PARIS (AP) — Cesaria Evora, « la diva aux pieds nus », s’est éteinte samedi dans son île du Cap-Vert, à l’âge de 70 ans. Affaiblie par des problèmes de santé, la chanteuse de « Sodade » avait mis un terme à sa carrière en septembre dernier.
Son label Lusafrica a annoncé dans un communiqué publié sur son site Internet le décès de l’artiste, morte « à l’hôpital Baptista de Sousa, à Mindelo sur son île natale de Sao Vicente au Cap Vert ».
Cesaria Evora, qui avait fêté son 70e anniversaire le 27 août dernier, avait subi plusieurs interventions chirurgicales ces dernières années, dont une opération à coeur ouvert en mai 2010, avait rappelé à l’époque Lusafrica.
Après cette opération, l’artiste, ambassadrice iconique des musiques du monde, avait repris la route et s’était produite « en avril dernier, très en forme sur la scène parisienne du Grand Rex », comme l’avait rappelé Lusafrica le 23 septembre en annonçant que la chanteuse, très faible, mettait fin à sa carrière.
« Cize », comme l’appelait ses admirateurs, avait alors expliqué au quotidien français « Le Monde » qu’elle n’avait « pas de force, pas d’énergie ». « Je veux que vous disiez à mes fans: ‘excusez-moi, mais maintenant, je dois me reposer. Je regrette infiniment de devoir m’absenter pour cause de maladie, j’aurais voulu donner encore du plaisir à ceux qui m’ont suivie si longtemps' ».
La diva, qui avait fait ses premiers pas sur la scène internationale au début des années 90, avait livré quatorze albums studio et enregistré des duos avec Compay Segundo, mais aussi Bernard Lavilliers ou les Neg’Marrons. Couronnée par un Grammy Award en 2003 pour l’album « Voz d’Amor », Cesaria Evora avait reçu en France deux Victoires de la musique, la première en 2000 pour « Café Atlantico » la seconde en 2003 pour « Voz d’Amor ».
Depuis ses vrais débuts, il y a près de quarante-cinq ans sur l’île de São Vicente, Cesaria Evora avait souvent chanté les amours contrariées avec en toile de fond la nature brute et l’isolement insulaire propre au Cap-Vert, archipel qui, selon l’artiste, « marque les âmes pour des générations ». « Ce lien qui m’attache à ma terre natale, je l’emmène avec moi partout où je vais dans le monde: c’est aussi le bâton de pèlerin sur lequel je m’appuie quand je suis fatiguée », confiait-elle à l’Associated Press en 2009.
Cette « saudade » aux accents de spleen chanté a été durant toute sa carrière la marque de fabrique de « Cize ». Mais l’artiste s’est également illustrée sur d’autres rythmes, parfois plus dansants comme les « coladeras », ou plus noirs encore tels les « mornas », un genre musical à part entière que les puristes qualifient volontiers de « blues capverdien ».
Sorte d’épitaphe discographique à la fois sombre et léger, son dernier opus « Nha Sentimento », sorti en octobre 2009, rendait à nouveau hommage à la puissance des éléments de la nature capverdienne. « Vert Cap de mon regard/Mindelo de mes gloires/Je veux mourir dans ton vert/Et vivre dans tes chansons », égraine la diva aux pieds nus sur le titre « Verde Cabo di Nha Odjos », à l’origine un poème coécrit par Luis Pastor et Teofilo Chantre.
Née en août 1941 d’une mère cuisinière et d’un père musicien disparu alors qu’elle était âgée de sept ans, Cesaria Evora s’est d’abord produite dès sa vingtaine sur de petites scènes locales ou dans des bars de l’archipel, où elle ne connut que des succès d’estime.
C’est lors d’un concert à Lisbonne en 1988 qu’elle devait rencontrer José da Silva, Français lui-même d’origine capverdienne. Il lui proposa d’enregistrer, à l’âge de 47 ans, son premier album « La Diva aux pieds nus » sur le label Lusafrica. Un opus dont le succès fut immédiat en France comme à l’international, au moment même où la « world music » (musiques du monde) connaissait un essor hors du commun.
Particulièrement fidèle à Paris où elle avait établie sa base internationale par l’entremise de son manager historique et découvreur José da Silva, un Français d’origine cap-verdienne et créateur du label Lusafrica, Cesaria Evora a été faite chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres en février 2004 puis chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur en février 2009. AP
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