Duékoué, des armes à la mission catholique – Le préfet « Ici, on a des dozos baoulé, des dozos burkinabé, des dozos de toutes les ethnies »

Duékoué / Des armes à la mission catholique – Le préfet et le commandant Koné Daouda inquiets
L’Intelligent d’Abidjan

La ville de Duékoué a connu des moments douloureux pendant la crise postélectorale de novembre 2010 avec ses villages et quartiers entièrement détruits, ses déplacés de la mission catholique, qui vivent dans des conditions de précarité. Des événements que certains veulent laisser loin derrière eux, afin de reconstruire cette ville carrefour du moyen Cavally. Mais, Duékoué présente encore des signes de reprise d’hostilités. C’est le constat fait à la suite de la rencontre avec les autorités administratives et militaires de la ville. Et ce, dans le cadre de la mission préparatoire de l’identification des Forces Républicaines de Côte d’Ivoire et autres groupes d’auto-défense dans la ville de Duékoué, par le Programme National de Réinsertion et de Réhabilitation Communautaire (PNRRC). Mission conduite par le conseiller spécial du Coordonnateur du PNRRC, Djouah Kéhi. Cette mission qui a débuté depuis le jeudi 23 juin à Séguéla, s’est retrouvée le samedi 25 juin à Duékoué. La vie socio-économique a repris tant bien que mal dans cette ville. Une reprise qui laisse penser que tout va bien à Duékoué. Et que sur le plan sécuritaire, les choses vont en s’améliorant avec la forte présence des FRCI dans tous les coins de rue et les bruits de musique, entendus ici et là comme à la rue princesse de Yopougon.

Des miliciens et mercenaires armés au sein de la Mission catholique
Durant la crise armée qu’a connue Duékoué, plusieurs personnes se sont retrouvées dans la mission catholique afin d’y trouver gîte et couvert. Parmi ceux-ci, des miliciens et mercenaires ont trouvé refuge dans cet édifice religieux avec des armes. À en croire le commandant Koné Daouda, une cinquantaine d’armes ont été retrouvées à la mission catholique avec des jeunes miliciens. Mais beaucoup d’armes ont été cachées par ces derniers à la suite de la première découverte d’armes par ses hommes. Pour lui, certains cadres de la région incitent les jeunes à la vengeance. Ils demandent aux miliciens de ne point déposer les armes. « Tant que les cadres de la région continueront de passer les coups de fil à la mission catholique, dans les petits villages, pour dire aux jeunes de ne pas rendre les armes ; de se préparer à rendre leur monnaie, les choses ne s’amélioreront pas. Parce que, disent-ils, ils ont tué nos parents, il faut aussi que nous tuions leurs parents», a révélé le commandant. Et de préciser que ces cadres effectuent des recrutements pour la reprise des hostilités. «Selon des jeunes que nous avons appréhendés, près de 100 mercenaires libériens ont rejoint la mission catholique à ce jour et 200 Ivoiriens volontaires qui sont aussi là, prêts à suivre le mot d’ordre de certains cadres. Une sorte de recrutement qui a commencé, puisque des cadres demandent aux jeunes de se préparer pour la vengeance», a-t-il ajouté.

Des armes en circulation; les élections locales menacées
« Le nombre d’armes ramassées ici n’a rien à voir avec l’effectif réel ou supposé des miliciens que nous avons dans cette zone. Surtout que nous sommes convaincus que beaucoup d’armes circulent à Duékoué », a déclaré le préfet de Duékoué, Benjamin Effoli. Indiquant ainsi que des miliciens refusent de déposer les armes, surtout que certains cadres appellent à la vengeance. Sur la question de circulation d’armes, le commandant Koné Daouda se veut encore plus clair. «Sur des milliers d’armes déposées ici, nous n’avons pas retrouvé plus d’une centaine. Il y a des armes encore qui circulent», a-t-il précisé. Une situation qui, selon le préfet, pourrait perturber les prochaines élections locales. « Si ce problème n’est pas pris à bras le corps, je ne peux pas garantir la tranquillité des prochaines élections locales. Les élections locales opposeront les enfants de la localité et chaque cadre détient aujourd’hui une portion de milice quelque part. Il faut craindre, si on ne règle pas ce problème, pendant les élections législatives et municipales, il pourrait avoir des grabuges », s’est-il inquiété. Raison pour laquelle, il a salué l’arrivée du PNRRC. Qui pour lui permettra, lors de la phase pratique de l’identification des FRCI et des groupes d’auto-défense, de régler ce problème de circulation d’armes à feu. Car selon le commandant Konda, des jeunes miliciens ont la volonté de déposer les armes.

Les Dozos règnent en maîtres
La situation sécuritaire est très précaire, avec la circulation des armes à feu et la présence des miliciens et mercenaires libériens. A côté de ces derniers, les maîtres et ‘’seigneurs’’ de Duékoué sont aussi les Dozos. Plus craint que les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire, ces chasseurs entretiennent la terreur au sein des populations, notamment des déplacés ayant regagné leurs villages. «Quand on parle de problème de sécurité, les populations font aujourd’hui de plus en plus confiance aux FRCI. Mais l’inquiétude réelle des déplacés de la mission catholique est liée à la présence des Dozos. Les populations autochtones ont plus peur des Dozos que des FRCI. Nous avons une forte présence de Dozos dans la localité. Prenez les axes qui vont vers les camps, vous rencontrez surtout des Dozos. Ici nous avons des Dozos de toute ethnie. Initialement les Dozos étaient confinés dans une aire géographique, qui est le nord de la Côte d’Ivoire. Ce sont des planteurs pour se protéger à un moment donné ont dû faire cette formation, qui aujourd’hui menace la population autochtone. Ils patrouillent sur les routes sans ériger de barrages. Tous les déplacés me posent le problème constant de la présence des Dozos dans leurs villages», a dit le préfet Benjamin Effoli. Outre les Dozos, un groupe armé d’environ 300 hommes se réclamant des FRCI, occupe illégalement le parc du mont Peko situé sur l’axe Duékoué-Bloléquin. Un fait qu’a voulu souligner le préfet afin que les autorités prennent des mesures correctives pour libérer ce parc qui est un lieu du domaine de l’Etat.

