La nouvelle est tombée depuis hier matin comme un couperet. Le ministre Paul-Antoine Bohoun Bouabré a tiré sa révérence le mercredi 11 janvier 2012 aux environs de 3 h du matin. Loin de sa terre natale, en Israël, où il avait trouvé refuge après la crise postélectorale. L’ancien grand commis de l’Etat était devenu ‘’indigent’’ puisque comme bon nombre de pro-Gbagbo, ses comptes ont été gelés par le nouveau pouvoir en place à Abidjan. L’Intelligent d’Abidjan le savait sérieusement malade. Le jeudi 15 septembre 2011 dans le numéro 2340 à la page 3, le quotidien dont vous avez rêvé avait titré: ‘’Ancien régime / Depuis son exil. Antoine Bohoun Bouabré très malade’’. Les samedi 17 et dimanche 18 septembre 2011, le même titre qui voulait que de bonnes volontés volent à son secours était revenu à la charge dans le numéro 2342 avec un autre titre aussi pathétique : ‘’Exil / Très malade en Israël, 100 millions de FCFA pour sauver Bohoun Bouabré’’, toujours à la page 3. Septembre 2011-janvier 2012. L’appel de pied de l’IA n’a pas été entendu. Paul Antoine Bohoun Bouabré s’en est allé dans l’indigence totale, loin de ses terres natales. Sur la terre sainte d’Israël le 11 janvier 2012 à l’au-
be. Une mort dans l’indifférence totale qui appelle aujourd’hui un questionnement. Et si pour des questions purement humanitaires, on dégelait les comptes des pro-Gbagbo ? Beaucoup de vies s’en trouveraient sauvées par de telles grâces. Oui à la justice pour faire son travail contre l’impunité en Côte d’Ivoire. Mais vivement des circonstances atténuantes pour les ‘’indigents’’, les malades pour le dégel de leurs avoirs. Car il s’agit là d’une question de vie.
Igor Wawayou
L’Intelligent d’Abidjan
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Déferlement humain vers son village
Bohoun Bouabré est décédé. L’ex-ministre d’Etat, ministre du Plan et du Développement a succombé à une insuffisance rénale hier mercredi 11 janvier 2012 à 03 heures dans un hôpital de Jerusalem où il avait été interné. L’annonce de sa mort a plongé toute sa région natale dans le désarroi. Tout Saïoua a mis ses habits de deuil hier. Femmes, hommes, enfants et vieux en nombre considérable, ont convergé vers le village natal du défunt. Ils sont partis de Gabia, de Korézouzoua, de Loboua, de Ba- lam, etc., à pieds pour aller partager le deuil qui a frappé le village de Niakia. Qui en pleurant, qui en chantant des mélodies des funérailles en pays Bété pour exprimer toute la douleur que la disparition du ministre a pu causer. En tout cas pour ce qui est des témoignages, la journée du 11 Janvier reste une journée malheureusement inoubliable. Car moins de neuf mois seulement après la mort de Désiré Tagro, la région d’Issia vient encore de perdre un de ses illustres cadres en la personne de Paul Antoine Bohoun Bouabré.
