Taoufik Ben Brik, le poète maudit des années de Ben Ali, a livré son premier commentaire sur le vote du 23 octobre dernier en Tunisie, qui a consacré une large victoire au parti islamiste, Ennahda. L’écrivain tunisien dresse un sombre tableau de son pays et pense que la Tunisie est «la seule révolution dans l’histoire qui s’est suicidée à son premier soir», s’indigne-t-il sur le site du Maghreb Emergent.
Avec un humour décapant, Ben Brik tire à boulets rouges sur tout le monde. Ennahda, qu’il tourne en dérision en le qualifiant «de traitres de l’UGTT (Union générale tunisienne du travail», de «danseurs du ventre», le régime de Ben Ali, qui selon lui, survit toujours, en partie, grâce à son «cher peuple débile», ironise-t-il.
Connu pour son engagement et sa farouche opposition au diktat du régime de Ben Ali durant les années de braises, Taoufik Ben Brik s’est dit très déçu par la tournure des évènements.
«J’ai plus envie de parler. Même d’écrire me pèse. Tout le monde peut écrire librement, maintenant. Je n’éprouve plus le besoin de m’exprimer. Surtout pas dans la presse étrangère», a-t-il déclaré las.
Mais, c’est plus fort que lui. Le journaliste-poète-écrivain qui a défié plus de dix ans le dictateur Ben Ali jusqu’à en devenir un ennemi personnel du maître de Carthage, aime la Tunisie. Et il ne peut s’empêcher de parler. Sans prendre de gants, il se dit prêt à mener une guerre sans merci aux islamistes d’Ennahda.
«Je vais continuer à tirer sur eux. C’est ma liberté. L’oxygène de mon cerveau». Et de poursuivre, «Je les connais, j’ai discuté avec eux. J’ai écrit de Rached Ghannouchi que c’était un chef vaincu. Il est allé s’abriter à Londres durant 20 ans, pendant que j’affrontais Ben Ali, ici. Il m’appelait pudiquement le journaliste aventurier».
Ben Brik ne veut pas se laisser amadouer par le discours centriste des vainqueurs du vote de dimanche. Il pointe un doigt accusateur sur le noyau idéologique d’Ennahda.
«Ou voulez-vous les placer sur l’échiquier politique? Ils sont à l’extrême droite. Des ultras, je dirais. Ils utilisent la religion dans le politique alors que l’humanité est en train d’en sortir ailleurs», commente-t-il.
Le journaliste pense simplement que la victoire d’Ennahda est le dernier cadeau empoisonné de Ben Ali. Il se dit réaliste et s’inquiète pour les libertés individuelles et les droits des femmes sous le règne des islamistes.
Ben Brik s’en prend vertement aux Tunisiens, «débiles» qui «votent contre eux-mêmes». Selon lui, cette issue «guignolesque» n’est pas une surprise, puisqu’il est plus facile pour les Tunisiens de penser que «Dieu, qui n’a jamais répondu à leurs prières, va le faire maintenant qu’ils ont pris Ennahada comme intermédiaire.»
Lu sur Maghreb Emergent
http://www.maghrebemergent.com/actualite/maghrebine/5918-taoufik-ben-brik-l-ennahda-est-le-dernier-cadeau-empoisonne-de-ben-ali-r.html
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