Les soldats d’Amadé Ouérémi occupent toujours le Mont Péco qu’ils ont transformé en camp militaire. C’est depuis cette base, qu’il contrôle la moitié du grand Ouest de la Côte d’Ivoire, qu’ils ont réussi à dompter. La ville de Duékoué vit toujours sous la hantise d’un sinistre personne dont la seule évocation de son nom, fait frémir de frayeur les populations du département de Duékoué. Amadé Ouérémi, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est un jeune burkinabé qui vit dans cette région avec ses parents venus de son Faso natal, depuis sa plus tendre enfance. Ce jeune homme d’une trentaine d’années, s’est taillé une célèbre réputation à la mesure des souffrances qu’il a réussi à imposer aux populations de cette contrée. La terreur qu’il a pu implanter, dans cette partie de la Côte d’Ivoire, ne date pas d’aujourd’hui. Elle trouve son origine à l’époque où Amadé était encore un petit garçon, avait assisté à des scènes de violence entre autochtones Guéré et allogènes Burkinabé, suite à des litiges fonciers. A l’époque, ses parents venus de Burkina Faso, cherchaient à s’établir à Duékoué pour des raisons de subsistances. Leur installation parmi les autochtones Guéré, s’est faite à coups de haches et de machettes. C’étaient des conquérants qui n’avaient pas pu s’imposer par la force des biceps. Vaincus et résignés, ces parents ainsi que l’ensemble de toute la communauté Burkinabé, s’est vu obligé de vivre en bonne intelligence avec leurs tuteurs Guéré. Selon des témoignages recueillis dans la région, Amadé Ouérémi avait grandi dans cet environnement troublé des campements allogènes où tout peut se régler à coups de fusils et de machette. Elevé dans cet univers de violence, il en a gardé les séquelles et vit désormais des réactions épidermiques. Amadé possédait déjà depuis sa plus jeune enfance, ces germes de destructions massives qui vont faire de lui, ce grand brigand qui aujourd’hui fait le malheur de la Côte d’Ivoire et plus précisément, du département de Duékoué. C’est un tueur à gage doté d’une cruauté hors du commun. Dans la région, certains paysans qui ont eu à le côtoyer le décrivent comme un homme glacial, violent, aux réactions instructives.
Chef braqueur depuis 2003
D’autres fermiers qui ont le privilège de vivre un tant soit peu dans son environnement, racontent que son ministère de mal a démarré en 2003 année de braise. Des personnes affirment l’avoir rencontré à plusieurs reprises après des braquages, sur des pistes du département de Duékoué. Des témoignages soutiennent la thèse qu’il est en puissance, le père fondateur de la nouvelle génération des coupeurs de route à l’Ouest de la Cote d’Ivoire, depuis l’avènement de la rébellion. C’est à partir de l’année 2003, qu’il a pu mettre en chantier son réseau de malfaiteurs et de tueurs dans le département de Duékoué. A l’époque, les autorités locales et militaires, n’avaient encore pas conscience de l’ampleur du gang qu’Amadé Ouérémi était en train de constituer. Tout le monde pensait aux petits voyous du département de Duékoué qui se constituaient en groupe de braqueurs, pour mener des opérations ponctuelles, rien que pour se faire un peu d’argent de poche. Mais, les braquages à répétition, suivis de mort d’hommes, ont vite achevé de convaincre les autorités du département, que le phénomène est grave. Au fil du temps, Amadé Ouérémi s’est doté d’un important arsenal de guerre et par la suite, s’est constitué une équipe. C’est désormais en véritable commando que ce sinistre gangster règne en puissance à Duékoué. Pour se donner de la valeur et surtout les moyens de bien mener ses opérations, il va alors dompter la forêt classée de Mont Péco d’une superficie de 36 mille hectares, pour en faire
Il a fait de Mont Péco, une base militaire
Une base militaire. Désormais, il peut régner en maître absolu dans toute la région sans être inquiété. De sa proximité avec le Liberia voisin, il profite de cette situation pour accroître sa puissance de feu. Il devient par la puissance des armes dont il dispose, le chef gangster le plus craint et le plus redouté de toute la Côte d’Ivoire. pour survivre, il prête main forte a ses concitoyens burkinabè et les aide à conquérir les terres. C’est ainsi que se déclenche la guerre du grand ouest, où il joue un rôle très dévoué et très déterminant, dans l’expropriation des terres et surtout, des plantations des paysans Guéré. Les nouveaux Burkinabè à la recherche de forêt, sont gracieusement convoyés sous son escorte vers les villages environnants du Mont Péco pour y vivre. Pour le citoyen burkinabé, c’est la conquête du Far Ouest ivoirien. Des milliers de Guéré sont alors massacrés dans leurs villages en silence dans le département de Duékoué. La terreur qu’Amadé Ouéremi fait régner dans les campements et villages environnants du Mont Péco, fait fuir les cultivateurs qui quittent définitivement leurs terres. Pour maintenir une mainmise sur la région, il a mis en place une armée de plus de 300 soldats