jeuneafrique.com Par Anne Kappès-Grangé, à Addis-Abeba
Finie l’unité de façade qu’affichait l’Union africaine (UA) aux premières heures de la crise ivoirienne. Les condamnations du coup de force de Laurent Gbagbo ont perdu de leur vigueur. Ni Laurent Gbagbo ni Alassane Ouattara n’assisteront au 16e sommet de l’Union africaine qui s’ouvre, ce jeudi 27 janvier, à Addis-Abeba, mais chacun espère encore y rallier de nouveaux soutiens.
Les membres de l’Union africaine (UA) vont-ils réussir à se mettre d’accord sur le dossier ivoirien ? Là est tout l’enjeu du 16e sommet de l’UA qui s’ouvre ce matin à Addis Abeba (Ethiopie), avec la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays membres.
Officiellement, l’UA réclame toujours le départ de Laurent Gbagbo au profit d’Alassane Ouattara, mais le président sortant a clairement fait savoir qu’il n’entendait pas plier sous la pression de la communauté internationale. Le temps, il en est convaincu, est son meilleur allié. Faut-il recourir à la force pour le contraindre à quitter le pouvoir ? La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a déjà tranché. En début de semaine, elle a demandé aux Nations unies d’adopter une résolution légitimant l’option militaire. Le Nigeria a déjà fait savoir qu’il était prêt à y participer – à condition toutefois que l’opération soit avalisée par l’ONU.
Au sein de l’UA en revanche, la question ne fait pas l’unanimité. Dernière sortie en date, celle du président ougandais, Yoweri Museveni, qui a qualifié de « simpliste » la position des Nations Unies qui ont reconnu la victoire d’Alassane Ouattara : « Il faut ouvrir des enquêtes, a-t-il déclaré le 24 janvier dans un communiqué transmis au Daily Monitor. Il ne faut pas se contenter de dire que untel ou untel a gagné ».
Contre la force
Avant lui, d’autres chefs d’États africains avaient dit, de manière plus ou moins claire, leur opposition au recours à la force. Parmi eux, l’Angolais José Eduardo dos Santos, qui entretient de bonnes relations avec son homologue ivoirien et qui a d’emblée refusé de réclamer sa démission. Le Ghanéen John Atta Mills avait, quant à lui, déclaré dès la fin du mois de décembre 2010 qu’il n’enverrait pas ses troupes en Côte d’Ivoire. Même chose pour l’Afrique du Sud, dont l’ancien président, Thabo Mbeki, est réputé proche de Laurent Gbagbo, et qui prône un nouveau décompte des voix.
Le 21 janvier, le chef de l’État sud-africain, Jacob Zuma, a d’ailleurs estimé que les résultats du second tour de l’élection ivoirienne présentaient des « contradictions ». Enfin, à Malabo, Teodoro Obiang Nguema ne paraît pas plus décidé à se mêler des affaires ivoiriennes. Le président équato-guinéen – qui devrait prendre, dans les jours qui viennent, la présidence en exercice de l’UA en remplacement du malawite Binhu wa Mutharika, parvenu au terme de son mandat – s’est lui aussi dit favorable au dialogue.
Chacun compte ses soutiens
Nul doute, donc, que chacun va compter ses soutiens à Addis Abeba. Et puisqu’il est difficile à Alassane Ouattara de quitter l’Hôtel du Golf, où il réside depuis le début de la crise, c’est son Premier ministre et ministre de la Défense, Guillaume Soro, qui a annoncé sa venue au sommet de l’UA. Il se sera auparavant rendu au Burkina Faso et au Nigeria, puis à Brazzaville et à Malabo, où il a été respectivement reçu par Denis Sassou Nguesso et Teodoro Obiang Nguema.
A noter enfin que Nicolas Sarkozy fera lui aussi l’aller-retour à Addis-Abeba, le 30 janvier – un déplacement qu’il effectuera en sa qualité de président du G8 et du G20, et non en tant que chef de l’État français. Paris a jusque là pris soin de ne pas commenter trop ouvertement l’actualité ivoirienne mais pourrait, selon les observateurs, profiter de l’occasion pour pousser l’UA a plus de fermeté. Or si l’UA et la Cedeao devaient finir par s’entendre, la position de Laurent Gbagbo pourrait devenir rapidement intenable.
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