Par Serge-Nicolas NZI | Connectionivoirienne.net
I – À force de jouer avec le feu, les dirigeants politiques ivoiriens ont conduits leur pays à la ruine plongeant leur peuple dans un désespoir sans nom qui laisse leur pays sans horizon. Cette guerre dont la Côte d’Ivoire fut le théâtre a affaibli l’immunité de la nation ivoirienne et provoqué dans ses murs les fissures à travers lesquelles vont s’engouffrer des vents porteurs de tempêtes qui peuvent provoquer l’explosion du pays.
C’est dans cet esprit qu’il faut confirmer l’inviolabilité de la Côte d’ivoire, de sa souveraineté ainsi que de son indépendance. Cela passe par la restauration de l’unité du pays afin de prendre toutes les dispositions susceptibles de favoriser la reconstruction du pays et le retour des réfugiés dans les régions d’où la guerre les a expulsé.
En parlant d’unité, nous voulons dire que désormais, il incombe aux ivoiriens d’empêcher le retour de l’irrédentisme car : non seulement leur unité doit constituer la garantie de leur indépendance, mais l’indépendance de la Côte d’Ivoire devient à son tour la condition sine qua non de l’unité nationale.
II – Le paradoxe de la paix dans un pays bizarre
Ce qu’il faut aujourd’hui éviter, c’est que le paradoxe de la guerre ne débouche sur une paix paradoxale et absurde dans un pays où les uns et les autres se regardent avec méfiance. En effet dans les profondeurs de la psychologie collective des ivoiriens, il y a aujourd’hui un syndrome qui conditionne et pousse à la fois à l’espérance ainsi qu’à la peur de l’autre.
Peur du verbe, des calculs politiques, peur de l’action de l’autre, peur de la pensée de l’autre et de ses arrière-pensées. Strate après strate, des émotions réprimées, des sentiments inhibés, des motivations convulsives se solidifient au point de créer des mécanismes psychologiques semblables et dissemblables, si bien que le projet d’avenir commun des ivoiriens que propose le gouvernement ne sera qu’une projection et une réinterprétation des méfiances découlant de la guerre récente.
C’est cela qui nous amène a dire ici qu’il faut absolument éviter aujourd’hui que les paradoxes de la guerre ne dégénèrent en paradoxes de paix et qu’ainsi le dialogue nécessaire à la réconciliation nationale ne ramène à zéro tous les efforts pour transformer la paix fragile en un absurde paradoxe d’une guerre à l’infinie.
Dans la réalité il ne s’agit pas d’un contentieux électoral, ni d’une guerre civile comme disent certains mais d’une projection des antagonismes de la classe politique ivoirienne dans les structures internes du pays qui naturellement conflictuelles, étaient prêtes non seulement à les accueillir, mais aussi à les susciter, à les aiguiser en espérant trouver en elle leur suprême expression.
III – Gouverner n’est pas conquérir
Celui qui écrit ces lignes a eu la chance de voir la Côte d’Ivoire accéder à l’indépendance. Il a eu l’opportunité de voir de prêt et de loin la gouvernance de tous ceux qui se sont succédés à la tête de ce pays du 7 Août 1960 à ce jour.
Nous sommes donc en mesure sans être un courtisan, ni un politicard encore moins un militant de parti politique, de dire ici que ce qui a est plus que détestable aujourd’hui, c’est cette confusion entre gouverner dans le but de faire le bonheur des ivoiriens ou conquérir un pays dans le but de s’octroyer des richesses et des privilèges.
L’image du président Félix Houphouët-Boigny disant en directe à la télévision qu’il est riche, qu’il a des milliards en Suisse, quel est l’homme sérieux qui ne met pas une partie de ses biens en suisse ? << Avec des fous comme vous, vous pensez que je ne vais pas assurer l’avenir de mes enfants ? J’ai fais la politique pour deux générations d’Houphouët, voilà pourquoi il n’y a aucun de mes enfants dans la vie politique de la Côte d’Ivoire. >> Les enfants d’Houphouët étaient-ils plus importants que les autres ivoiriens ?
