La Beligique nationalise Dexia pour 4 milliards d’euros
BRUXELLES (AP) — Le conseil d’administration de Dexia a validé dans la nuit de dimanche à lundi la reprise de sa filiale belge par le gouvernement belge pour un montant de 4 milliards d’euros. La banque franco-belge, première victime de la crise de la dette dans la zone euro, se retrouve donc démantelée et nationalisée pour sa branche belge.
Le Premier ministre belge Yves Leterme a jugé la nationalisation nécessaire pour sauver la banque, et a assuré que l’aide de l’Etat fait que les clients de Dexia « peuvent être sûrs et certains que leur argent est en sécurité ».
François Fillon, qui s’était rendu à Bruxelles dimanche pour finaliser ce plan, se félicite lundi matin du « plan de restructuration ordonnée, dont le principe a été arrêté ce jour par le conseil d’administration de Dexia SA et qui prévoit une accélération des cessions d’actifs par le groupe ».
« Les gouvernements confirment leur intention d’accorder une garantie de financement à Dexia pour un montant maximum de 90 milliards d’euros et une durée de dix ans, portant sur des financements, obligations et titres dont la maturité pourra atteindre dix ans », ajoute M. Fillon dans un communiqué.
« Les Etats sont convenus de se répartir cette garantie dans des proportions identiques à celles de 2008, soit 60,5% pour la Belgique, 36,5% pour la France et 3% pour le Luxembourg. Cette garantie sera rémunérée conformément aux exigences européennes », détaille le chef du gouvernement français. « Elle témoigne des efforts importants déployés par les gouvernements belge, français et luxembourgeois en faveur de la stabilité financière au sein de la zone euro ».
A la suite d’un premier plan de sauvetage de la banque lors de la crise des « subprimes » en 2008, la France, avec le groupe public d’investissement de la Caisse des dépôts (CDC), détenait 23,3% de la banque franco-belge et la Belgique, avec ses régions, 11,4%.
La situation était particulièrement urgente pour la Belgique, menacée par l’agence de notation Moody’s de perdre sa note Aa1 sur la solvabilité de sa dette, en partie à cause du coût attendu de la garantie des dépôts chez Dexia. La France ne veut pas non plus perdre son AAA, la meilleure note.
Dexia souffre de son exposition aux obligations de la Grèce, au bord de la faillite, et de l’Italie et de l’Espagne, dont les marchés redoutent également un défaut de paiement de leur dette.
Le cours de Dexia a plongé ces derniers jours, les investisseurs craignant que le manque de liquidité ne mène le groupe à la faillite. Les gouvernements français et belge sont intervenus pour garantir le financement et les dépôts de la banque, qui finance les collectivités locales françaises et reçoit les dépôts des particuliers belges. AP
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Source: agoravox.fr
Dexia: arrogance française et rancœurs belges
La hache de guerre entre la France et la Belgique est déterrée. Le motif ? La répartition de l’effort à consentir par les deux pays pour sauver la banque Dexia. En effet la banque franco-belge, fruit du mariage entre le Crédit local de France et le Crédit communal de Belgique, a jeté l’éponge pour cause de crise de liquidité.
2008, crise des subprimes, la banque est l’objet d’un plan de sauvetage qui va couter 6,4 milliards d’euro à la Belgique (3 milliards), à la France (3 milliards) et au Luxembourg (376 millions). Octobre 2011, rebelote avec la crise de la dette des Etats européens mais cette fois-ci l’ambiance a changé, c’est la méfiance réciproque entre Paris et Bruxelles. « Il est clair qu’un élément très sensible et crucial dans les négociations, c’est le partage équitable des charges » a déclaré Yves Leterme. Etrange déclaration du Premier ministre belge, comme si outre-Quiévrain on était persuadé que le partenaire français voulait abusé de son petit voisin pour imposer une solution inéquitable, mais peut-être a-t-il quelques bonnes raisons de faire cette déclaration inamicale.
