« Nous allons à ces élections, le Rdr et le Pdci, en rangs dispersés, mais pas en rangs opposés, ayant les mêmes objectifs de reconstruction de la Côte d’Ivoire ». Cette phrase prononcée par Henri Konan Bédié, président de la conférence des présidents du Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix en Côte d’Ivoire ( Rhdp), le 19 septembre 2011, sur les antennes de Rfi, a littéralement mis le feu aux poudres dans les états-majors des composantes de ce groupement politique. Car, le fait, pour des partis alliés, d’aller en rangs dispersés laisse, selon Henri Konan Bédié, clairement apparaitre, une valeur de confrontation, voire d’affrontement sur le terrain politique. Dès lors, chez les partis alliés du Pdci, notamment l’Udpci, le Mfa et le Pit, on assimile cette déclaration du président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci) à une étincelle qui pourrait embraser la maison Rhdp, si l’on part du principe que toute compétition implique, absolument, une opposition, une bataille entre les concurrents. Cet état de fait, dans le contexte politique actuel, pourrait mettre à mal la cohésion au sein des Houphouetistes. La sortie de Bédié a pris tous les militants à revers, y compris dans son propre parti. Ce, d’autant qu’elle peut saper la dynamique unioniste qui prévaut depuis les accords de Paris, signés le 18 mai 2005. Pour certains cadres du Rhdp, il s’agit là d’un baiser de « Judas » que Bédié a fait à ses alliés. Pour d’autres, c’est un coup de lapin qu’il a porté dans la nuque de ses partenaires. Depuis le mercredi 21 septembre, les états-majors électoraux des partis qui composent le Rhdp sont en émoi. Face à cette situation qui risque de jeter à l’eau tous les efforts d’unité d’action des leaders de cette coalition politique. Alphonse Djédjé Mady, le président du directoire du Rhdp, convoque aujourd’hui jeudi 22 septembre une grande réunion de « concertation ». Avant cette rencontre, il a confié hier, à un confrère proche de son parti, que « quand j’ai eu à me concerter avec le président Bédié avant de le quitter, un plan de travail a été dressé. Nous allons suivre ce plan », soulignant que « dès jeudi, le directoire du Rhdp va se retrouver pour entamer les négociations ». Ce pavé dans la mare du Rhdp, n’a pas manqué de faire sortir de ses gongs Amadou Soumahoro, le Secrétaire par intérim du Rassemblement des républicains ( Rdr) qui l’a aussitôt désavoué. « Je comprends que chaque parti du Rhdp s’organise dans la diversité… Mais nous n’irons pas en désordre… »
L’avenir en pointillé…
« Cela veut dire que nous irons en Rhdp, en alliés… Le Rhdp, c’est le Rhdp… Ensemble avec nos alliés, nous travaillons. Nous nous concertons. Nous nous organisons. Cela donne l’impression que chacun travaille de son côté, non ! Le Rhdp travaille en collectif. Cela ne peut être autrement, lorsqu’une alliance aussi forte que celle-là vous a fait gagner une élection présidentielle. Il nous revient de conforter cette alliance » a-t-il tranché net, dans les colonnes du quotidien « le Patriote ». L’intervention de Bédié, les non-dits qu’elle recèle et la réplique, pour le moins brutale d’Amadou Soumahoro, mettent en relief l’enjeu de ces élections. Pour le Pdci et le Rdr, l’enjeu est de taille. Il s’agira, pour le Rdr de donner une majorité parlementaire, à Alassane Ouattara, une sorte de parapluie « atomique » contre des bourrasques d’une lézarde qui pourrait, demain, faire effondrer les bases du Rhdp. Avoir une mainmise totale sur le Parlement serait une ceinture de sécurité pour le Rdr et son président. D’ailleurs, Amadou Soumahoro ne cache pas cette volonté, à la limite hégémonique du Rdr. « Il ( Ado) a demandé aux Ivoiriens de lui donner cinq ans pour transformer notre pays… Mais, pour l’y aider, il a besoin d’une majorité confortable à l’Assemblée nationale. Une majorité qui lui permettra d’opérer ses reformes indispensables pour la reconstruction de notre pays… Face à ces enjeux, nous préparons ces législatives dans la sérénité, mais aussi dans la détermination » a-t-il dit. Au-delà de sa volonté, somme toute légitime, de dominer le parlement et pourquoi pas, d’occuper le perchoir, le Pdci veut d’abord et avant tout, jauger son poids après la présidentielle où il a laissé des plumes. Dans la 9 ème législature, le Pdci avait raflé, face au Fpi et l’Udpci, l’Udcy, le Mfa et le Pit, 98 des 225 sièges, en l’absence du Rdr qui avait boycotté le scrutin. Le parti de Bédié, crédité d’un peu plus de 25 % des suffrages exprimés à la présidentielle de novembre 2010, nourrit l’ambition de reconquérir sa place de leader au Parlement. C’est donc à ce niveau que se situe le nœud de l’enjeu de ces législatives qui, finalement, pourraient tourner à un duel de leadership entre le Rdr et le Pdci. Si ces deux grands partis du Rhdp violent les textes fondateurs de ce groupement politique qui, notamment stipulent « que les partis membres de l’alliance doivent mettre ensemble leurs efforts et concevoir une stratégie positive pour gagner les élections ensemble et gouverner ensemble », alors, ce sont les petits partis tels l’Udpci, le Mfa, qui risquent de se faire écraser par les deux poids lourds. Ces partis courent le risque d’un laminage en règle au cours de ces législatives. Flairant le danger, l’Udpci convoque pour aujourd’hui jeudi 22 septembre, une réunion d’urgence, face à cette nouvelle donne. Le Mfa et des partis alliés du Rhdp comme le Pit, sont, quant à eux, pris de vertige et voient leur avenir en pointillé…
Armand B. DEPEYLA
Soir Info
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