L’opération d’identification des FRCI et groupes d’auto-défense, la bienvenue
Face aux nombreuses difficultés que rencontre la ville de Duékoué, avec ses velléités de conflit et d’insécurité, les autorités administratives et militaires ont très vite salué l’arrivée prochaine de l’opération d’identification des FRCI et des groupes d’auto-défense qui permettra pour les FRCI de réviser leur effectif, mais surtout pour les groupes d’auto-défense de déposer les armes de façon volontaire afin d’être pris en compte par le programme de réinsertion piloté par le PNRRC. Cette opération dans cette localité devrait non seulement permettre de ne plus voir les armes à feu circuler, mais aussi de sécuriser la localité pour les prochaines élections locales à Duékoué. C’est en cela que le préfet entend s’impliquer personnellement dans la réussite de l’opération. « Nous sommes heureux de savoir qu’aujourd’hui l’opération d’identification des FRCI s’effectuera bientôt à Duékoué. Nous allons nous impliquer personnellement pour que l’opération connaisse un succès. Nous veillerons pour avoir une bonne collaboration parce que nous travaillons tous pour notre pays. Nous avons intérêt à bien faire les choses pour que ce qui s’est produit n’arrive plus », a confié le préfet Benjamin Effolie. Pour sa part, le commandant Koné Daouda, souhaite que des cadres soient associés dans les messages de sensibilisation. « On voudrait que cette fois la sensibilisation puisse passer. Nous n’avons pas assez de temps. En ce qui concerne la région ouest, il faudrait associer les cadres dans la sensibilisation. Tant que les cadres de la région continuerons de passer les coups de fil à la mission catholique, dans les petits villages pour dire aux jeunes «ne rendez pas les armes ; préparez-vous à rendre votre monnaie, nous serons toujours en train de faire de l’identification », a-t-il fait savoir au PNRRC, tout en leur demandant de mettre l’accent sur le choix des partenaires dans la réalisation des micro-projets pour les démobilisés.
K. Ange envoyé spécial

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Connectionivoirienne.net

Le Nouveau Réveil

Situation sécuritaire à Duékoué/Binjamin Effoli (préfet de Duékoué) : “300 personnes armées se trouvent dans la forêt classée du Mont Péko”Situation sécuritaire à Duékoué/Binjamin Effoli (préfet de Duékoué) : “300 personnes armées se trouvent dans la forêt classée du Mont Péko”

« Nous avons ici une forte colonie de personnes fortement armées qui n’ont logiquement pas le droit de porter les armes. Si celles-là ne sont pas désarmées, il serait difficile d’aller à la paix. Les gens cachent des armes et détiennent des armes par devers eux. Il faut craindre beaucoup d’attaques à main armée et de braquages ». Le préfet de Duékoué, Benjamin Effoli, a fait le point de la situation sécuritaire de sa circonscription le samedi 25 juin dernier. C’était à la faveur d’une visite d’une délégation du Programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire(Pnrrc) venue sensibiliser les autorités administratives et militaires sur l’identification des éléments des Forces Républicaines à l’intérieur du pays. Le préfet a mentionné la forte présence de dozos (ndlr : chasseurs traditionnels) et la présence d’éléments armés dans la forêt classée du mont Péko. « La sécurité n’est pas totale. Nous avons une forte présence de dozos dans notre circonscription. Si vous prenez l’axe qui va à Man, vous rencontrerez beaucoup de dozos. Ici, on a des dozos baoulé, des dozos burkinabé, de dozos de toutes les ethnies. Alors que nous savons qu’initialement, les dozos sont confinés dans une ère géographique qui est le nord de la Côte d’Ivoire. Ce sont peut-être des planteurs qui veulent se protéger mais ils représentent aujourd’hui une menace pour les populations autochtones. Je ne suis pas en train de dire qu’ils agressent, mais tous les déplacés vous diront que leur présence ne leur permet pas de retourner dans les villages. L’information m’est parvenue que dans la forêt classée du mont Peko, il y aurait 300 personnes armées. Des gens qui sont présents dans cette zone depuis le début de la guerre. Il faut canaliser tout ce monde. C’est un danger réel si le problème n’est pas réglé définitivement » a-t-il ajouté. Face à ce tableau sombre, le préfet Benjamin Effoli craint pour les élections locales. « Je ne peux pas garantir la tranquillité des élections locales. Il faut que le problème de sécurité soit réglé avant ces échéances » propose-t-il. Le Commandant Frci de Duékoué, Koné Daouda, reconnaît, lui aussi, que les armes circulent toujours à Duékoué. « Il y a encore des armes qui circulent. Nous avons découvert plusieurs caches d’armes. Dans un village, nous avons découvert 18 armes dans un cimetière » a-t-il soutenu. En ce qui concerne l’identification des Frci, le chef de la délégation du Pnrrc, M. Djouha Kéi Edouard, a eu l’adhésion des autorités de Duékoué afin qu’elle connaisse un véritable succès. San Pedro et Tabou constituent les prochaines étapes du périple de la délégation du Pnrrc.

Jules Claver Aka
Envoyé spécial à Duékoué
Le Nouveau Réveil

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