Côte d’Ivoire – DRÔLE DE « WOODY » !

Or donc la valeur de la vie transcende toutes les autres valeurs. Les joies et délices qu’elle sécrète nous sont, nous autres humains, si essentiels que la mort, instance dernière et fatale de notre séjour spatio-temporel, est perçue comme un drame, le mal radical. Cette vérité, on ne la réalise dans sa pleine dimension que lorsque vient ce moment fatidique qui nous rappelle la précarité de notre être, notre fragilité et notre nature périssable au-delà des puissances et pouvoirs dont nous nous croyons investis, de nos prouesses scientifico-techniques, de nos exploits artistico-culturels. L’angoisse envahissante de se voir basculer de façon abrupte avec ses acquis, ses projets, dans le néant nous assujettit à des convulsions, à des agitations, à se parjurer, à des reniements spectaculaires, à s’éjecter de la tour d’ivoire dans laquelle on s’est calfeutré, à l’orgueil délirant et non négociable dans lequel on s’est claquemuré, à courir dans tous les sens en quête de mains secourables, charitables. Cette image cadre parfaitement avec l’attitude couarde et désopilante du ‘’surhomme’’, du ‘’woody’’ de Mama, qui, suite à la cinglante déculottée infligée à sa soldatesque par les forces républicaines s’est empressé avec ses fidèles et proches de se blottir, se terrer dans un abri blindé souterrain tels des rats dont l’hallali a sonné. Curieuse conception de la bravoure ! En pays Bété, ethnie à laquelle appartient l’ex Président Laurent GBAGBO, le qualificatif ‘’woody’’, mélioratif et laudateur, est prédiqué aux hommes ayant fait preuve de vaillance, de courage héroïque, notamment dans les combats et qui sont d’une ténacité inaccessible au découragement. Quel est donc ce ‘’woody’’ qui, à la moindre escarmouche prend le large avec l’idée pusillanime de se réfugier dans un bunker, abandonnant ses soldats à la merci de la puissance de feu de l’adversaire ? Quelle est cette vision extraordinaire de la vaillance qui autorise à servir de jeunes gens à peine mâture comme bouclier humain pendant qu’on se met soi-même hors de danger en se cloîtrant dans un trou du sol telle une vulgaire souris tentant d’échapper à la prédation d’un carnassier ? Où sont donc passés cette surenchère verbale, cette attitude désinvolte et cavalière, ces menaces, ces invectives à tout va à peine voilées à l’endroit de tout outrecuidant affichant le toupet de défendre une autre thèse que la vôtre, ces numéros d’esbroufe auxquels vous vous livriez journalièrement en mettant à rude épreuve l’argent du contribuable ? Si la vie est si importante, indispensable même comme le démontrent vos pleutres comportements qui nous ont été servis ces jours-ci, dont le côté burlesque astreint de façon irrépressible à s’esclaffer, pourquoi alors en priver les autres en les massacrant à l’arme lourde ? Pourquoi réduire à la disette un pan entier de la population en les privant du minimum vital ? Pourquoi, diantre, rompre durant des jours voire des semaines la fourniture d’électricité et d’eau, sine qua non à la conservation de tout individu, dans les zones sous contrôle des forces nouvelles constituant désormais l’ossature des forces républicaines ? Même en scindant artificiellement le pays en deux entités (Côte d’Ivoire utile et Côte d’Ivoire inutile) selon une logique qui n’est propre qu’à des êtres sujets à la démence, cette catégorisation perd tout sens devant la précellence de l’humanité : l’homme, c’est l’homme. Aucune autre considération, pour des êtres disposant in extenso de toutes leurs facultés mentales, ne devrait l’emporter sur ce principe suprême.

Soundiata KEÏTA, Empereur du Mali à qui l’ex Président Laurent GBAGBO se compare prétentieusement et subrepticement, dans une de ses publications, même face à l’adversité la plus intenable, n’a jamais laissé en rade ses troupes. Comme nous le rapporte la légende, à la tête d’un rassemblement d’armées de différents petits royaumes en lutte contre le Sosso, Soundiata réussit à vaincre l’armée de Soumangourou KANTE en 1235 à Kirina qui disparut dans une montagne de Koulikoro. Qui plus est, aux antipodes des idées pernicieuses accoucheuses de divisions, facteurs de ségrégation, de clanisme dont Monsieur Laurent GBAGBO s’est fait l’apôtre, Soundiata fut un rassembleur. Il réunit tous les royaumes pour constituer l’Empire du Mali. Cette comparaison incongrue n’a d’existence que spécieuse, fallacieuse.