De tels propos sont sortis de la bouche d’un chef d’Etat en exercice. Les ivoiriens étaient sidérés et médusés, c’est celui qui était le guide éclairé de la nation ivoirienne ? Le père de l’indépendance ? Le cerveau politique de premier ordre dont parlait le général de Gaulle dans ses mémoires ? Il ne faut pas s’étonner de tous les malheurs qui se sont abattus sur la Côte d’Ivoire. La maison s’écroule toujours si elle ne repose pas sur des fondations solides.
Nous avouons que c’est depuis ce jour que nous avons compris que l’exercice du pouvoir en Côte d’Ivoire depuis le 7 Août 1960, n’était pas un service au bénéfice du peuple ivoirien. Mais au service du bien être, du profit et de la jouissance des bienfaits du pouvoir pour une minorité, c’est-à-dire le chef de l’Etat et son entourage immédiat.
Gouverner dans l’intérêt général, gouverner pour faire le bien et œuvre utile dans l’exercice du pouvoir politique. Signer des contrats profitables au pays que l’on gouverne et non pour plaire à des amitiés extérieures. Etre attentif au sort du plus grand nombre et non de sa région ou de son groupe ethno tribal.
Ne plus jeter les gens en prison parce qu’ils ne partagent pas votre politique et votre soumission à une tierce puissance. Car l’aplat-ventrisme humiliant n’à jamais conduit un seul homme sur cette terre au bonheur économique et social à plus forte raison un peuple. Gouverner n’est pas conquérir, tous ceux qui feront cette confusion seront châtiés impitoyablement par l’histoire du peuple ivoirien.
Ne plus fabriquer des lois sur mesure pour jeter ses opposants en prison. Eviter l’affairisme au sommet de l’Etat et ne plus jamais permettre à une armée étrangère d’intervenir dans les affaires intérieures de la Côte d’Ivoire.
C’est une façon de mettre ce pays à l’abri d’une reconquête coloniale. Ne même plus permettre le stationnement d’une base militaire étrangère sur le sol ivoirien.
Il ne s’agit pas ici d’être pro yao, Koffi, Sery, Zokou, Ibrahim ou Mamadou. Les ivoiriens veulent vivres librement chez eux sans avoir sur leur propre sol, une force d’occupation qui les tient en joue. Exercer le pouvoir politique au profit des ivoiriens et non pour plaire à des amitiés extérieures dont le but est de vous soutenir dans la durée sur un fauteuil qui est la légitimation de la ruine et du malheur pour tout un peuple.
L’immense catastrophe venant des décombres fumants et les restes mortuaires du Zaïre de Mobutu sont devant nous pour montrer à nos contradicteurs que ce types de pouvoir n’a pas son propre avenir dans le temps. Il est fondamentalement destructeur, prédateur et vampirise par son irresponsabilité l’effort de progrès de la nation. Gouverner n’est pas conquérir, il faut le rappeler constamment dans la vie politique ivoirienne.
En ce qui concerne Laurent Gbagbo, s’il a commis des crimes, nous sommes de ceux qui aimeraient qu’il soit jugé dans un procès équitable avec tout le respect des droits de la défense. En disant cela nous ne sommes ni des courtisans de la refondation frontiste et Gbagboïste, dont nous avons tous vus les limites.
Non Mesdames et messieurs, en 1963 un faux complot fut inventé par un chef d’Etat ivoirien et des innocents furent jugés et condamnés à mort dans la prison concentrationnaire de Yamoussoukro Assabou, qui ne figurait nul par sur la carte pénitentiaire du pays.
Etait-elle une prison publique ou une prison privée construite dans le village du chef de l’Etat ? Mais mieux encore les accusés qu’on savait innocents, furent menottés transportés en fourgon de police et emmenés au central Boxing club de Trechville où ils prirent la parole en public devant un micro pour s’accuser de crimes qu’ils n’avaient pas commis. Beaucoup ne se sont pas remis de cette scène jusqu’à leur mort. On peut tout faire ici bas avec le pouvoir, mais amener des innocents à s’accuser de ce qu’ils n’ont pas fait est inacceptable et impardonnable.
Quand un pouvoir politique a recours à des procédés aussi ignobles et indignes pour se débarrasser de ceux qui ne partagent pas hypothèque que sa complaisance fait peser sur l’indépendance nationale, il y a une monstrueuse injustice à dénoncer et à corriger.
