Par Christophe Champin RFI
Côte d’Ivoire: la célèbre rue Princesse rasée au bulldozer
La mythique rue Princesse, à Abidjan, a été rasée au bulldozer le week-end dernier. Cette rue célèbre pour ses « maquis » et boites de nuit, haut lieu de la vie nocturne de la capitale économique ivoirienne, fait les frais d’une opération « pays propre », initiée par le ministère de la Salubrité urbaine.
Qui en Afrique francophone n’a pas entendu parler de la rue Princesse? En Côte d’Ivoire, on dit souvent à l’étranger de passage qu’il ne connaîtra pas vraiment Abidjan s’il n’a pas goûté l’ambiance déjantée de ce rendez-vous des fêtards.
Il faut dire que le lieu était impressionnant. Sur deux kilomètres se succédaient des boites de nuit et des maquis, ces restaurants typiquement ivoiriens. Sur des terrasses géantes, chaque échoppe avait sa sono tonitruante, hurlant les derniers tubes de « coupé décalé » ou de « zouglou », tandis que les « dj » rivalisaient d’adresse au micro.
Dans cette incroyable et joyeuse cacophonie, des milliers de personnes venaient chaque semaine y boire et danser. Sur les tables, les bouteilles de bière de 50 cl, s’accumulaient par dizaines et il n’était pas rare de voir des clients se lever pour se trémousser.
C’était aussi un lieu de mélange social, où les jeunes des quartiers populaires pouvaient côtoyer des Ivoiriens plus aisés venus s’encanailler. On se rappelle que l’ancien président, Laurent Gbagbo, y avait amené son « camarade » socialiste Jack Lang, en 2008. Mais beaucoup d’autres personnalités, comme le footballeur ivoirien Didier Drogba, faisaient partie des habitués. La rue Princesse, où une multitude d’artistes se produisaient dans les cabarets, était aussi le rendez-vous incontournable de la culture populaire urbaine ivoirienne.
L’endroit était si réputé en Côte d’Ivoire, que le cinéaste Henri Duparc, lui a consacré un film.
Mais la rue Princesse suscitait aussi des critiques, en raison des constructions anarchiques, de l’insalubrité, du bruit et de la prostitution. D’où la décision du gouvernement, qui dit vouloir faire la chasse au désordre urbain et aux passe-droits, de frapper un grand coup. Ce week-end, les bulldozers sont donc intervenus, au grand dam des fêtards mais aussi des patrons d’établissements et de leurs employés, désormais au chômage.
La réaction d’un patron de «maquis»
La rue Princesse, c’était une rue merveilleuse où il y avait de la joie! (…) Je suis abattu car on a que ça pour vivre. Ils ne vont même pas nous dédommager.
Les commentaires sont fermés.