Cette crise postélectorale qui secoue le pays, prise dans toutes ses facettes, ne se justifie aucunement, du moins du point de vue de la pensée pensante. En la sassant et la ressassant, nul motif rationnellement défendable ne la fonde. Dans une précédente tribune, nous avions démontré, avec force argumentation, que cet entêtement du clan présidentiel à confisquer le pouvoir, s’originant dans un déni de démocratie, était simplement suicidaire. Les horreurs qui en ont résulté (brûler vif des êtres humains jusqu’à ce que mort s’en suive, abattre au RPG des manifestants et des manifestantes aux mains nues) n’ont jamais été vues de toute notre jeune histoire et resteront pendant longtemps tristement gravées dans la mémoire collective ivoirienne. Maintenant, il n’est pas question de s’adonner à des dérobades car le mal est gravissime. Laurent GBAGBO doit assumer en toute responsabilité cette hécatombe qu’il a planifiée des années durant et mise en exécution avec un cynisme jamais égalé. Si tuer lâchement des semblables biologiques doit procurer du plaisir, il faut pouvoir y répondre avec la même volupté puisque, dans cette cabalistique logique sadomasochiste, seul en effectuant le mal et en le subissant, peut générer le bonheur. L’heure est venue de traduire en actes cette mystérieuse perception de la bravoure consistant à détruire scélératement des vies humaines en affrontant frontalement les forces armées républicaines. Ce n’est pas le moment de s’enfermer, de se cloisonner, se murer dans un mutisme honteux. Sortez de votre république souterraine que vous croyez peut-être inviolable, inexpugnable puisque l’instant tant attendu de rendre compte, de la justice a sonné. Les jérémiades, les cris de désespoir d’Alain TOUSSAINT, sur les plateaux de chaînes de télévision françaises, fantasmant sur un éventuel renversement spectaculaire de situation en débitant d’incroyables fabulations que ne saurait avaler un enfant de la maternelle, constituent un coup d’épée dans l’eau. En affirmant que son mentor ne démissionnera pas est une grossière tentative de falsification de la réalité qui demeure têtue. Monsieur Laurent GBAGBO, depuis la proclamation des résultats du second tour de la présidentielle par la CEI, n’est investi d’aucune mission sinon celle qu’il s’est octroyée lui-même, avec le précieux coup de main de super YAO, de se perpétuer illégalement au pouvoir. Or, démissionner, suppose qu’on a été préalablement, légalement et légitiment chargé par une autorité, une communauté, une institution, un peuple, de conduire une mission à laquelle l’on renonce après l’avoir menée pendant un certain temps. Ce qui est loin d’être le cas ici. Au lieu de distiller à profusion des fadaises qui enfoncent davantage son demi-dieu, Alain TOUSSAINT gagnerait plutôt à préparer sa défense en actionnant à coups de billets de banque, comme ils savent si bien le faire, encore une fois, ces vieilles gloires du barreau français que sont maîtres Jacques VERGES et Roland DUMAS, avocats de toutes les crapules ayant jusque-là émaillé l’histoire de l’humanité, car sa comparution devant la CPI pour crime contre l’humanité est plus qu’une certitude. Mais avant, il devra faire face à un tribunal ivoirien qui lui donnera l’occasion de s’expliquer, de donner les aiguillons ayant motivé tout ce désastre généré par lui et ses séides. Les stratèges militaires à la tête des forces républicaines sont à pieds-d’œuvre pour extraire Laurent GBAGBO du trou dans lequel il croit jouir d’une sécurité infaillible. Mutatis mutandis, les verrous sautent, peu à peu, conduisant, pour sûr, à une capture très prochaine certaine. Devant la difficulté, le guerrier, le vrai ne s’esbigne pas, mais avec détermination et courage, démontre par un combat acharné, résolu qu’il n’a nullement usurpé son titre. Toutefois, le vrai chef, le combattant émérite est aussi celui qui, pour la survie, la conservation de l’intégrité morale et physique de son peuple, sait brandir le drapeau blanc, indice d’abdication, de renonciation à continuer la lutte, lorsqu’il réalise qu’il n’a plus le contrôle des leviers et que tout entêtement pourrait conduire à des conséquences dramatiques. A la définition que donne le Bété du ‘’Woody’’, nous ajoutons que cela ne doit pas exclusivement consister à brandir, à faire prévaloir les biceps et les triceps tel un animal borné, mais à célébrer également par le biais d’actes nobles, dignes des humains que nous sommes, les facultés de l’intellect.

DIARRA CHEICKH OUMAR
Etudiant en instance de thèse
Sciences politiques
E-mail : sekdiasek@gmail.com

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