Depuis qu’il s’est installé à Abidjan dans le fauteuil présidentiel, au printemps, Alassane Ouattara a une obsession : lever l’hypothèque Laurent Gbagbo. Même reclus dans le nord de la Côte-d’Ivoire, l’ancien chef de l’Etat continue d’empoisonner la vie de son successeur. Ainsi le parti fondé par Gbagbo, le Front populaire ivoirien, refuse de participer aux législatives du 11 décembre tant que son mentor reste privé de liberté.
D’après nos informations, Alassane Ouattara serait sur le point de toucher au but grâce au zèle du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye, l’Argentin Luis Moreno Ocampo. Ce dernier cherche à terminer son mandat sur un coup d’éclat en accrochant à son tableau de chasse un ex-président. Un tel «succès» lui permettrait d’atténuer l’humiliation infligée par le président du Soudan, Omar el-Béchir, qui, malgré le mandat d’arrêt lancé contre lui en 2009, continue de circuler impunément en Afrique.
Le transfèrement de Gbagbo à La Haye, dans le cadre de l’enquête sur les crimes commis durant la crise post-électorale (décembre 2010-avril 2011), porterait un coup fatal aux illusions de ses partisans, qui rêvent de son retour en politique. Mais, redoutent des sources diplomatiques, son départ pourrait aussi provoquer des incidents à la veille des législatives.
Depuis plusieurs semaines, les équipes de Luis Moreno Ocampo sont à pied d’œuvre en Côte-d’Ivoire, où les nouvelles autorités leur fournissent toute l’aide dont elles ont besoin pour accélérer le transfèrement de Gbagbo à La Haye. Ocampo fait le forcing avant le début de l’Assemblée des Etats parties au statut de Rome (traité fondateur de la CPI), le 12 décembre à New York. Le nom du successeur du procureur argentin, dont le mandat s’achèvera en juin, sera connu à l’issue de la session.
Depuis sa chute, le 11 avril, grâce à l’aide décisive de l’armée française, Laurent Gbagbo est assigné à résidence à Korhogo (nord), le fief de Ouattara, hors de portée des nostalgiques de l’ancien régime. Il est placé sous la garde des hommes de Kouakou Fofié, un des principaux chefs de l’ex-rébellion. Ce dernier présente la particularité d’être sous sanction de l’ONU (gel de ses avoirs et interdiction de sortir du pays) pour des exactions commises en 2004. A cette heure, nul ne peut dire quand Gbagbo montera dans un avion pour La Haye. En revanche, l’identité du pays qui devrait faciliter l’opération ne fait guère de doute : c’est la France.
Par THOMAS HOFNUNG
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