Un leader qui croupit en prison, ses proches qui s`emportent et s`entremêlent dans leurs propos, tirent dans tous les sens et, au bout du compte, on aboutit à ce que des observateurs de la vie politique ivoirienne ont qualifié, depuis leur sortie, de « belle cacophonie, voire un charivari, autour de l`ancien chef de l`Etat, Laurent Gbagbo, qui rend inaudible leur message ». Ce constat tient à un seul fait. Les sorties diamétralement opposées de ceux qui, aujourd`hui, parlent au nom du « Woody de Mama ». Alain Toussaint, le conseiller en communication de Laurent Gbagbo en Europe, Miaka Ouréto, président intérimaire du Front populaire ivoirien ( Fpi), Justin Katina Koné, le porte-parole de l`ex-chef de l`Etat et la Coordination Fpi en exil que dirige Assoa Adou, semblent ne pas être sur la même longueurs d`onde. Le premier, Alain Toussaint a donné une interview explicative, avant-hier mardi 26 juillet 2011 à « Afrik.com », abordant, entre autres, les conditions carcérales de l`ancien chef de l`Etat. Le deuxième, Miaka Oureto, lui, au sortir d`une rencontre avec Charles Konan Banny, le lundi 25 juillet 2011, a fait une déclaration qui épouse l`idée de Koulibaly Mamadou. A savoir que « la libération de Gbagbo et des cadres du Fpi n`est pas un préalable ». En ce qui le concerne, au nom de son mentor, le troisième, Justin Katinan Koné, souligne que « Gbagbo est déterminé à poursuivre son combat ». La coordination du Ghana conduite par Assoa Adou, prend le contre-pied des déclarations du président du parti et fait de la libération de Gbagbo « un préalable et sans condition ». Le décalage entre les propos des uns et des autres donne tout simplement du tournis aux militants. Le conseiller en communication de l`ex-chef de l`Etat, Alain Toussaint affirme que Laurent Gbagbo est « bunkerisé », ne disposant d`aucun moyen de communication avec l`extérieur. « Il ne faut pas sous estimer la complexité de la situation du président Laurent Gbagbo, de son épouse Simone et son fils Michel. Nous estimons que le président Gbagbo est déjà à son centième jour de détention (mercredi 20 juillet), sans qu`il ait la possibilité de communiquer avec l`extérieur, ni avec ses avocats, ou ses proches.
Rétropédalage vertigineux
Laurent Gbagbo est en danger de mort ! Contrairement à ce que dit Ouattara, le président n`est pas en résidence surveillée à Korhogo. Le chef de l`Etat est l`otage du chef rebelle Fofié Kouakou dans la maison duquel il est enfermé dans une pièce-salon, et sans lumière du jour. Il en a été extrait spécialement pour être conduit à la résidence présidentielle lors de la visite de Choi », soutient Alain Toussaint. Mais, la sortie de Katinan Koné, vient battre en brèche cette déclaration du conseiller en communication. Dans un message qu`il dit tenir de Laurent Gbagbo, suite à la « réunion du comité central du Fpi ». Katinan Koné Justin déclare que « le président Laurent Gbagbo, depuis Korhogo, son lieu de détention arbitraire, suit avec la plus grande attention la situation politique de la Côte d`Ivoire en général et particulièrement celle du Front populaire ivoirien ( Fpi), le parti qu`il a fondé… Il apporte son soutien au camarade à Miaka Ouareto , président intérimaire.. et rappelle à tous que le Fpi est porteur d`une espérance… Il rassure l`ensemble de tous les militants et sympathisants de sa détermination à poursuivre ce combat pour lequel, aucune humiliation n`est de trop pour lui ». Ces propos de Katina Justin, s`ils ne font pas mentir Alain Toussaint, ont au moins le mérite de dire à l`opinion nationale que l`ancien chef de l`Etat n`est pas enfermé « sans lumière du jour », n`est pas coupé du reste du monde et qu`il suit, au jour le jour, l`actualité politique ivoirienne, au point de donner son point de vue. Miaka Oureto, le président par intérim du Fpi a fait un rétropédalage susceptible de donner du vertige aux militants de son parti. Notamment, en ce qui concerne la libération de Laurent Gbagbo et des cadres du parti en prison. L`axe principal de combat du président intérimaire du Fpi, n`est plus la libération de Gbagbo et des autres. Au sortir d`une audience avec Charles Konan Banny, président de la commission dialogue, vérité et réconciliation, le 25 juillet 2011, Miaka Oureto a tout simplement mis au frigidaire la requête du Fpi. A la question d`un journaliste de savoir si le Fpi fait toujours de la libération de ses cadres, un préalable à la réconciliation, voici la réaction, à couper le souffle, de Miaka Oureto. « Ça, ce sont des détails. Nous ne parlons pas de préalables. Nous n`avons jamais dit qu`il y avait un préalable…Au-delà de l`aspect collectif de cette réconciliation, la responsabilité est d`abord individuelle… La crise-là, ce sont des individus qui en portent les responsabilités. Il est bon que devant tout le peuple de Côte d`Ivoire, ces individus-là prennent la parole pour dire moi, en tant qu`individu, voilà ce que j`ai eu à poser comme acte, pourquoi je l`ai posé, je le regrette ou bien je ne le regrette pas. Et comme il s`agit de réconciliation, il faut regretter son acte qu`on a posé quand on sait que cet acte-là est mauvais pour la communauté à laquelle on appartient. Donc, poser comme préalable la libération, nous ne voulons pas ». Avec cette déclaration, Miaka Oureto joint sa voix à celle du Pr Barthélemy Kotchi, un autre ponte du Fpi, qui, il y a peu, demandait « que Gbagbo vienne s`expliquer devant le peuple pour les actes qu`il a posés ». Pour Miaka Oureto, l`essentiel, aujourd`hui, c`est « comment, ensemble, nous pouvons relever le défi de l`amélioration des conditions de vie des populations ». Une démarche que plaidait hier Koulibaly Mamadou, ancien président par intérim du parti. On le voit, Miaka a radicalement changé de fusil d`épaule et semble rejoindre le président de « Lider ». La coordination Fpi du Ghana, conduite par le Dr Assoa Adou ne voit pas les choses de cette oreille. Bien que d`accord avec le processus vérité, dialogue et réconciliation, le Fpi « demande la libération sans condition du Président Laurent Gbagbo, de la camarde Simone Ehivet-Gbagbo ainsi que celle de tous les camarades détenus arbitrairement ». Il ne serait pas exagéré d`affirmer qu`on nage, en ce moment, au Fpi, en pleine gadoue, notamment, en matière de communication et d`approche politique. Les « Camarades » ont fort intérêt, dans cette situation particulièrement délicate, à accorder leurs violons, pour ne pas en ajouter à la déprime des nombreux militants qui continuent de croire en ce parti.
Armand B. DEPEYLA
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