JGT
Tagro, Tapé Gozé, Bouabré… Issia durement éprouvée
Le sort continue de s’acharner sur la région d’Issia naguère paisible. Cette quiétude est troublée ces derniers temps par des morts en cascades de ses fils. Le 12 avril 2011, c’est le ministre Désiré Tagro qui était rappelé à Dieu après le bombardement de la résidence du président Gbagbo où il avait trouvé refuge au plus fort de la crise postélectorale. Une mort brutale non encore élucidée. Ce cadre d’Issia qui a occupé de hautes fonctions dans l’administration ivoirienne a été arraché à l’affection des siens. Issia continue jusqu’aujourd’hui de pleurer ce fils qui était d’un soutien de taille pour toute la région. Elle n’a pas fini de sécher ses larmes que la liste va s’allonger le 4 août 2011 avec le rappel à Dieu d’un autre cadre : Tapé Gozé, professeur titulaire de Psychologie et ex-directeur général de l’Ens (Ecole Normale Supérieure). Ce fils du terroir Bété d’Issia était aussi membre de l’ASCAD. Pendant dix (10) ans, le professeur Tapé Gozé a formé les cadres de ce pays à l’Ens (2000-2010). Il laisse depuis la date de son décès, un vide ressenti durement par les populations d’Issia. Comme si le sort s’acharnait contre cette région, la nouvelle de la mort du professeur Paul Antoine Bohoun Bouabré, ancien ministre de l’Economie et des Finances, ex-ministre d’Etat, ministre du Plan et du Développement sous le régime Gbagbo est tombé très tôt hier matin comme un coup de massue sur une ville qui assiste impuissante à la mort en cascades de ses cadres. Depuis la chute et la capture de Laurent Gbagbo, Paul Antoine Bohoun Bouabré vivait en exil en Israël où il est décédé d’une insuffisance rénale le mercredi 11 janvier 2012. Sans soins appropriés puisque son état de santé nécessitait des dépenses évaluées à 100 millions de nos francs. Avec des comptes gelés depuis la fin de la crise postélectorale, cet ancien collaborateur de l’ex-chef de l’Etat ivoirien, Laurent Gbagbo n’a pu hélas bénéficier de soins appropriés. Désiré Tagro, le 12 avril 2011, Tapé Gozé le 4 août 2011 et Paul-Antoine Bouabré le 11 janvier 2012, la ville d’Issia n’en peut plus et ploie encore depuis hier sous le poids de son chagrin, de son chemin de croix ou de son épreuve en ce début d’année 2012.
Maxime Wangué
Bohoun Bouabré, le père du «budget sécurisé»
Il était encore inconnu du grand public, quand contre toute attente, Laurent Gbagbo coopte l’enfant de Nakia (sous-préfecture de Saïoua), pour occuper en novembre 2000, le très stratégique poste de ministre de l’Economie et des Finances. C’est au Fpi qu’il fourbit ses armes au secrétariat national chargé de l’Economie et des Finances au même titre que Mamadou Koulibaly. Docteur en sciences économiques, option économie du développement, Paul Antoine Bohoun Bouabré a été maître assistant à la faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université de Cocody. Il arrive au département des finances au moment où la Côte d’Ivoire avait rompu toute coopération avec les institutions de Bretton Woods (Banque mondiale et Fmi) ainsi que les autres bailleurs de fonds comme la Banque africaine de développement (Bad). En 2001, sous sa houlette, le jargon économique s’enrichit de nouveaux vocables : le « budget sécurisé». Le principe était de faire fonctionner l’Etat sur la base de ses ressources propres mobilisables. Ce budget s’établissait en recettes et en dépenses à 1250 milliards de nos francs. Quand survient la guerre en 2002, avec pour conséquence la scission du pays, Bohoun Bouabré tirera son épingle du jeu. Il est au nombre de ceux que le président Gbagbo en son temps appelait ‘’les résistants économiques’’. Le qualificatif n’est pas creux pour le leader d’Issia. Bohoun Bouabré continue à payer les fonctionnaires, à rembourser la dette de la Côte d’Ivoire. Il engage la bataille pour le retour des bailleurs de fonds sur les bords de la lagune Ebrié. Cerise sur le gâteau, l’argentier de l’Etat améliore le traitement des forces de l’ordre. Cette prouesse lui vaut sa reconduction dans des gouvernements successifs post Marcoussis. C’est en Décembre 2005, dans le cabinet Banny qu’il quitte le département des finances pour le portefeuille du plan et du développement tout en gardant un pied aux finances. Il est fait ministre d’Etat. Poste qu’il gardera dans les gouvernements Soro I et II de 2007 à novembre 2010. Il a été de toutes les missions conduites à la Banque mondiale au titre de la Côte d’Ivoire où il s’est créé un réseau de relations. Par ailleurs en 2007, Laurent Gbagbo le propose pour le prestigieux poste de gouverneur de la Bceao. Mais ses pairs lui préfèrent Henri Philippe Dakoury-Tabley. Né le 9 février 1957 et père de cinq (5) enfants, Paul Antoine Bohoun Bouabré était restée une influente personnalité au sein du système Gbagbo. Avec sa disparition, c’est un présidentiable que le Front Populaire Ivoirien, sa famille politique, perd. Même si les circonstances de la chute de son mentor Laurent Gbagbo, l’avait amené loin des frontières ivoiriennes, en Israël où il a tiré sa révérence, loin des siens. Puisse l’âme de l’un des grands argentiers qu’ait connu la Côte d’Ivoire, reposer en paix!
S. Débailly
L’Intelligent d’Abidjan
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