Il faut tirer le chapeau et rendre un hommage mérité au confrère Le Patriote, premier porte-voix du pouvoir Ouattara qui, dans son édition d’hier lundi 9 janvier, a confirmé qu’il y a bel et bien eu fraude aux élections législatives du 11 décembre 2011. En effet, en révélant une cuisine interne au Rhdp concernant les «recours du Rdr» devant le même Conseil constitutionnel que Ouattara avait demandé aux Ivoiriens de ne par reconnaître lors du contentieux électoral de la présidentielle de 2010 remporté par Laurent Gbagbo, Le Patriote confirme que le scrutin législatif n’a pas été crédible.
Le vote des absents et des exilés
Venant du journal du Rdr, la preuve de la mascarade ne pouvait pas être plus consistante. Ce confrère, à sa page 3, révèle que «Les absents et les exilés ont voté». Avant de nous expliquer que : «Certains électeurs ne se sont pas déplacés pour voter, alors que curieusement leur prétendu vote a été constaté par leur signature ou l’apposition d’empreinte sur le listing». Puis le Patriote de continuer à exposer la fraude qui a émaillé ces législatives en rapportant, dans sa même édition, que : «Au bureau de vote 6 (Ndlr: à Mbadon), l’incroyable s’est produit. M Sangaré VaKaba au Togo ne s’est pas non plus déplacé pour voter. Pourtant, il figure sur la liste des voyants ayant émargé sur le listing».
Le confrère affirme : «Le tripatouillage de urnes dans les locaux de la Cei…»
Plus grave, le confrère pro Ouattara confie que : «Le clou de cette fraude, selon la requête de la liste Rdr, a été le tripatouillage des urnes dans les locaux de la Cei de la Riviera Cocody 1, de 19heures à 4 heures du matin…». Certes, c’est en toute bonne foi que «Le Patriote» a mis à nu la comédie électorale à ces législatives dont le taux de participation n’a pas dépassé en réalité les 15%. Ce qui signifie que les Ivoiriens s’en sont totalement désintéressés à près de 85%. Car le confrère se faisait simplement l’écho des frustrations qui, au sein du Rdr, ont accompagné les coups que les candidats du pouvoir Rdr-rébellion-Rhdp se sont donnés mutuellement. Ainsi, les frustrés du Rdr, victimes des turpitudes de leur propre parti au sein de l’alliance Rhdp, n’ont pas pu contenir leurs émotions. Ils ont déballé, sur la place publique, la mascarade par le biais de la voix médiatique par excellence du pouvoir en place. Qui mieux que le Patriote pouvait confirmer qu’il y a effectivement eu fraude aux législatives de décembre 2011 ? Ainsi donc, votre quotidien «Le Temps», en phase avec «Le Patriote» sur cette supercherie électorale, a bien eu raison de dire les législatives n’ont pas été crédibles, comme le demandaient les investisseurs, les bailleurs de fonds et les partenaires de la Côte d’Ivoire. En plus de n’avoir pas été ouvertes à l’opposition qui a été écartée par des manœuvres dans des conditions créées et entretenues à dessein par le pouvoir en place pour empêcher sa participation, elle n’aura été qu’une énorme foire à la fraude préparée par la Cei qui, malheureusement, a fait des victimes dans les rangs même du régime. Mais la situation des frustrés du Rdr qui, bien que s’attaquant au Pdci de Bédié que le parti de Ouattara accuse de fraude, ont toutefois eu le mérite de dénoncer l’inacceptable, est dû aux “effets collatéraux’’ d’une mascarade à laquelle ils étaient tous partie prenante. On ne pleurera donc pas outre mesure sur leur sort dans cette vaste mise en scène du Rhdp. Car ils ont été victimes de «la stratégie électorale du Golf hôtel».
Bourrage des urnes
Ce qu’il convient plutôt de relever ici, en plus des aveux faits plus haut, c’est que le confrère insiste sur le fait qu’il y a eu bourrage des urnes en révélant : «une différence constatée entre le nombre de votants et les suffrages exprimés». Et indique, entre autres exemples de fraude, que, dans un bureau de vote, on a «constaté que 85 personnes ont effectivement voté. Et il y a eu zéro bulletin nul. Mais au dépouillement, ce sont 109 bulletins qui ont été comptabilisés». On le voit, c’est le même mécanisme qui avait été mis en œuvre dans le cadre de la «technologie électorale» élaborée de façon perfide par les comploteurs et leurs alliés lors de la présidentielle de novembre 2010. On se souvent qu’au premier tour, c’est Bédié qui a fait les frais de cette magouille en tombant, derrière Ouattara (2e) et Laurent Gbagbo (1er). Mais face aux pressions de l’Elysée et à la menace des armes, le candidat du Pdci a été contraint de se taire. Au second tour, le 28 novembre 2010, le même «dispositif» de fraude a été déployé avec la complicité de la France qui manipulait à distance le Président de la Cei, Youssouf Bakayoko chargé d’appliquer «la stratégie électorale du Golf hôtel». Pendant que la rébellion massacrait les militants et les représentants Lmp dans les bureaux de vote au Nord notamment. Les documents des saisines et requêtes officielles adressés par l’équipe de campagne du candidat de Lmp à la Cie puis au conseil constitutionnel dont Ouattara refusait au départ de reconnaître les décisions, sont encore dans les archives et les mémoires de la République. Et les Ivoiriens s’en souviennent comme si c’était hier. Mais cela n’avait pas empêché le président de la République sortant à ce moment, Laurent Gbagbo, de gagner le second tour de la présidentielle, ce 28 novembre 2010 qui a marqué le point de départ de l’imposture par laquelle la France a organisé le vol de la victoire du président Gbagbo avant de bombarder sa résidence pour l’arrêter au profit de son homme. En effet, Laurent Gbagbo, malgré la fraude, a bel et bien battu le candidat du Rhdp dans les urnes, en vertu de la Constitution et des lois ivoiriennes, tel que proclamé par le Conseil constitutionnel, avant que la démocratie en Côte d’Ivoire ne soit étouffée dans le sang par les armes, par le complot de la France qui a provoqué la chute de Laurent Gbagbo, à la suite de «la stratégie électorale du Golf hôtel». Qui plus est, par cette confession courageuse, «Le Patriote» montre comment, par le tripatouillage des documents électoraux dans les locaux de la Cei, le régime en place a honteusement gonflé le taux de participation à ces élections législatives pour les porter sans scrupule à 36%, alors que des sources crédibles indiquent qu’il n’est guère allé au-delà des 13%.
K. Kouassi Maurice
Le Temps
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