Rétablir la sécurité, un défi pour le nouveau pouvoir
Dans dix jours, cela fera trois mois qu’Alassane Ouattara et son équipe seront à la tête de la Côte d’Ivoire. Trois mois d’un nouveau pouvoir, mais également trois mois d’anarchie, sans brigade de gendarmerie, sans policier ni commissariat. Trois mois d’insécurité totale, sans appareil de répression et de correction. La maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) est vidée de ses pensionnaires, évadés aux heures chaudes de la bataille d’Abidjan, au grand dam de la population. De notre correspondante à Abidjan
Outre les menaces de vengeances de pro-Ouattara auxquelles elles sont exposées, les populations d’Abidjan et de nombre d’autres villes ivoiriennes sont aujourd’hui à la merci des bandits et victimes d’agressions en tout genre. Les attaques de domiciles et les braquages sur les routes sont légions, malgré les patrouilles des éléments des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI). A cause de cette insécurité, les services publics et privés ont réaménagé leurs emplois du temps pour faciliter la tâche de leurs employés.
Cette situation s’explique par l’absence, depuis bientôt trois mois, des des membres des Ex-Forces de sécurité (FDS), pour la plupart cités comme déserteurs. Les commissariats étant toujours occupés par les FRCI, ils ne semblent pas fonctionner nonobstant les tournées et injonctions du Chef du Gouvernement Guillaume Soro et la volonté du ministre de l’Intérieur Hamed Bakayoko de rétablir l’ordre.
A cela, il faut ajouter les conséquences des pillages de ces postes de police qui ont été mis à sac avant d’être brûlés, pour la plupart, par les forces pro-Ouattara au plus fort de la crise de leadership opposant l’ancien président Laurent Gbagbo à l’actuel. « Il faut trois cent milliards de frais d’équipement et de matériel roulant », estime le ministre de l’Intérieur, pour que les éléments des ex-FDS jouent leur rôle efficacement dans la société.
D’énormes difficultés donc, sans parler de la réunification de l’armée régulière ivoirienne qui piétine encore. Selon le programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire (PNRRC), 11 000 anciens combattants, sur l’effectif jusqu’à maintenant indéterminé que compte les ex-forces armées des forces nouvelles (FAFN), devraient rejoindre l’ancien effectif des forces de défense et de sécurité de Côte d’Ivoire (FDS-CI). Une mission du PNRRC est d’ailleurs à l’intérieur du pays pour une évaluation.
La méfiance règne
Cependant, la cohabitation qu’appellent de leurs vœux les nouvelles autorités ne donne pas grand-chose sur le terrain. La méfiance entre les anciens ennemis est de mise. La chasse aux déserteurs dans le rang des FDS-CI, taxés de miliciens à la solde de l’ancien président, se poursuit. Et pour les « dénicher », tous les corps habillés ont été payés directement en liquide, de la main à la main, le mois dernier.
Quant à la maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA), elle est en manque de pensionnaires, et d’ailleurs sans commodités administratives. Aucun matériel pour les procès verbaux, notifier les mandats de dépôts, les condamnés, etc. La MACA est en cours de réfection, et pendant ce temps les bandits courent les rues à la recherche de « bonnes affaires ».
Autant de problèmes en suspens qui doivent vite trouver solutions. Sinon toutes les promesses de dons, d’aides au développement – marques de la bonne volonté de la communauté internationale – pour reconstruire le pays resteront vaines, et les populations continueront de fuir vers des pays plus calmes.
Pour résoudre cette situation, le conseiller du président, le colonel Marc Paitier, en charge de la restructuration de l’armée ivoirienne, devra jouer son va-tout. La visite éclaire de Jacques Longuet à Abidjan dimanche 26 juin, pour consolider les nouvelles relations, et la signature du nouvel accord de Défense entre les deux pays devraient également aider au rétablissement de l’ordre et de la discipline au sein de la nouvelle armée ivoirienne.
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