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Comment Blé Goudé attise encore le feu de la haine tribale
Quand Charles Blé Goudé parle, on pourrait se taire et ne rien dire, tant il n’est pas Laurent Gbagbo, ni un porte-parole officiel de Lmp. A ce titre, les propos tenus par lui, n’engagent pas tout son camp. Ils n’engagent que lui seul. On devrait donc se taire à priori, quand il parle. Pourtant l’on se rend compte que l’absence d’avoir à rendre compte aux siens et son souci de positionnement personnel, le poussent à jeter lourdement de l’huile sur le feu. Pour que silence ne soit pas trahison et complicité, Blé Goudé a donc encore parlé le samedi dernier. Par le biais d’une vidéo diffusée lors d’une conférence publique à Paris, Charles Blé Goudé a dit des choses graves. Certes, on ne lui demande pas de s’auto-flageller, mais, comment compte t-il être crédible s’il refuse de reconnaitre que le régime Gbagbo n’a pas été parfait et qu’il a commis lui aussi des exactions, comme celles qu’il dénonce maintenant sous Ouattara ? Blé Goudé prétend parler à tous les Ivoiriens, à toutes les Ivoiriennes, aux africains et au monde entier. Comment peut-il penser un seul instant, qu’à côté des Ivoiriens qui sont victimes du régime Ouattara (arrestation, gel des avoirs, mort, bastonnade et bien d’autres), d’autres Ivoiriens n’ont pas subi d’exactions de la part du régime Gbagbo ? Blé Goudé appelle à faire tous les procès y compris celui de Ouattara et de Soro. On applaudit car en Côte d’Ivoire, il existe des hommes qui restent justes et qui refusent le chantage suivant : qu’on laisse Gbagbo, Blé Goudé et les autres tranquilles parce qu’on ne poursuivra pas Soro et Ouattara. Non, on ne doit pas laisser Gbagbo! On doit plutôt se mobiliser pour que, Ouattara et Soro répondent de leurs actes. On doit aussi noter que si Soro n’a pas répondu à la justice, ce n’est pas la faute à Soro. Autant Blé Goudé refuse de faire son propre procès, autant Soro n’avait à se faire hara kiri. Il revenait à Gbagbo de faire établir la justice contre Soro. Mais, alors qu’on attendait qu’il applique avec sincérité l’accord de Marcoussis sous Diarra et Banny, Laurent Gbagbo a librement torpillé le processus et transformé Guillaume Soro en héros national avec l’accord de Ouaga, que Gbagbo a présenté devant l’assemblée générale de l’Onu comme un modèle de règlement des conflits en Afrique, à enseigner dans les écoles de sciences politiques. Blé Goudé est soucieux de jouer un rôle politique en Côte d’Ivoire mais l’excès est dangereux, et la parole peut faire mal. Comment peut-il faire une lecture tribale de ce qui se passe dans le pays et espérer réussir maintenant avec le même discours n’ayant pas fait gagner son camp hier ? Selon Blé Goudé, il n’y a en ce moment, que pour les gens du Nord : Président, Premier ministre, ministre de l’Intérieur, etc. Diviser le Rhdp, diviser Pdci et Rdr en oubliant que des cadres non issus du Nord participent à la gouvernance actuelle.
La face hideuse de Blé Goudé
Mais, le président du Cojep va plus loin, en affirmant qu’il est poursuivi parce qu’il est d’une ethnie et est pro- Gbagbo. Veut-il délibérément choquer et paraphraser le célèbre: « on m’empêche d’être candidat parce que je suis musulman », lancé par Ouattara à Paris quand il était traqué par le régime Bédié ? Blé Goudé cite nommément des ethnies qui seraient pourchassées et martyrisées : Bété, Abidji, Ebrié, Aladjan, Abouré… Une incitation ouverte et manifeste à la haine. Blé Goudé montre bien une face hideuse de son camp. Et tente de passer un message à ces ethnies : ne nous trahissez pas, ne ralliez pas Ouattara et la réconciliation, révoltez-vous. Enfin, l’ex-ministre du gouvernement Aké N’Gbo, exploite à des fins très politiciennes la mort de Désiré Tagro. Ce n’est pas juste. Blé Goudé insiste sur le boycott de l’élection législative à venir par le FPI et LMP si des conditions ne sont pas réunies. C’est-à-dire, si par exemple, les poursuites ne sont pas levées et que lui même ne peut être candidat. En clair, l’homme Blé Goudé réduit la réconciliation à ses seules ambitions. Concernant les plaintes contre lui, il se dit à nouveau serein et exige un procès pour Ouattara et Soro. Quand on a fini d’écouter Blé Goudé, on comprend effectivement, que pour l’instant, sa marge de manœuvre est étroite et que l’homme se sent acculé, choisit des mots pour choquer, provoquer et faire mal à Ouattara comme pour faire un chantage et se venger d’avoir été floué , du fait que sa main tendue, ait été refusée. En effet, dans Jeune Afrique, avant les poursuites contre lui, Blé Goudé se proposait de rentrer au pays pour une caravane de la réconciliation. Quelques observateurs du camp Ouattara peuvent déplorer que ce schéma n’ait pas pu prospérer tant les maux prêtés à tort ou a raison a Blé sont nombreux au RHDP. Mais, cela ne saurait justifier un discours peu