Libre Opinion
En Côte d’Ivoire, 20 prisonniers politiques pro-Gbagbo ont été libérés. Un évènement qui n’a pas manqué de faire la une des journaux. Ceux notamment proches du pouvoir, ont qualifié ce geste de « signal fort pour le processus de paix et de réconciliation en Côte d’Ivoire ». Mais en effet, nul n’ignore que ce coup de pub, prévu au départ pour 8 prisonniers est passé, comme par enchantement à 20 prisonniers libérés. Une opération dite ‘’akpani’’ (chauve-souris, pour son caractère obscure) qui visait à contraindre le FPI, par devoir de reconnaissance, à participer aux législatives, espérait-on. Mais hélas pour les caciques du pouvoir Ouattara, cette manipulation n’a en rien changé à la position du FPI. Mieux, elle a même été qualifiée « d’écran de fumée ». Toujours est-il que les dirigeants de l’opposition n’ont pas boudé leur plaisir de retrouver leurs camarades de lutte, fraîchement sortis des geôles du régime Ouattara. Que les raisons de cette libération soient politiques ou juridiques, le fait est que 20 prisonniers parmi la soixantaine de détenus qui croulent actuellement dans les prisons infectes du régime Ouattara, ont été bel et bien libérés. Cela a d’ailleurs donné lieu à une émouvante cérémonie d’accueil des ex-détenus au siège du CNRD.
Mais la joie des membres du CNDR/FPI sera de courte durée. Une semaine après cette mise en liberté des détenus politiques, à la surprise générale, le ministre Kata Kéké est à nouveau arrêté, dit-on par des agents la DST, pour être jeté dans une cellule de la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca). Pour l’opposition, le constat est amer : Kata Kéké n’aura pas bénéficié de plus d’une semaine de liberté aux côtés des siens. Tout compte fait, n’en soyons pas étonné dirons certains, il ne s’agissait que d’une liberté provisoire : 20 prisonniers marqués par l’ombre d’un retour aux fers.
Ce énième épisode du jeu trouble du régime Ouattara, nous interpelle une fois de plus et nous incite à la réflexion. Une réflexion qui doit éveiller nos consciences et aboutir à notre vigilance totale et permanente.
De quoi accuse t-on Kata Kéké ? Les nouvelles autorités l’accusent d’avoir prononcé, lors de la cérémonie d’accueil, un discours jugé : « d`acte attentatoire à la sûreté de l`Etat, `de propos irrévérencieux et séditieux à l`égard de l`Etat et du gouvernement de Côte d`Ivoire ». Dans ce discours dont la teneur nous est rapporté par un quotidien proche du pouvoir, l’homme aurait, dit en substance ceci: « (…) nous avons subi l`isolement total. Dieu merci, nous avons la vie sauve, c’est l’essentiel. 08 personnes ont été libérées par voie judiciaire et 12 autres, on ne sait par quelle voie. Est-ce qu’on peut parler encore de justice dans cette affaire ? C’est le combat politique, et nous allons continuer à mener ce combat pour faire libérer nos autres camarades ». Cependant, le mis en cause par la voix de ses avocats, soutenu en cela par l’opposition affirme ne pas se reconnaître, dans ces propos, notamment ceux remettant en cause l’existence d’une justice dans cette affaire.
L’arrestation de Kata Kéké, porte-parole des libérés provisoires, est tout un symbole. Pour les tenants du pouvoir Ouattara, il s’agit d’envoyer un message clair au reste des opposants. Les avertir qu’il faudra désormais « la boucler » dans ce pays au risque de se voir jetés dans les prisons récemment rénovées à cet effet. Telle est l’alternative que leur propose monsieur ‘’la Solution’’.
Et la liste des obscurs complots politiques du régime Ouattara qui n’en finie pas : Angénor Youan Bi, proche de Blé Goudé et numéro 2 du Cojep, n’a pas connu meilleur sort. La mise aux arrêts d’Angénor Youan Bi, intervient, en effet, après celle de l’ancien aide de camp de Simone Gbagbo, Anselme Séka Yapi, dit Séka Séka. Tous accusés d’une façon et d’une autre de fomenter des coups contre le régime d’Alassane Ouattara.