Pour que la vie politique sous nos cieux ne se transforme pas en une jungle permanente ou celui qui dirige à un droit de vie et de mort sur les autres ivoiriens. Il faut mettre fin à l’arbitraire qui consiste à utiliser les moyens de l’Etat contre une seule personne ou contre un groupe ethnique. Gouverner n’est pas conquérir, l’exprimer aujourd’hui est une exigence morale de notre temps.
IV – La force de l’avenir commun est de ne plus se taire
Dans la nouvelle page de l’histoire commune que les ivoiriens doivent écrire ensemble, il ne faut plus se taire dorénavant, sur les dérives du pouvoir. Quand l’armée ivoirienne fut réquisitionnée avec le soutien des forces française du 43e BIMA, pour des massacres à grande échelle dans le Guebié, pourquoi il n’y a pas eu au sein du PDCI-RDA, qui était le parti au pouvoir des voix pour dénoncer les abus de cette expédition punitive qui a fait des milliers de mort ? Ceux qui avaient perdus la vie, n’était-ils pas des ivoiriens ?
On nous dit que nous appartenons à une seule et même famille et quand il y a un problème on assiste muet aux massacres d’une partie de la soit disante famille dans une indifférence qui frise la lâcheté. Comment reconstruire l’unité de la nation après un tel gâchis et des rancœurs durablement incrustées dans le subconscient des uns et des autres ?
Où était le Bureau politique du PDCI-RDA, quand tous les gestionnaires des sociétés d’Etat dilapidaient les ressources des entreprises de la nation à leur profit sans aucunes poursuites ? Où était ce parti quand tous les moyens de l’Etat y compris les chiens de service, furent lâchés contre le Dr Allassane Ouattara dans la période indigne de l’ivoirité, dont les cicatrices sont encore visibles sur le corps de la Côte d’Ivoire meurtrie ?
Où étaient les membres du Comité central du FPI, Parti de la refondation quand on déchirait les cartes d’identités des ressortissants du nord de la Côte d’Ivoire ? Pourquoi aucune voix ne s’était pas élevée pour exprimer une indignation justifiée quand des obus furent tirés contre des femmes dans un marché Abidjanais ?
Où étaient les dirigeants Gbagboïstes du FPI, quand les 80 % des candidats admis à l’école de police étaient tous des bétés ? Des imans furent tués dans leur mosquée sans que les bien-pensants du FPI, n’élèvent la moindre protestation et les voilà aujourd’hui parlant de chasse à l’homme contre eux.
Pourquoi les militants du RDR au pouvoir aujourd’hui, se taisent et trouvent normal que des ivoiriens soient égorgés à leur domicile et leur biens emportés parce qu’il ont soutenus Gbagbo ? Nous sommes dans une phase de la vie de la Côte d’Ivoire ou se taire devient un crime. Car ceux qui se taisent aujourd’hui ne pourront plus rien dire demain quand un autre pouvoir revanchard, assassinera à tour de bras ceux qui ont soutenus tel ou tel régime politique.
Libérer la parole pour qu’elle soit au service de la vérité, de la raison et d’un dialogue national utile à la reconstruction de l’harmonie entre ivoirien. Tel doit être la nouvelle démarche de ceux qui veulent faire de la politique pour mettre l’intelligence dans l’espace public éburnéen.
V – La coopération avec la France
Le pouvoir politique actuel en Côte d’Ivoire ne doit pas demeurer prisonnier des accords Dépassés et surpassés avec la France, ainsi que des institutions désuètes, qui n’ont peut-être pas mené à la guerre, mais qui ne l’ont certainement pas empêchée. N’est-il pas d’ailleurs ridicule, sinon risible, de parler encore de constitutionalité ou de légalité dans un pays détruit, démembré, disloqué, décomposé, où aucune loi n’est applicable ?
Des hommes armées peuvent débarquer au domicile d’un ivoirien de l’ethnie Agni, Bété, Dida, Malinké, Baoulé, Attié ou guéré pour l’égorger et emporter tous ses biens en violant sa femmes et ses filles au passage. Un pays où aucun commissariat ou aucun poste de gendarmerie ne fonctionnent. Qui ira investir dans un pays de dozos dans lequel le fusil et les armes blanches font la loi ?
