La crise post-électorale que traverse la Côte d’Ivoire depuis le 28 novembre dernier met à nu des prises de positions et intrigues de la part de certains diplomates occidentaux en poste à Abidjan. Au nombre de ceux-ci, Sem Philip Carter III, ambassadeur des Usa en Côte d’Ivoire. Ce dernier, foulant aux pieds les principes élémentaires de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18/04/1961 et entrée en vigueur le 24/ 04/1964, tient des propos non seulement désobligeants envers le Président Gbagbo, vainqueur de la présidentielle du 28 novembre 2010 mais fait des révélations sans se rendre compte. Le diplomate pris par le « gopo » (rituel en pays Bété pour amener le sorcier à avouer son crime), affirme : « je suis parti rendre visite à M. Ouattara. Nous avons constaté que M. Bakayoko était là. J’ai été surpris de constater que ce dernier était à l’Hôtel du Golf. J’ai profité de cette occasion pour parler avec M. Bakayoko. Je lui ai demandé pourquoi, il était là. Il m’a dit ses difficultés pour faire sa déclaration. J’ai alors demandé ce qu’il allait faire. J’ai alors proposé à M. Choï que la déclaration soit faite à l’Onuci. (Hôtel Sebroko). Il a refusé parce qu’il s’est dit que ça allait affecter l’impartialité des Nations unies ». Mais de quel droit un ambassadeur d’un autre pays peut-il conseiller au président d’une Commission électorale indépendante d’un pays tiers le lieu où celui-ci doit aller proclamer des résultats d’une élection présidentielle ? Cela s’appelle simplement de l’ingérence intolérable. « Aux Usa, c’est-à-dire au pays de Philip Carter III, cela pourrait coûter le poste, avec retrait d’accréditation suivi de l’expulsion. Mais au fait, dans ce processus quel était le rôle des Usa ? » S’interroge un diplomate ivoirien. Qui invite les pays qui travaillent avec Ouattara à un peu de retenue. Car, dit-il, « Que tu sois de Lmp ou du Rhdp, on est d’accord pour dire que celui qui parle au nom de la Côte d’Ivoire, c’est celui qui a reçu l’onction du Conseil constitutionnel. C’est–à dire Laurent Gbagbo. A ce jour, Ouattara ne peut parler au nom de l’Etat de Côte d’Ivoire. Tout acte de reconnaissance d’ambassadeurs par lui nommé, sera un cas de jurisprudence de la part des Etats fragiles qui vont entrer dans ce jeu. Pis, créer une situation très préjudiciable à la sous-région. La meilleure façon de déstabiliser la sous-région, c’est de travailler avec Ouattara. Si Ouattara avait le pouvoir, comment son entourage peut-il prétendre qu’il sera aux affaires d’ici la fin de ce mois de janvier et qui se fera investi début février à Yamoussoukro ?» En clair, il n’est pas encore Président et n’a pas encore l’onction du peuple et Sarkozy devrait arrêter d’agiter les organisations régionales contre la Côte d’Ivoire. Pour les beaux yeux de Ouattara. Qu’il reconnaisse qu’il s’est trompé et que Choï a donné dans la précipitation. La certification à laquelle le Représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu en Côte d’Ivoire parle tant devrait intervenir en dernière position dans le processus électoral. Sur ce point, le contenu d’un communiqué de presse en date du 2 décembre, trouvé sur le site de l’Elysée que Sarkozy foule aux pieds en dit long : en voici un extrait : «… La Commission électorale indépendante s’est acquittée avec rigueur de sa mission, et son Président a proclamé cet après-midi, les résultats provisoires du scrutin. Il appartient désormais au Conseil constitutionnel de proclamer les résultats définitifs dans le strict respect de la volonté clairement exprimée par le peuple ivoirien. La certification des résultats par le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies en dépend… » En somme, là où Sarkozy aux premières heures de la crise reconnaît clairement l’existence et le rôle du Conseil constitutionnel en Côte d’Ivoire, lui Philip Carter III parle de crise constitutionnelle en Côte d’Ivoire.
Yolande Bahi
Le Temps
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