Dans la même veine, hantés de voir l’opposition, notamment le FPI, (qui n’est pas populaire que de nom, les caciques du pouvoir en sont bien conscients) galvaniser ses militants et sympathisants, mettre les ivoiriens en ordre de bataille pour faire échec à l’imposture, le régime Ouattara s’est assigné comme objectif d’étouffer toute manifestation populaire, fut-elle légitime : à Port-Bouet et à Bonoua, ce sont des meetings que les hommes en armes de Ouattara répriment sauvagement en faisant plusieurs blessés graves et des dégâts matériels considérables. Si à Bonoua le meeting s’est tenu malgré tout, on ne peut en dire autant de celui de Port-Bouet où l’on note un empêchement brutal et systématique par les FRCI d’Alassane Ouattara. Il s’agit pour le pouvoir en place de briser le moral de l’opposition de sorte à la voir renter dans ‘’sa coquille’’.
Que dire des visites entamées par le sieur Alassane Ouattara auprès de ses homologues de la sous-région (Ghana, Burkina, Togo, Benin…) ? Alassane Ouattara et ses complices qui ne dorment plus que d’un œil sont en effet à la recherche de signatures ‘’d’accords tripartites’’ en vue de procéder au rapatriement volontaire ou non de tous les ivoiriens exilés dans ces pays. Voulant ainsi avoir sous leur contrôle ces ivoiriens qu’ils considèrent comme une véritable menace pour leur régime.
Que penser d’un tel pouvoir, submergé par la peur constante d’une attaque ? Qui développe les symptômes d’un trouble psychique que les spécialistes appellent la « névrose d’angoisse » ? Les spécialistes la définissent en effet comme : « les manifestations d’une angoisse permanente où le sujet est dans l’attente d’un danger ». Que dire donc d’un tel régime qui prétend avoir la légitimité pour diriger les ivoiriens ? Or la légitimité tout comme l’autorité ne s’imposent que d’elles mêmes aux sujets, non par la violence et la susceptibilité.
Assurément, le peuple de Côte d’Ivoire qui a beaucoup souffert ces dernières années, surtout de l’ignoble guerre à lui imposée, mérite mieux. Ce brave peuple de Côte d’Ivoire ne mérite absolument pas de subir les soubresauts du régime Ouattara, incapable de s’inscrire de façon sincère dans la dynamique de la paix et qui semble le conduire tout droit dans une aventure sans issue. Au lieu de s’attaquer aux problèmes de fond, à même de garantir une atmosphère de paix et d’un retour à la cohésion sociale notamment ceux traitant de la libération des prisonniers politiques et militaires, de la réinstauration de la sécurité, du retour des exilés, et de l’ouverture d’un cadre permanent de dialogue franc entre ivoiriens, en ne perdant pas de vue le bien-être de chaque ivoirien, Alassane Ouattara, vexé par le refus du FPI de participer aux législatives, déclare: « les négociations avec le FPI, c’est fini ».
Alors où va-t-on ? Où va la Côte d’Ivoire avec Alassane Dramane Ouattara ?
Aux élections législatives diront certains. De quelles élections parle t-on ? Quelle crédibilité peuvent-elles avoir, alors que les fils et les filles de ce pays subissent l’emprisonnement, l’exil, l’insécurité, l’injustice, la dictature…, réduits à vivre dans des conditions intenables et parfois inhumaines ? En somme comment pouvons-nous feindre d’aller tranquillement à des élections alors que ces millions d’ivoiriens sont évidemment exclus de la vie socio-politique ivoirienne ?
Il faudra tuer le ver dans l’œuf. Refuser de se laisser contaminer par la « névrose d’angoisse ». Car le peuple de Côte d’Ivoire est un peuple digne et fier. Qui saura, le moment venu, là où se trouve son propre intérêt : l’intérêt supérieur de la nation. Et cet intérêt ne se trouve nullement pas dans cette mascarade d’élections législatives, tout juste organisées pour légitimer Ouattara et faire plaisir à ses soutiens occidentaux. Dieu protège la Côte d’Ivoire.
Marc Micael
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