C’est en transcendant les problèmes qu’on va les résoudre, et non comme pendant cette dernière décennie, en s’y enfermant pour rechercher des compromis boiteux, inapplicables et insignifiants, parce que dépassés et trouvés trop tard.
Si la France veut vraiment aider les ivoiriens et éviter la libanisation de ce pays. Elle a intérêt à clarifier les relations franco-ivoiriennes, pour que les ivoiriens sachent s’ils sont des citoyens d’un pays libre et indépendant ou s’ils sont des ressortissants d’un condominium de la France ? Quelle est la nature de la présence militaire française en Côte d’Ivoire ?
Les militaire Français qui sont en Côte d’Ivoire sont-ils payés par le trésor public ivoirien ou par l’Etat français ? La refonte de l’armée ivoirienne n’est-elle pas une occasion d’un marché juteux de vente d’armes à la Côte d’Ivoire ? Occasion de fourrer aux ivoiriens des vieilleries repeintes qui ne serviront à rien en cas d’agression ?
Cette histoire ridicule est de la pure inconscience d’aller acheter des armes en rebut chez des gens qui ont perdu leur propre guerre, qui ont connu l’occupation étrangère et ont collaboré dans leur grande majorité avec leurs occupants et qui après toutes hontes bues sont venus chercher des pauvres africains pour les aider à sortir de la nuit noire de l’occupation dans laquelle ils étaient terrés comme des grillons. Est-ce vraiment de l’intelligence ?
Cela reste pour nous l’une des grandes énigmes de la coopération franco-africaine. D’ici nous voyons déjà des conseillers militaires français, rémunérés à prix d’or ils seront nombreux dans les bureaux, on les verra à la Présidence de la république, mais très peu dans les casernes. Les français, nous les connaissons, ils demandent le climatiseur d’abord, la villa avec piscine et la voiture, avant de commencer quoi que ce soit.
C’est le lieu de dire ici que les ivoiriens dans leur grande majorité ne sont pas opposés à la France. Ils refusent tous, l’immixtion de la France dans les choix politiques, économiques et diplomatique de leur pays. L’aplatissement de nos malheureux pays africains devant les intérêts étrangers est l’une des causes de notre retard économique et social.
Car il transforme nos dirigeants politiques en de vulgaires petits intermédiaires de contrats avec des commissions juteuses au passage, qui font de l’Etat nation un prédateur pour sa propre population. Les décombres du Zaïre de Mobutu, sont encore sous nos yeux pour nous le rappeler comme un des exemples concrets à ne pas suivre.
Dans tout les cas, un président de la république téléguidé de l’étranger n’a jamais fait le bonheur d’un seul africain sur cette terre. C’est une triste réalité de notre temps, qui nous rend méfiants envers ce type d’expérience politique, qui a échoué un peu partout en Afrique.
En définitif, nous considérons d’une manière générale que la souveraineté d’un pays ne doit s’accommoder d’aucune allégeance quelle qu’elle soit, et que la coexistence des Etats a besoin, pour être durable et profitable à tous, d’être établie sur le respect et la considération réciproque et non sur des rapports entre tuteur et mineur. Elle doit être exempte de toute contrainte et laisser intacte, chez chacun, la capacité de choisir et de refuser.
La situation de monopole des entreprises françaises dans nos pays Africains, leurs tendances à la surfacturation et à l’ingérence dans nos affaires, leur volonté de vouloir décider pour nous sans notre avis et cela avec le soutien des gouvernants français dont les campagnes électorales sont financées par ces entreprises et les régimes fantoches d’Afrique, nous font dire ici :
Que la vraie coopération franco-africaine doit prendre à bras le corps la lutte contre la pauvreté, pour que nous puissions avoir chez nous aussi des routes praticables en toutes saisons, des hôpitaux pour nous soigner des écoles pour éduquer et former notre jeunesse, bref, faire en sorte que des choses simples comme se loger, mettre son fils à l’école et se nourrir convenablement ne soient plus un rêve pour notre génération.
