François Fillon, en voyage officiel en Côte d’Ivoire les 14 et 15 juillet, était clairement venu chercher les bénéfices du soutien militaire apporté par la France à Alassane Ouattara. « Nous sommes déterminés à rester votre partenaire le plus proche », a-t-il déclaré pour donner le ton en ouverture du forum économique franco-ivoirien auquel participait le gratin du patronat français. Cela ne l’a pas empêché d’affirmer avec une belle hypocrisie que « les critiques sur le thème de la Françafrique correspondent à des logiciels dépassés ».
Comme si ce n’était pas grâce au soutien de l’impérialisme français que le clan de Ouattara a fini par triompher de celui de Gbagbo et s’est emparé du pouvoir. « La France ne ménage pas ses moyens pour défendre les libertés », a déclaré Fillon à propos de l’intervention française. Mais de quelles libertés s’agit-il ?
Après une parodie d’élection qui n’avait pu départager les deux candidats, la France a choisi de soutenir manu militari Ouattara et celui-ci l’a finalement emporté. Cela n’améliore en rien le sort de la population de Côte d’Ivoire. La misère est toujours là, aggravée par les destructions de la guerre. Les bandes armées constituent encore aujourd’hui une menace pour la population des quartiers pauvres. Dans Abidjan, les anciens soldats de Ouattara rackettent à qui mieux mieux. Le clan victorieux se différencie d’ailleurs si peu des vaincus que Ouattara a pu intégrer à la nouvelle équipe au pouvoir toute une série de ralliés de son rival déchu.
Mais la liberté dont parle Fillon, c’est surtout celle des patrons français qui l’accompagnaient de continuer à exploiter le pays, comme ils le font depuis l’indépendance. Il y avait là les dirigeants de Bouygues, dont les filiales détiennent une part prépondérante dans les travaux publics, la distribution de l’eau et de l’électricité, Bolloré, qui contrôle les ports, le transport maritime et ferroviaire, Total, propriétaire des stations-service du pays et des exploitations pétrolières en mer.
Alstom était également présent, sur les rangs pour la construction de barrages. Les responsables de la BNP Paribas n’étaient pas en reste, dans un pays où le secteur bancaire est entre les mains des sociétés françaises. L’important pour ces gens-là est que les affaires reprennent comme elles ont tourné sous tous les dictateurs soutenus par la France depuis plus de cinquante ans, à commencer par Houphouët-Boigny et son parti unique pour finir par Gbagbo lui-même, ex-grand ami de la France. Pour eux, la reconstruction de la Côte d’Ivoire sera tout bénéfice puisque Fillon a annoncé que deux milliards d’euros de dette ivoirienne seront convertis en investissements, dont ces groupes devraient largement profiter.
Et c’est bien pourquoi 300 soldats français resteront stationnés en Côte d’Ivoire, afin de continuer à veiller au grain !
Daniel MESCLA
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