responsable qui attise encore la haine et permet justement aux radicaux d’avoir raison des modérés en disant ceci : vous avez vu, il est encore dans la logique de violence et de haine, on ne peut rien faire avec ces gens qui ne se sentent coupables de rien et agissent par chantage. Le message de Blé Goudé ne peut que radicaliser davantage le pouvoir. On ne demande pas à Blé Goudé d’être un surhomme et de supporter les choses. Mais, il devrait noter que si malgré les provocations et le mandat d’arrêt, il était resté dans le même tempo que son message a Jeune Afrique, la tâche aurait été plus facile pour les modérés du camp Ouattara. Mais on comprend que, les extrémistes du camp Gbagbo sont passés par là. Ble Goudé lui-même, était soupçonné de trahison, pour n’avoir pas trop attaqué Ouattara et son régime dans Jeune Afrique. Ses hommes le lui ont reproché et l’ont soupçonné de vouloir dealer, le mettant en garde contre une caravane de paix sous Ouattara au pouvoir. Quand le mandat d’arrêt est arrivé, alors les durs de son camp ont chargé et repris le discours des durs de l’autre camp : « on t’avait dit, ces gens ne veulent rien faire avec toi, tu t’es fait flouer ». Et puis, ce fut l’interview à Rfi, cet autre média francophone et non souverainiste. Jeune Afrique et RFI n’étaient pas toujours les bienvenus dans le camp Gbagbo avant la crise. Pour finir, citons cette réflexion d’une dame, pas trop piquée par le virus de la politique : « il dit certaines bonnes choses, mais il gâte son discours avec ces allusions aux ethnies, son refus de demander pardon aux Ivoiriens. Les victimes de son camp ne sont pas les seules de cette crise. Cela dit, il a grossit mais il na pas changé sa façon de parler. Même s’il fait des efforts pour se montrer calme et tranquille, on le voit presque harangueur, faisant de grands gestes, de la main et haussant la voix. Cette posture est une posture de belligérance, elle n’est pas une posture de paix ni de réconciliation ». Si le régime Ouattara doit retenir quelque chose de cette sortie, c’est de clarifier sa vision au sujet des poursuites et de la réconciliation d’une part, et d’autre part de trouver des interlocuteurs crédibles et acceptables pour le camp Gbagbo, si tant est qu’il ne veut pas avoir affaire à Blé Goudé et à d’autres. Enfin, tout le monde doit se rappeler que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.
C.. K
Encadré 3
Quelle stratégie adopter ?
Une lettre, une interview à Jeune Afrique, un entretien à RFI et un message vidéo. C’est un secret de polichinelle, Charles Blé Goudé est bel et bien vivant. En trois mois, le leader de la galaxie patriotique par ailleurs, président du Congrès des Jeunes Patriotes, s’est illustré à quatre reprises, pour faire entendre sa voix depuis son exil. La dernière en date, est son message vidéo du samedi 16 juillet 2011, lors du Conseil Européen du Congrès Panafricain des Jeunes Patriotes (COJEP). Au cours de ses quatre sorties, Charles Blé Goudé n’a pas varié ses récriminations à l’encontre du nouveau régime. ‘’Nous ne sommes pas des partisans de coup de force. Mais, c’est le peuple qui dira un jour le ‘’non’’ à Ouattara (…) On ne réussira pas à m’effrayer, on ne réussira pas à me bâillonner. Je parlerai et je vais dénoncer toutes les tares du pouvoir Ouattara. Je vais dénoncer toutes les tortures morales et physiques qu’on inflige aux Ivoiriens dans le silence parce que les hommes en armes sont partout et les Ivoiriens ne peuvent pas parler, ils ne peuvent rien dénoncer. Ils soufrent dans leurs chaires et je ne suis pas d’accord. Peut-être qu’un jour, Ouattara et ses hommes réussiront à me tuer comme ils ont tué Désiré Tagro’’, dixit Charles Blé Goudé dans son message vidéo. La même rengaine et la même méthode. Le leader de l’Alliance des jeunes patriotes gagnerait à adopter une autre stratégie pour jouer à fond la carte du jeune opposant, s’il veut rentrer dans l’histoire. Comme le fit Laurent Gbagbo avec le régime Houphouët lors de son exil en France. A savoir, calmer un tant soit peu le jeu, noter les faux pas du régime Ouattara avant de ‘’bondir sur sa proie’’, comme il tente de le faire présentement. Ne dit-on pas que, trop d’impôts tue l’impôt ? Il serait
souhaitable que Charles garde pour l’instant, profil bas pour mieux ‘’prendre au mot’’ les faits et méfaits du régime Ouattara. Une stratégie qui pourrait servir davantage ses partisans et aussi le président Ouattara qui a décidé de diriger la Côte d’Ivoire dans la transparence et l’équité.Et surtout Charles Blé Goudé doit demander pardon aux Ivoiriens et au peuple de Côte d’Ivoire. Avoir des pensées pour les victimes ne suffit pas. Il faut demander pardon aux LMP, qui ont été victimes, et que Gbagbo n’a pas su protéger jusqu’au bout, aux RHDP tués par les FDS avant le 11 avril 2011, demander pardon à tous.
D. V
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