Le Pays
Les élections législatives qui ont eu lieu le 11 décembre dernier en Côte d’Ivoire et qui ont été boycottés par les pro-Gbagbo, marquent le début de la fin du long processus du retour à un ordre constitutionnel normal. Ces élections ont vu le partage du gâteau parlementaire entre le RDR et le PDCI. Quid des forces nouvelles de Guillaume Soro ?
On les annonce en voie de dissolution depuis que leur objectif de chasser Laurent Gbagbo du pouvoir a été atteint en partie grâce à l’aide de la communauté internationale. Manifestement, la branche armée et l’aile politique de la rébellion de 2002 sont en train de s’insérer dans le nouveau pouvoir ivoirien et veulent se faire une place entre le RDR et le PDCI, les deux forces principales du RHDP, locomotive qui a remporté l’élection au profit de Alassane Dramane Ouattara (ADO). Si on peut considérer, à la lumière des résultats des législatives, que la greffe entre les anciens rebelles et le RDR semble prendre, on ne peut pas en dire de même avec le parti de Henri Konan Bedié.
Ce ménage à trois dans lequel ADO détient une grande partie des cartes, porte préjudice au PDCI qui, conformément aux accords au sein du RHDP, devait hériter du maroquin de Premier ministre. Si son maintien à ce poste jusqu’aux élections législatives a été commandé par les circonstances de la chute de Laurent Gbabgo (les hommes de Soro devaient assurer la sécurisation du pays jusqu’à la normalisation), rien n’empêche aujourd’hui le remplacement de Guillaume Soro par un Premier ministre issu du PDCI. Il y a urgence à calmer la fronde au niveau de la jeunesse PDCI qui commence à craindre que le partenariat entre le PDCI et le RDR ne soit un marché de dupes. ADO doit donc savoir réagir afin de ne pas frustrer ce partenaire stratégique dont il faut saluer l’humilité des chefs qui ont permis, avec un accord politique, de mettre en minorité le président sortant.
Il doit également ménager un Guillaume Soro qui est devenu incontournable sur la scène politique nationale et à qui il doit la résistance armée qui a permis de mettre le régime Gbagbo en déroute. Il a de l’ambition. La difficulté pour ADO est de trouver le moyen de contenir l’ambition de Soro, de le maîtriser pendant ce mandat puis éventuellement pendant le second. Le remaniement tant attendu et qui verra peut-être enfin la mise en œuvre de l’accord de gouvernement entre le RDR et le PDCI, devrait donner des indications sur le positionnement que ADO compte adopter par rapport à Soro. Président de l’Assemblée nationale, ministre de la Défense ou tout simplement une mise au vert dans un poste à l’étranger ?
Une chose est sûre, cet homme est dans l’anti-chambre du pouvoir. Son destin est entre ses mains, comme le laisse entendre notre confrère Venance Konan dans une tribune publiée sur le site Slate Afrique : » Ministre d’Etat comme premier job dans la vie à 31 ans, Premier ministre à 35 ans, sauveur de la République et de la démocratie à 39 ans ; que reste-t-il ? Bien sûr que nous le savons. Il reste à être président de la République ! Mais aura-t-il la patience d’attendre ? »
Abdoulaye TAO
Le Pays
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