C’est un truisme de le dire. L’atmosphère est pourrie dans certains commandements des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci). L’idéal pour lequel des milliers des jeunes ont pris les armes pour libérer leur pays a fait place à une vague de règlements de comptes. Dans la capitale économique, des éléments de plusieurs unités se sont déclarés la guerre et se font de petits meurtres entres amis comme dans le Far West. A Abidjan Sud où la situation est plus que préoccupante, les différends se règlent désormais avec des RP7, des DCA et, au mieux, à la kalachnikov. Des volontaires qui ont pris les armes avant l’arrivée des Frci à Abidjan vivent désormais en cavale. Le constat que nous avons fait dans certains commissariats de Koumassi, Marcory et Zone 4 annonce des jours sombres entre frères d’armes. La situation est explosive et peut péter à tout moment dans la mesure où des ‘‘commandants’’ lourdement armés ont pris la poudre d’escampette, ils sont dans la nature. Nos sources révèlent que les jeunes qui occupaient les commissariats et brigades avant la grande bataille d’Abidjan sont aujourd’hui mis à l’écart dans le plan de sécurisation des grandes entreprises. Alors beaucoup parmi eux ont décidé de se prendre en charge de la plus mauvaise des manières. « Certains de nos amis avec qui nous avons combattu les mercenaires et miliciens de Laurent Gbagbo se sont lancé dans le braquage. Malheureusement, quand nous les prenons, nous sommes obligés, au nom de la fraternité d’arme, de taire l’affaire. Aujourd’hui, ces derniers nous voient comme l’obstacle à leur bonheur. Sous le prétexte de libération des commissariats, ils font des descentes musclées avec des armes de guerre, les RPG7 et les DCA », regrette un ‘‘commandant Frci’’ sous le couvert de l’anonymat. Les éléments qui pourchassent leurs camarades dans les commissariats disent agir avec l’onction de la hiérarchie militaire pour libérer les brigades et commissariats. Qui dit vrai ? Dans le fond, les amis d’hier se tirent dessus pour des questions de leadership, de copinage et de gros sous. Ces règlements de comptes se terminent parfois dans le sang. Dans la nuit du lundi au mardi, deux éléments ont été criblés de balles. Le premier, Coulibaly Moussa, alias chef Assalé Tout contrôle a été abattu à Marcory, non loin du rond point de la Solibra. La seconde victime surnommée ‘‘Billy’’ a été tuée dans la commune de Port Bouët et jetée derrière les rails au quartier Ancien Koumassi. Par peur de représailles, les commissariats de Koumassi, Marcory et de la Zone 4 se sont vidés. A Koumassi, les occupants ont déserté le 6ème, 20ème, 32ème et 36ème arrondissement. Idem pour le 9ème, 26ème et 31ème arrondissement de Marcory. « Ils sont rentrés en brousse », a reconnu un élément rencontré au grand carrefour de Koumassi et qui a jeté son treillis. Un agent de police que rencontré dans le périmètre du 31ème arrondissement, dans les encablures de l’hôtel Pergola, a manifesté son inquiétude. « La situation est plus compliquée que vous ne le croyez. Aujourd’hui, il y a à Abidjan Sud une opposition entre soldats venus de Bouaké et les bénévoles qui ont mené la résistance avant la bataille d’Abidjan. Les seconds estiment que les chefs de guerre venus des ex-zones Cno (Centre, nord, ouest) font la part belle à leurs éléments. Ceux qui sont dans la nature sont en possession d’armes de guerre. Par peur des effets collatéraux, nous évitons de rester au poste pendant la nuit. La hiérarchie doit prendre des décisions courageuses pour régler dans les plus brefs délais cette affaire, sinon je vous assure que ce qui se profile à l’horizon n’est pas du tout bon », a avertit cet officier de la police nationale. Soumaïla Bakayoko, chef d’Etat major général, doit prendre les taureaux par les cornes pour mettre un terme à ce qui s’apparente à des règlements de comptes entre ex-combattants. Pour ne pas compromettre la normalisation de la situation socio-politique en cours.
Axelle Goba
L’Expression
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