– La France va connaitre une élection majeure dans un peu plus de 6 mois et l’actuel gouvernement ne veut à aucun prix risquer de perdre « notre trésor national » (et enjeux électoral) qu’est le triple A, pour sauver une banque plus belge que française à ses yeux, puisque non seulement le siège de Dexia est à Bruxelles mais qu’elle n’est même pas sous la tutelle de la Banque de France. Par ailleurs Dexia n’ayant pas de clients particuliers en dans l’hexagone, Paris ne veut pas assurer une coûteuse garantie sur les dépôts de clients non-français.
– Les Belges pensent avoir été grugés trois fois. D’abord à la fusion, en apportant une banque saine et aux activités « équilibrées » (le Crédit communal de Belgique était à la fois banque de dépôts et banque préteuse alors que le Crédit local de France n’avait pas de réseau de collecte) – en somme l’épargne belge sert à financer les collectivités locales françaises, puis avec la stratégie impulsée par un ancien haut fonctionnaire français, Pierre Richard (cela ne s’invente pas), qui s’est avérée désastreuse et enfin après le premier sauvetage de la banque où un Français, Pierre Mariani (un proche de N. Sarkozy), a été imposé pour diriger et sauver la banque. Mission non-accomplie à priori.
– Pour corser le tout il y a une guerre dans la guerre entre Belges. Pour une fois, elle n’oppose pas Flamands et Francophones mais régions et Etat féral. Les collectivités locales étant de gros actionnaires de Dexia et ne voulant pas perdre toutes leurs billes dans l’affaire, s’opposent à un plan de nationalisation qui laminerait leur investissement. Elles proposent un spin-off (éclatement de la banque en plusieurs morceaux) où l’Etat fédéral récupérerait les mauvaises créances- la fameuse bad bank – et les actionnaires les bons morceaux – la good bank -. Bien sure cette proposition est inacceptable pour le gouvernement renforcé par l’annonce par Moody’s d’une possible dégradation de la note belge, actuellement la deuxième meilleure possible à « Aa1 ».
Qui est responsable de cette gabegie ?
Il est toujours facile de donner l’ordre d’arrivée des chevaux après la course. A posteriori il est évident que les choix stratégiques de la direction se sont avérés mauvais. Mauvaise était l’idée de financer des engagements à long terme par des ressources à court terme. Mauvaise était l’idée de s’appuyer sur les marchés financiers pour se financer plutôt que sur les dépôts de particuliers. Mauvaise était l’idée de racheter une société américaine spécialisée dans les subprimes. Et enfin mauvaise était l’idée de gaver son portefeuille obligataire d’obligations grecques ou portugaises.
Si on est bien obligé de reconnaitre que la plupart de ces décisions ont été prises par un management français, il faut aussi reconnaitre que côté belge personne ne s’est plaint quand ces stratégies étaient gagnantes et que les bonus étaient généreux.
Retour en 1996 !
Quelque soit la solution choisie, l’intérêt des Etats est de se décider vite, très vite même pour stopper l’hémorragie de fonds placés sur les comptes courants de la branche belge de Dexia. Plus on attend, plus on entretient l’incertitude et plus cela sera couteux.
La solution la plus probable est un retour dans le passé de 15 ans. On va détricoter tout ce qu’ont fait nos mauvais génies de la finance et revenir à une banque belge de dépôt nationalisée, un établissement français de financement des collectivités locales adossé à la Caisse des Dépôts et Consignations et à la Poste – qui ne sont d’ailleurs par trop d’accord mais le gouvernement ne leur demande pas leur avis mais juste de mettre en musique ce qui est décidé -. Le reste est mis à l’encan.
Le Luxembourg, qui a décidé de faire cavalier seul dans cette affaire, a déjà trouvé un repreneur – un fonds souverain du Quatar – pour Dexia BILL à Luxembourg. Il faut dire que c’était d’autant plus facile que cette branche est plutôt prospère.
Le russe Sberbank a les yeux doux pour DenizBanque, la filiale turque, autant dire que c’est une nationalisation par l’état russe puisque la banque centrale de Russie en est le premier actionnaire.
Malheureusement revenir en arrière n’annule pas les dettes et les gouvernements belge et français vont devoir créer une « bad bank ». Heureusement, la France a une bonne expérience dans ce genre de structure de défaisance, on se souvient de celle du Crédit lyonnais qui ne devait couter pas un centime au contribuable.
Par Le taulier
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