La justice internationale pour Laurent Gbagbo roule à la vitesse grand V. Alors que depuis de nombreuses années, les victimes d’Hissène Habré peinent à traduire l’ancien président tchadien devant les tribunaux et que manifestement, Saïf El-Islam ne comparaitra pas devant les juges de la CPI, l’ancien président ivoirien vient d’y faire sa première sortie. Etape mémorable dans le cheminement de cette instance judiciaire internationale, dans la mesure où celui qui a présidé aux destinées de la Côte d’Ivoire pendant une décennie, est le tout premier ancien chef de l’Etat à se retrouver entre les griffes de la nouvelle procureure, Fatou Bensouda. Mais en ce qui concerne Laurent Gbagbo, plus d’un observateur aura remarqué que sa détention de huit mois n’aura pas émoussé son ardeur et son caractère de battant revient au galop, comme fouetté par les rampes de l’actualité. Cependant, il est difficile de dire si cette posture est la continuation de l’attitude empreinte de naïveté qui l’avait conduit à opter quasiment pour le suicide, en s’opposant à plus fort que lui, ou s’il s’agit d’une volonté de revanche sur la piètre image de son humiliante arrestation. Entre la France et Laurent Gbagbo, les ponts sont vraiment coupés. En tout cas l’ancien président ivoirien trouve dans l’ancienne puissance coloniale, l’unique responsable du sort qui est aujourd’hui le sien. « J’ai été arrêté sous les bombes françaises », a-t-il notamment déclaré lors de sa toute première comparution devant les juges de la CPI, hier lundi. Selon lui, le jour de son arrestation, »une cinquantaine de chars de l’armée française encerclaient la résidence présidentielle » dans laquelle il s’était refugié et que des hélicoptères bombardaient cette dernière… 0:15 6-12-2011
Comme on peut le voir, Laurent Gbagbo n’entend point se livrer poings et pieds liés. S’il ne lui reste que sa langue, il entend certainement s’en servir pour poursuivre son « combat ». Il n’entend nullement abdiquer. On peut même dire qu’il fait montre d’un mental d’acier, d’une sérénité et d’un brin d’optimisme qui ne peuvent qu’étonner. Ainsi, à l’intention de la présidente qui l’aura entendu pendant environ une trentaine de minutes, Laurent Gbagbo, plutôt confiant, a lancé : « Si on m’accuse, c’est qu’il y a des éléments de preuve. Je veux voir ces éléments de preuve et les confronter à ma vérité à moi ». Là, on retrouve certainement l’ancien président ivoirien, tel qu’il était au plus fort de la crise post-électorale dans son pays. Avec une obstination et des prises de positions qui frisent l’irréalisme.
En effet, on se demande bien comment l’ancien président peut-il penser qu’il y a de l’espoir qu’il remporte une quelconque victoire, alors que sa défaite est entérinée depuis longtemps ?
Son sort n’est-il pas scellé depuis le jour où il s’est laissé capturer ?
Les scènes qu’il nous sera donné de voir dans les mois et années à venir ne sont-elles pas qu’une simple légitimation juridique d’une issue qui est désormais évidente pour tout le monde ?
Que Laurent Gbagbo se détrompe ! Dans ce procès, il y aura une part de vérité et il y en aura une autre de mensonges. La première sera relative à son refus objectif de céder le pouvoir à son successeur, alors que sa défaite lui était évidente, à lui-même. Une telle attitude ne se pardonne et ne se justifie d’aucune manière. Surtout si elle a entrainé jusqu’à 3 000 victimes. Mais la part qui demeurera éternellement dans l’ombre, est celle relative à l’intervention et au rôle joué par les puissances étrangères dans la crise. Particulièrement la France.
Certainement, jusqu’au bout, Laurent Gbagbo veut se présenter comme un panafricaniste et un ardent défenseur de l’indépendance africaine. Il peut bien espérer accrocher l’attention d’une certaine opinion publique. Mais pour les juges de La Haye, même avec une nouvelle procureure africaine, la préoccupation n’est pas à ce niveau.
Cela, Laurent Gbagbo serait bien avisé de le comprendre enfin ! L’histoire en prendra acte.
Momo Soumah pour GuineeConakry.info
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