’ du Plateau-Dokui. Célibataire sans enfant, il vit seul dans son studio (sorte d’entrer-coucher) situé dans une cour de 10 ‘’appartements’’. Il partage le même compteur d’électricité avec les 4 autres portes voisines. Ce qui fait qu’ils sont 5 au total sur le même compteur d’électricité. La première facture qu’il a payée après son aménagement dans cette maison était de 25 000FCFA pour l’ensemble des 5 portes. Répartie entre chaque maisonnée, l’enseignant avait payé la somme de 5000 FCFA sans discuter. Une situation normale jusqu’à ce que la dernière facture d’électricité des mois de novembre et décembre 2011 s’élève à 40 000FCFA. Si l’on divise cette facture par le nombre d’appartements qui sont desservis à partir du seul compteur, M. Assoumou B. devra payer 8000 FCFA comme quote-part. Un montant ‘’anormal’’ qui le met cette fois-ci dans tous ses états. « Comment quelqu’un qui vit seul peut-il payer une facture de 8000 F ? Ce n’est pas normal ! Je ne suis pas à la maison la journée. Quand je sors, c’est pour rentrer dans la soirée. Je n’ai pas de réfrigérateur ni de fer à repasser, ni même d’ordinateur. Ça m’étonne que la facture soit aussi élevée. Cette fois-ci, la Cie viendra couper l’électricité. Trop, c’est trop », proteste-t-il. M. Assoumou B. aurait eu suffisamment d’argent, qu’il aurait certainement aménagé dans une autre maison ou aurait tout simplement tiré un compteur personnel. Mais hélas ! Il doit pour le moment faire avec les moyens de bord. «Tirer un compteur coûte tellement cher que je ne peux pas me permettre ce luxe. Sinon j’allais prendre un compteur à moi seul. Je suis sûr que si j’avais un compteur personnel, mes factures d’électricité ne seraient pas allées au-delà de 5000 F», rouspète-t-il. Comme lui, de nombreux autres locataires connaissent des fortunes diverses. C’est le cas d’Aicha T., une femme célibataire et mère de 02 enfants. Logée à l’autre bout de la même cour, Aicha T. n’a plus d’électricité depuis une semaine. Son alimentation a été coupée suite à une dispute avec Mme Yao, une voisine dont le compteur desservait sa pièce. Actuellement, elle cherche à se faire brancher de nouveau, mais cette fois sur le compteur qui alimente le studio de M. Assoumou B. L’infortunée jeune dame explique qu’avant de se retrouver sur la ligne de Mme Yao, elle partageait le même compteur avec un certain Bouamé qui louait également un appartement dans la même cour. Mais ce dernier chargé de l’encaissement de l’argent devant servir au paiement des factures d’électricité, semblait avoir trouvé là un fonds de commerce. Au lieu de payer la totalité des factures, l’homme se résolvait soit à payer la moitié du montant global soit à ne rien payer. Cette ‘’fumisterie’’ de Bouamé a continué ainsi jusqu’à ce qu’un bon matin, la CIE (Compagnie ivoirienne d’électricité) vienne retirer le compteur et les priver d’électricité pour factures impayées. «Au lieu de payer les factures, il (NDLR : le nommé Bouamé) prenait l’argent pour faire ses affaires personnelles. La preuve, il a déménagé juste après que la CIE ait enlevé le compteur. J’ai l’impression que c’est l’argent de nos factures qu’il a pris pour payer la caution de la maison qu’il loue actuellement », a dénoncé Aicha T. Au niveau de l’eau, la situation n’est pas plus reluisante que celle de l’électricité. Les 10 portes de la cour se partagent le même compteur d’eau. Au départ, chaque maisonnée avait un sous-compteur qui permettait de savoir la quantité de mètre cube consommée par chaque locataire. Mais depuis un bon moment, plus rien ne marche. Le propriétaire qui a été plusieurs fois interpellé sur ce sujet, n’a jamais daigné y faire face. Prétextant à chaque fois que la réparation de ces sous-compteurs est coûteuse. En attendant, les factures se gèrent comme elles le peuvent. Mais avec beaucoup de grincements de dents. M. Assoumou B. témoigne encore: «Le propriétaire a installé un seul compteur d’eau pour les 10 portes de la cour. Moi, je vis seul mais je paie souvent des factures de 10 000 FCFA. Je suis constamment absent. Et quand je suis à la maison, je prends au plus 2 bains par jour. Mes habits, c’est au pressing que je les fais laver. Mais bizarrement, lorsque la facture d’eau arrive, les gens (NDLR : les locataires) divisent la somme à payer par le nombre d’appartements. C’est-à-dire que si la facture est de 80 000F. Cette somme est divisée par 10 et chaque porte paie 10 000F. Pourtant, certains vivent dans leur maison à 2 ou à 3. D’autres mêmes y vivent avec toute leur famille. Mais ils paient le même montant que nous qui vivons seuls», s’insurge-t-il. Mais à qui la faute si ce n’est qu’aux propriétaires qui construisent parfois des habitations sans se soucier des conditions minimales de vie de leurs potentiels locataires ? Cette situation pose la lancinante question des logements pour les économiquement faibles. Une question que le président Alassane Ouattara a inscrit en lettres d’or dans son programme de gouvernement. Vivement que ce projet soit vite mis à exécution ! Pour le bonheur des populations concernées.
Réalisée par David Yala
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