Bref dépoussiérer les accords de coopération avec la France de ses séquelles coloniales et néo-coloniales hérité du gaullisme pour que naisse enfin une coopération franco-africaine, accoucheuse de la deuxième indépendance de nos pays africains de l’espace francophone. Voilà ce que la plupart des ivoiriens souhaitent de tout cœur dans la nouvelle relation avec la France.
L’intelligence commande que la France prenne elle-même les devants d’un tel changement de regards. C’est sa responsabilité. Il faut en effet changer de regards. Changer la nature des regards qui sont tournés vers la Côte d’Ivoire et l’Afrique mais aussi vers les français et la France. Pour évacuer le ressentiment croissant des ivoiriens envers l’ancien colonisateur.
Il ne s’agit pas ici d’être pour ou contre la France. D’être profrançais ou antifrançais. Il ne s’agit pas de basses considérations d’amour et de désamour. Les ivoiriens veulent vivre librement chez eux dans un pays qui est le leur et non sous l’irresponsabilité d’un régime à plat ventre devant un pays tiers. C’est cette humiliation qui est fondamentalement inacceptable aujourd’hui.
Des voix s’élèvent déjà un peu partout en Afrique, de Lomé à Douala, de Niamey à Cotonou et de Bamako à Brazzaville, pour dénoncer ce qui est de plus en plus inacceptable aujourd’hui. Même les régimes clientélistes installés à grand frais par la France, savent que cette position de soumission n’est plus tenable dans le temps. Il faut changer la nature des regards de la classe politique française sur l’Afrique avant qu’il ne soit trop tard, car le temps presse.
VI – Le cancer de la Corruption et de la médiocrité
Quel est ce pays bizarre où il n’y a jamais eu de sanctions contre les détournements de fonds publics et la corruption rampante qui ont complètement gangrené la vie économique et sociale du pays en faussant les rapports entre les citoyens ?
De la surfacturation des complexes sucriers aux rackets routiers en passant par les concours d’entrées dans les grandes écoles. La corruption est devenue un sport national en Côte d’Ivoire.
La corruption, érigée en système d’Etat, remplace la logique et la rigueur politique dans la Côte d’ivoire d’aujourd’hui. Les gens qui ont les moyens peuvent obtenir licences d’importations, rôles et services. Les qualités et les compétences du citoyen ivoirien ne sont plus prises en considération.
Ne comptent alors que ses prédispositions à la fraude, au marchandage, à l’opportunisme, à la bassesse, au mensonge et à la médiocrité. Dans un système où les postes et les privilèges, les diplômes et les offices se vendent et s’achètent, le citoyen est placé devant un seul choix : payer, sinon, son effort n’est pas récompensé, ses enfants sont mal classés, ses affaires bloquées, ses dossiers retardés ou égarés.
Cette réalité archaïque n’est pas dissimulée dans ce malheureux pays qu’est devenue la Côte d’Ivoire. Le pire est que cela n’encombre même pas les consciences. Elle est avouée, affichée et formulée au grand jour dans l’anarchie des valeurs qui vont à la dérive. Tout ce qui s’obtient dans la combine mafieuse se termine très mal pour tout le monde.
Ainsi, triomphe la fausseté qui rabaisse la démocratie, qui devient alors la médiocratie, au lieu de la méritocratie qui consolide la démocratie. Il faut frapper fort pour que la justice retrouve sa vraie place dans la vie commune. Il faut mettre fin aux temps bénis des arrangements entre copains. Le temps des surfacturations, des petites et grandes combines entre amis doit s’estomper aujourd’hui et maintenant.
VII – Le Dr Allassane Dramane Ouattara doit rendre l’État à la nation ivoirienne
Il ne nous appartient pas en tant qu’observateur attentif du marigot politique ivoirien de dire à un homme politique ce qu’il doit faire ou ne pas faire. Ses courtisans et autres conseillers sont auprès de lui à cet effet et le font déjà assez bien.
Nous pouvons simplement exprimer, nos craintes, nos angoisses et notre vision de la direction souhaitable pour construire le bien commun. Nous pensons qu’ayant le plus souffert du cancer de l’ivoirité, le Dr Ouattara est le mieux placé aujourd’hui pour rendre l’Etat à la nation ivoirienne.
