Le malaise avec la CPI, selon Human Rights Watch

Par Sabine Cessou

La Cour pénale internationale (CPI), née du traité de Rome en 2002, est souvent critiquée pour ne traiter que des affaires africaines et n’avoir arrêté que des seconds couteaux. Voilà que Human Rights Watch (HRW) remue le couteau dans la plaie, avec un rapport publié le 15 septembre et intitulé “Un travail inabouti: des lacunes à combler dans la sélection des affaires traitées par la CPI”. HRW n’y va pas par quatre chemins: elle demande aux pays signataires du traité de Rome de désigner le procureur qui doit succéder à Luis Moreno-Ocampo en 2012 sur la base du “mérite”. Et au prochain procureur de “combler les lacunes” actuelles et de “porter d’autres affaires” devant la CPI.

Les six premières enquêtes ont porté sur des violations des droits de l’homme en Centrafrique, en République démocratique du Congo (RDC), au Darfour (Soudan), au Kenya, en Ouganda et en Libye. Elles ont débouché sur 10 affaires et trois procès, mais sont “trop souvent passées à côté de certains des principaux auteurs de crimes et trop souvent ignoré certains crimes importants”, selon Elizabeth Evenson, juriste senior de HRW.

En RDC et en Ouganda, la CPI a visé des groupes rebelles, sans poursuivres les responsables gouvernementaux ou les militaires accusés de graves exactions. Un mandat d’arrêt international a certes été lancé en juillet 2008 contre Oumar el-Béchir, le président en exercice du Soudan. Mais c’est le seul haut dirigeant visé par la CPI dans le cadre de ses enquêtes au Darfour, regrette HRW, qui ne revient pas sur la polémique suscitée par ce mandat d’arrêt.

Au Kenya, les poursuites de la CPI ont ensuite visé de hauts responsables des deux camps coupables de violences post-électorales en 2007 et 2008 – y compris des ministres en poste. Un progrès notable qui devrait aussi valoir en RDC – notamment dans l’Ituri, selon HRW.

Luis Moreno-Ocampo, un avocat argentin désigné en 2003 pour neuf ans, en prend pour son grade. La plupart des mandats d’arrêt qu’il a lancés l’ont été en pure perte: Oumar el-Béchir court toujours, mais aussi Mouammar Kadhafi, des dirigeants de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA, mouvement rebelle ougandais) et Bosco Ntaganda, ex-rebelle intégré à l’armée congolaise.

Le bureau du procureur examine des situations en Afghanistan, en Colombie, en Corée du Sud, en Géorgie, en Guinée, au Honduras, au Nigeria et en Côte d’Ivoire – et a été sollicitée par l’autorité palestinienne pour des crimes de guerre commis à Gaza. HRW ne le dit pas en ces termes, mais pour l’instant, le seul gros poisson qui soit tombé dans les filets de la CPI s’appelle Jean-Pierre Bemba. Un ancien vice-président de RDC qui s’emploie à ternir la réputation de la CPI, en faisant courir le bruit que les témoignages contre lui par le bureau du procureur ont été achetés.

http://blog.slateafrique.com/post-afriques/2011/09/16/le-malaise-avec-la-cpi-selon-human-rights-watch/

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