«Il s’agit d’un simple rattrapage. Sous Laurent Gbagbo la communauté du Nord, soit 40% de la population, était exclue des postes de responsabilité ». A la lecture de cette phrase du Président Alassane Ouattara, dans l’hebdomadaire français’’ L’Express’’, j’ai tout compris : Alassane Ouattara est loin d’être un héritier de Félix Houphouët-Boigny. La déclaration du Président conformément à la constitution ivoirienne est un slogan d’une autre insécurité, si le chef de l’Etat, lui-même, dit des slogans contraires à son statut de président de la République, garant de la gestion morale, historique et politique des Ivoiriens. « La communauté du Nord soit 40% de la population était exclue des postes de responsabilité». Cette logique du chef de l’Etat ivoirien, comme moyen de gouvernance, est effrayante. Et, dans le contexte actuel de la réconciliation, la déclaration du Chef de l’Etat pose plus de problèmes qu’elle n’en résout et suscite à mon avis un autre sentiment d’une autre insécurité pour la Côte d’Ivoire. Cette fois, c’est sérieux : «40% des populations du Nord étaient exclues des postes de responsabilité». La frayeur tribale, redéclenchée, par le chef de l’Etat lui-même, garant de la constitution et de l’unité nationale pose problème surtout dans l’urgence nécessaire actuelle d’encadrer les Ivoiriens gagnés par dix ans de guerre et de peur. Quel tollé, surtout pour le camp politique de Ouattara dont le slogan est le ‘’vivre ensemble’’. A l’analyse, le mal tribal est partout en Afrique. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, le mal ne vient de personne. Félix Houphouët-Boigny, très puissant, n’avait jamais fait l’étalage de sa puissance financière ou d’une supériorité numérique du groupe Akan. Félix Houphouët-Boigny, connaissait bien la pathologie de chaque groupe ethnique de la Côte d’Ivoire. Cet exercice du courage politique de Félix Houphouët-Boigny a énormément instruit les Ivoiriens. Sur 30 ministres, 10 à 15 étaient issus de la région du Nord : Lamine Diabaté, Koné Abdoulaye, Bamba Vamoussa, Barry Battesti, Cissoko Souleymane, Bangaly Koné, Dona Fologo, Lamine Fadiga, Lanzeni Coulibaly ; sans oublier la qualité du quota ‘’nordiste’’ dans l’armée ivoirienne : les chefs d’état-major Ouattara Thomas d’Acquin, Coulibaly Ibrahim, Timité Lassana, Coulibaly Abdoulaye. Dans la même région du Nord, Félix Houphouët-Boigny n’avait jamais joué à la comédie morale ni ruiné la crédibilité constitutionnelle de la Côte d’Ivoire. Korhogo, Odienné, Séguéla, ces 3 grandes capitales du Nord de la Côte d’Ivoire abritaient la fête tournante de l’indépendance nationale, avec un budget de 2 à 5 milliards de FCFA. «Les nordistes, soit 40% de la population de la Côte d’Ivoire étaient exclus des postes de responsabilité» est un mauvais sentiment politique du président Ouattara. A mon avis, le chef de l’Etat devrait être actuellement préoccupé à panser les plaies béantes de 10 ans de crise militaro-politique. Aussi, je suis troublé quand le chef de l’Etat ivoirien signe que «les nordistes étaient absents dans l’administration Laurent Gbagbo». Politiquement, ce n’est pas habile pour le président Ouattara. Toutes les principales institutions républicaines de la Côte d’Ivoire étaient sous contrôle des cadres du Nord : Laurent Dona Fologo, (Conseil économique et social), Mamadou Koulibaly (Assemblée nationale), Issouf Koné (Grand chancelier de l’ordre national). Sans oublier les ministres Seydou Diarra, Koné Massemba, Zémogo Coulibaly. C’est bien cette vérité que le président Ouattara n’a pas dite aux journalistes français de ‘’L’Express’’ qui, eux-mêmes, ont manqué de regard constitutionnel sur la Côte d’Ivoire sans se poser la question de la gravité de la déclaration du président Ouattara, principal garant de la gestion morale des Ivoiriens. A mon avis, le président de la République de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, n’est plus le chef d’un parti politique. Aujourd’hui, il incarne les valeurs culturelles, sociales et politiques, des 70 groupes ethniques qui s’appellent la « Côte d’Ivoire », avec une véritable répartition de compétences et de talents qu’on doit particulièrement respecter quand on regarde la carte géopolitique de la Côte d’Ivoire : orange, blanc et vert. En tout 322. 462 Km2 pour l’unité nationale et le développement que le président Ouattara doit protéger.
Par Ben Ismaël
L’Intelligent d’Abidjan
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