Le chef d’état-major des Frci a tapé du poing sur la table pour mettre fin au bavardage de ses hommes qui ne respectaient plus le devoir de réserve, une règle élémentaire de la discipline militaire.
La Grande muette devenait trop bavarde. Il ne se passait pas de jour sans que des officiers des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci) ne se répandent dans les journaux. Des gradés mais aussi des soldats de rang n’hésitaient pas à étaler leurs « faits » d’arme sur la place publique. De nombreux « commandants », qui pullulent sur le marché, ont fait la manchette de certains organes avec des déclarations fracassantes peu dignes d’une armée qui se respecte. Que cachent toutes ces sorties intempestives de ces hommes soumis à l’obligation de réserve ? Quel honneur tirent-ils en s’étalant dans les journaux ? « La victoire a plusieurs pères, la défaite est orpheline », aimait dire le président Houphouët-Boigny de tous ces « braves » en mal de publicité. Des gradés sont allés jusqu’à revendiquer le coup d’Etat de décembre 1999 qui a renversé le président Bédié. Le bon sens aurait voulu qu’ils se taisent sur cette triste période qui ne fait pas honneur à une armée qui se veut sérieuse et respectueuse de la loi. Sûrement agacé par ces militaires bavards qui foulent au pied le devoir de réserve auquel ils sont soumis, l’état-major a décidé de mettre de l’ordre dans ses rangs. Tard dans la nuit de vendredi, le porte-parole de l’armée a lu une déclaration sur les antennes de la Rti pour demander aux militaires de la fermer. Chérif Moussa constate que « depuis quelque temps, des organes d’informations se font l’écho des interviews de certains éléments des Frci se rapportant aux outils de défense de notre pays ». Cette attitude désinvolte de ces éléments « incontrôlés » prend à contre-pied une règle sacrée du code militaire qui exige des soldats une autorisation de la hiérarchie avant d’ouvrir la bouche en public. Selon son article 36, « le militaire doit obtenir une autorisation express lorsqu’il désire exprimer publiquement des opinions ou évoquer des questions concernant un Etat étranger ou une organisation internationale ». Le général Soumaïla Bakayoko tient au respect de cette mesure qui est de règle dans toutes les armées du monde. « Par conséquent, à compter de la diffusion du présent communiqué, il est interdit à tout militaire, tous grades confondus, de s’adresser aux média sans autorisation express. Tout contrevenant s’exposera à des sanctions disciplinaires sévères », a mis en garde le porte-parole de l’armée. Il était temps que la Grande muette mette fin aux « bruits » assourdissants de ses éléments qui ne font que nuire à la réputation de l’armée moderne voulue par le président Ouattara. Cette sortie vient comme un avertissement à Issiaka Ouattara dit Wattao qui s’apprêtait à faire une déclaration à l’aéroport vendredi à son arrivée des Etats-Unis. Le numéro deux de la Garde républicaine (Gr) tenait sûrement à répondre aux rumeurs qui ont circulé sur son compte pendant son absence du pays. Selon des sources dites « sûres », l’ancien patron de la compagnie « Anaconda » avait été arrêté et jeté en prison en raison d’une mésentente avec les chefs de l’armée.
Une Grande muette trop bavarde
Malgré les affirmations d’un de ses proches qui le disait en vacances au pays de l’Oncle Sam où réside sa famille, la rumeur n’a pas dégonflé. Cette affaire est tartinée par la presse de l’opposition qui cherche à attiser le feu au sein de la troupe. « Notre Voie », le journal officiel du Fpi, avait titré à sa une de samedi : « Wattao empêché de parler. Ce qu’il s’apprêtait à dire à la presse ». Ce canard avait titré la veille : « Côte d’Ivoire : l’armée en crise ». La décision du général Bakayoko qui a rappelé ses hommes au devoir de réserve que leur impose leur fonction, tombe à point nommé. Une « sortie » de route de ces militaires bavards serait du pain bénit pour ces journaux qui cherchent les poux dans les cheveux du locataire du palais du Plateau. Savoir tenir sa langue fait partie de la discipline militaire à laquelle tous ceux qui portent la tenue ont l’obligation de se soumettre.
Nomel Essis
L’Expression
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