La Nation est, par définition même, diversité d’intérêts, de corps sociaux, et c’est le rôle de l’Etat d’harmoniser et, au besoin d’arbitrer ces intérêts. Elle est, aussi diversité de tendances, de tempéraments, de sentiments et de croyances. Un de ses traits de génie consiste précisément à sécréter, à partir de ces éléments divers, une psychologie, une civilisation commune et à susciter autour des populations diverses qu’elle regroupe, une atmosphère où chacun respire un parfum qui ne lui est pas étranger, comme “ une sorte d’émanation subtile ”.
De l’empire du Ghana à celui du Mali en passant par la confédération ashanti de Kumasi ou l’empire peul du Macina. Des exemples concrets sont sous nos yeux sans allez en chine ou au Mexique.
Parce qu’elle est solidarité, la Nation est nécessairement respect des individualités, des originalités des groupes et des personnes. Elles ne peut les méconnaître sans se renier elle-même et se condamner elle-même à se briser. Etrangère à tout absolu totalitaire qui en est proprement la négation, la Nation est lieu de dialogue et d’échanges permanents entre groupes, entre peuples de souches divers, entre familles spirituelles d’une même communauté.
C’est justement parce qu’elle est lieu de dialogues et d’échanges qu’elle a pu réaliser, dans le passé le plus lointain, ces vastes regroupements cités plus haut, qui ne cessent de nous étonner par leurs dimensions et la diversité des masses humaines qui en étaient les composantes, surmontant les obstacles que dressaient, sans cesse, sur sa route longue et difficile, les nationalismes, des tribus et des clans.
C’est parce qu’elle se nourrit elle-même de dialogues et d’échanges qui en sont sa substance qu’elle a pu susciter, à partir d’elle-même, cet élan universaliste, ce mouvement de formation de civilisation spécifiques, si caractéristiques des principaux mondes culturels qui traduisent symboliquement l’image d’une humanité qui est à la fois unité et diversité.
Mais la Nation est aussi un fait de conscience et, en tant que tel, une puissance d’enracinement dans le psychique et une puissance d’évasion dans le cosmos.
Elle est à la fois passé et avenir, tradition et progrès, culture et histoire. C’est par son enregistrement dans le psychique de notre être, dans le passé, les traditions, la culture de nos pays africains, par les échos profonds qu’elle provoque en chacun de nous, par l’évocation de souvenirs communs, d’une vie vécue ensemble, que la Nation se fait attachante, génératrice et propagatrice d’émotion, de sympathie et de fraternité vraie.
C’est cet héritage affectif qui lui donne un autre visage que celui d’une communauté d’intérêts et explique les sacrifices ultimes que nous sommes conduits à lui consentir, ces possibilités extraordinaires d’entraînement dans les moments d’exaltation et de ferveur nationales et tout le parti que l’on peut en tirer pour le grand bien de la collectivité, si l’on sait en garder le contrôle, pour consolider la démocratie naissante. C’est une modeste pierre de notre part dans le jardin du Dr Allassane Ouattara.
VIII – Postulat de conclusion générale
En observant l’état de délabrement de la Côte d’Ivoire, les faits indiquent une détérioration lamentable de la conjoncture économique et sociopolitique. La société ivoirienne est à un carrefour. Elle doit choisir entre un certain matérialisme de ses élites qui l’a conduite à la dépendance, au précipice et la volonté farouche de construire son propre devenir avec la participation de la masse ivoirienne.
Elle doit choisir de continuer à être le pays d’une minorité nantie de tous les pouvoirs, de tous les droits et de tous les biens ou de devenir celui de tout un peuple partageant dans l’équité et la justice les ressources qu’il génère.
Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire est ébranlée dans ses racines les plus profondes, dans les valeurs les plus nobles qui ont forgé son histoire.
Des hommes et des femmes sont obligés d’aliéner corps, biens et esprits pour subsister. Les institutions sont en crise et se contentent d’exister .
Elles ont perdu leur capacité de création, de décision, de contrôle et d’orientation. Cela réduit la capacité du pays et des ivoiriens à décider par eux-mêmes et pour eux- même de l’orientation de leur devenir.
