Par Sabine Sessou
Les temps changent: c’est l’Afrique du Sud, en tant que pays émergent, qui a demandé le 3 novembre à l’Europe “d’accorder ses violons” au cours du sommet du G20 à Cannes. L’objectif: mettre au point rapidement un plan de secours à la Grèce, qui permette ensuite aux autres pays de déterminer leur apport.
Il a en effet été question à Cannes de voir des puissances non-européennes participer, pour éviter une crise internationale aussi grave qu’en octobre 2008. Déjà, les craintes autour d’une faillite de la Grèce se font ressentir sur les exportations de matières premières du monde en développement. L’Afrique du Sud est en première ligne, avec ses exportations de minerais, or et diamants, mais surtout platine, chrome et nickel, des métaux très demandés par l’industrie mondiale. Extrêmement volatile, le rand, la devise sud-africaine, s’est dépréciée de 16% depuis janvier par rapport au dollar, en raison des perspectives de grave crise européenne.
Par la voix de son porte-parole, l’actuel président Jacob Zuma a manifesté son impatience. «La solution se fait attendre depuis trop longtemps, a déclaré Mac Maharaj le 3 novembre. Tout cela a un impact sur nous, mais nous n’avons rien fait pour déclencher cette crise». Pour une fois, les Sud-Africains sont d’accord avec les Américains, pour dire que les dirigeants européens se sont trop focalisés sur l’austérité au lieu de relancer la machine économique – quitte à recourir à la planche à billets pour renflouer la Grèce et les banques.
Les remontrances sud-africaines n’ont pas fait les gros titres en France ou en Allemagne, et encore moins en Grèce. Elles n’en donnent pas moins un nouveau signal d’impatience du côté des BRICS, un groupe de pays émergents formé par le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. Elles marquent aussi le bouleversement en cours de ce qu’il est convenu d’appeler «les relations Nord-Sud». Dans son édition du 4 novembre, l’hebdomadaire sud-africain The Mail&Guardian consacre un article à cette «crise qui est aussi la nôtre», le terminant par cette analyse: «Si l’Europe aspire toujours à de la grandeur dans le monde, elle doit écouter le monde».
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