qui le servent avec dévouement. Ceux-là lui vouent une inestimable vénération. Son règne qui continue jusqu’à présent, lui permet de vendre les bois de cette forêt classée, puisque l’État ivoirien se fait désirer. Amadé Ourémi, c’est le « Chef militaire » qui a mis sous l’éteignoir, l’autorité du gouvernement de Côte d’Ivoire. Parce que, depuis qu’il a annexé le Mont Péco, aucun militaire ni même les villageois expropriés de leurs terres, ne s’aventure dans la contrée. Tous ceux qui ont essayé ne sont plus jamais revenus et sont portés disparus. Sa célébrité s’est encore agrandie à la faveur de la crise post-électorale. Les miliciens et autres combattants qui se font la guerre, ne s’aventurent jamais sur les traces du terroriste de Mont Péco. C’est ainsi que, les soldats Frci ayant eu vent de sa cruauté, lui ont fait appel, pour qu’il leur prête mains fortes dans la conquête de Duékoué. Des paysans racontent que sa cruauté est légendaire et même, les chefs militaires Frci l’observent avec admiration. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils lui ont demandé sans complexe, de leur venir en aide. Eux qui n’arrivent plus à venir à bout des miliciens et autres soldats de l’armée régulière de Côte d’Ivoire, têtue et déterminée. Amadé Ouéremi ne s’est pas fait prier pour accepter la main tendue des Frci en détresse. Pour lui, l’heure à sonné pour achever la conquête de l’Ouest qui, dans un futur proche deviendra son domaine privé. Depuis sa base militaire de Mont Péco, il organise alors, le massacre de Duékoué qui restera une légende infalsifiable dans la mémoire de l’histoire de la Côte d’Ivoire. Il entre donc en action le 30 mars au petit matin.
1000 personnes massacrées par l’homme d’Amadé Ouérémi
Les morts des quartiers Guéré de Duékoué sont à son actif. Dans les environs du carrefour, un sous quartier Guéré de Duékoué, tous les hommes ont été massacrés par les soldats de Ouérémi qui avait reçu des consignes de la part de leur chef, de débarrasser Duékoué des « cafri » Guéré. Dans leur descente répressive, à l’allure d’un règlement de compte, des Églises chrétiennes n’ont pas échappé à leur furia. Des fidèles et des prêtes ont été massacrés. Aussi, des églises et des maisons ont été brûlées. Après leur passage, les survivants ont pu dénombrer plus de 1000 morts. Les témoignages de la Cicr et de la croix rouge Côte d’Ivoire, font état de plus de 800 morts. Parce que cette Ong a eu à fournir 800 sachets noirs qui ont permis à l’emballage des cadavres. Toujours selon les témoignages recueillis sur place, des corps ont été brûlés par les soldats d’Amadé Ouérémi, pour tenter d’effacer ou plutôt essayé de diminuer le nombre trop élevé de personnes massacrées. Toutefois, les chiffres avancés par l’Ong et surtout la Cicr sont en deçà de ce que l’on peut imaginer. Faut-il le noter, les différents rapports produits par l’Ong Human Right Watch, possèdent des chapitres qui citent pas les massacres commis par Amadé Ouérémi et ses hommes. Entre le 30 mars 2011 et le 20 avril 2011, les populations de Duékoué réfugiées à l’église catholique de ladite ville, ont fait savoir qu’elles ont compté plus de 900 morts. C’est d’ailleurs ce qui explique le nombre trop élevé de sinistrés à l’Ouest et plus précisément dans la zone de Duékoué. Cependant, les soldats marocains de l’Onuci sont eux aussi, au parfum de l’existence du génocidaire du Mont Péco. Étant dans la région pour le maintien d’ordre et surtout pour la sécurité des populations déplacées, les soldats marocains ont eu à prendre contact avec ce sinistre personnage. Mais eux non plus, n’ont eu à lever le petit doigt pour protester des massacres. Pis, les soldats d’Ouérémi continuent de commettre des exactions en pleine ville de Duékoué, sous la barbe de ces soldats onusiens. Des camps de réfugiés sont construits à la hâte à coup de centaines de milliers de francs Cfa, pour tenter de regrouper ces populations victimes de la barbarie d’Amadé Ouérémi. Nos contacts au sein des populations déplacées sont formels. Les paysans dépossédés de leurs plantations et autres champs refusent de retourner dans leurs campements. Ils craignent et redoutent ce tortionnaire qui n’a aucun état d’âme pour massacrer des pauvres cultivateurs. Des témoins font état de ce qu’Amadé Ouérémi, est venu pour mener un combat de vengeance. Parce que ses parents venus en conquérants à l’Ouest de la Côte d’Ivoire, n’ont pas survécu au terme de plusieurs attaques entre des campements et villages Guéré. C’est donc un rescapé de la guerre frustré et bourré de rancœur qui règle ses comptes. Les actes qu’il pose puent la haine. Son acharnement à décimer et à effacer de la carte de la Côte d’Ivoire les populations Guéré, démontre tout simplement le mépris et surtout cette haine qu’il éprouve à l’égard de ceux qui ont accueilli fraternellement ses parents venus d’ailleurs.
Jean-Baptiste Essis (Jean.essis@gmail.com)
Source: Le Temps
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