C’est une société qui cultive la dépendance à l’égard de l’extérieur : valeur des importations, volume de l’aide externe, agriculture en régression, situation du chômage, système en plein délabrement, hôpitaux en piteux état, routes impraticables, des écoles dépotoirs, dirigeants corrompus, tribalisme rampant, etc. cette dépendance se répète à l’intérieur à différents niveaux, jusqu’à provoquer un puissant blocage de la pensée et de l’action.
Cette société ivoirienne se tient debout difficilement sur les béquilles d’une pseudo république sans dignité, dans laquelle l’espoir ne pousse plus. La vérité ayant perdu sa substance, la communication entre les hommes devient impossible ou artificielle. La pensée s’arrête puisqu’elle n’est plus fécondée par l’échange et la contradiction. Quand l’intelligence déserte le forum, la médiocrité s’installe et tout finit en dictature.
Ainsi le fossé s’élargit chaque jour entre les ayants droits et les n’ayants pas droit. Ne s’identifiant plus dans le futur de cette société, menacé dans sa sécurité, le peuple comme dans les saintes écritures choisit l’exode, regardez comment nos frères exilés dans les pays voisins ont été accueillis et traités. Où est cette solidarité fraternelle entre africains tant chantée par nos discours ?
Les ivoiriens avaient pensé au matin du dimanche, 7 août 1960, qu’en sortant de la nuit coloniale, ils allaient tous dans la même direction portant ensemble une sorte de communion fraternelle pour bâtir une nation à leur service. Ce fut une grave erreur d’appréciation.
C’est donc par une sorte de malédiction découlant d’une tragique inculture qu’aujourd’hui avec l’aide des spécialistes qui ont fait leurs preuves ailleurs que, des ivoiriens se retrouvent torturant, pillant et tuant d’autres ivoiriens.
C’est par tragique inculture qu’un gouvernement indépendant organise lui même la terreur et la dispersion de son propre peuple à travers la sous région, faisant de l’état de réfugié, qui est anormal, une situation normale qui soit désormais en cet univers de violence et de haine, qui prouve que les droits des hommes ont été bafoués, piétinés et détournés.
Il y a des choses à ne plus faire dans ce malheureux pays pour reconstruire la confiance qui permettra à la Côte d’Ivoire de se relever. Il faut arrêter les violences inutiles. Les pillages, les vols de voitures qui favorisent un commerce juteux dans les pays voisins.
La situation des propriétaires de domiciles pillés et des femmes violées qui ne peuvent même pas aller dans un commissariat ou à un poste de gendarmerie pour ce plaindre fait de la Côte d’ivoire un pays pitoyable déserté par la raison et le bon sens.
La loi du fusil n’a jamais fait le bonheur de personne sur cette terre. Y a t-il encore quelqu’un qui a de l’autorité pour arrêter tous ces massacres inutiles ? Car le risque est grand pour ceux qui sont menacés jusque dans leur vie privée de se constituer en milice pour se défendre.
C’est de cette façon que sont nés les mouvements de guérillas en Amérique latine : Front sandiniste de libération nationale, au Nicaragua. Front farambundo Marty, de libération nationale au Salvador. Le mouvement Maoïste du sentier Lumineux au Pérou. L’armée Zapatiste de libération nationale au Mexique. Sans parler des FARC de Colombie.
Nous pensons que ce pays est allé trop loin dans son jeu avec le feu pour se permettre le luxe d’une instabilité chronique à la somalienne. Nous devons tous avoir à l’esprit ce qu’il ne faut plus faire pour retourner définitivement vers la paix. Pour Rechercher une solution de dignité aux frustrations et aux ressentiments des uns et des autres pour reconstruire le vivre ensemble.
C’est ce qui nous fait dire à la suite de notre maître le Pr. Joseph Ki Zerbo que : << Seul l’avenir est grand, parce qu’il est avenir, nous pouvons l’invoquer, nous pouvons le convoquer, nous pouvons le domestiquer, comme une bête féroce qui vient vers nous >>.
Telle doit être selon nous, la nouvelle direction à prendre pour relever le défi de la paix et de l’instauration de la démocratie en Côte d’Ivoire.
Merci de votre aimable attention
Dr Serge-Nicolas NZI
Chercheur en Communication
Lugano (Suisse)
Mail. nzinicolas@yahoo.fr
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