Médiations croisées tout azimut dans la crise postélectorale ivoirienne. Après les deux missions infructueuses des émissaires de la Cedeao et de l’UA, c’est l’ex-président nigérian qui s’invite dans le débat. A la surprise générale, surtout au moment où tout semblait être en suspend pour une sortie de crise par le dialogue. Une entrée en scène inattendue qui laisse planer un doute dans les deux camps sur cette action dite ‘’solitaire’’ de celui qui est considéré comme un habitué du dossier ivoirien. Au moment où bon nombre d’observateurs désespèrent du dialogue inter-ivoirien, quelle solution miracle peut proposer Obasanjo ou quel camp veut-il sauver in-extremis avant la réunion fatidique de la conférence des chefs d’Etats de la Cedeao du 22 janvier prochain ? Président de la République fédérale du Nigeria du 29 mai 1999 en mai 2007, Olusegun Obasanjo est un averti du contentieux sociopolitique ivoirien vieux de plus de dix ans. C’est un facilitateur privilégié de toutes les crises ivoiriennes qui ont durement secoué la Côte d’Ivoire. Depuis le coup d’Etat de décembre 99, jusqu’à cette crise postélectorale en passant par l’attaque du 19 septembre 2002, Obasanjo était de toutes les négociations. C’est un témoin oculaire des récents évènements de ce pays qui, à en croire certaines indiscrétions, pourrait mener une bonne discussion, et trouver certainement les mots justes pour chacun des belligérants capables de les dissuader. Mais les commentaires vont bon train depuis l’arrivée de celui que certains considèrent comme étant un médiateur solitaire. Même si tout le monde s’accorde à reconnaître l’impartialité de l’ex-président nigérian dans la gestion des crises ivoiriennes, il lui est reproché aussi d’être un équilibriste, qui parfois, manque de courage. Souvenez-vous qu’au début de la crise armée du 19 septembre 2002, c’est Olusegun Obasanjo qui aurait conseillé au Président Laurent Gbagbo ‘’qu’une rébellion se matte’’ et qu’il serait disponible à ‘’soutenir toute résolution par la force pour le règlement de ce conflit’’. Ce qui était vu de mauvais œil par Soro et des hommes qui avaient estimé qu’il avait pris partie. C’est encore lui, qui a soutenu, contre la volonté du RHDP en 2005, le maintien de l’Assemblée Nationale. Toutefois, quand les responsables des Forces Nouvelles désespéraient-ils des injonctions intempestives d’Obasanjo, celui-ci demanda à leur chef de fille, Guillaume Soro d’effectuer une mission au Nigeria à son invitation. Le séjour du Secrétaire général des Forces Nouvelles au Nigeria, chez Obasanjo a même fait rougir Laurent Gbagbo et ses partisans, rapporte-t-on, qui voyaient en cela une provocation et un désaveu. Obasanjo a, après cette rencontre, commencé à avoir une très grande admiration pour Guillaume Soro. Ce qui a suffit aux socialistes ivoiriens de dire que le Président Obasanjo ‘’pactise’’ avec leur ‘’ennemi’’. Mais la suite, on la connaît.
Obasanjo est-il vraiment l’ami de tous sans être réellement l’ami de quelqu’un ?
L’ancien Président Nigérian Olusegun Obasanjo, selon une certaine indiscrétion, qui serait en mission sous le ‘’couvert de Ban Ki-Moon’’, est déterminé à réussir le pari. Trouver une issue heureuse à la crise postélectorale. Pour y parvenir, il fera jouer ses profonds liens qu’il a avec le Président Laurent Gbagbo qui lui voue un grand respect et sa sympathie pour Alassane Ouattara avec qui il entretient de très bonnes et solides relations. S’il est vrai que ces facteurs ne peuvent en aucun cas influencer les positions assez tranchées de l’heure, il est aussi vrai qu’en homme averti, Obasanjo pourrait créer la surprise. Mais la question est de savoir si les deux protagonistes font confiance en leur ami commun de sorte à accepter ses propositions quoi qu’il en coûte ? Personne ne saurait répondre pour l’instant dans la mesure où seul Obasanjo à son secret pour faire fléchir l’un ou l’autre ? Mais comment ? C’est-là, la grande question.
Obasanjo peut-il sauver la situation ?
Certainement en phase avec l’actuel Président Nigérian Goodluck Jonathan, qui suit de très près toutes les négociations en terre ivoirienne, Obasanjo devra absolument trouver une solution à la crise ivoirienne. Il fera face à la proposition de recomptage des voix souhaitée par Laurent Gbagbo ou envisager en cas de difficulté, une possibilité qui pourrait faire l’économie d’une intervention militaire. Une situation bien embarrassante pour Obasanjo qui fait mains et pieds, depuis son arrivée samedi dernier à Abidjan, pour prendre le poule de la situation. D’autant plus qu’il a été déjà médiateur pour le compte de l’UA et de la Cedeao dans les différentes crises ivoiriennes, l’ex-chef d’Etat nigérian, qui connaît tous les contours du dossier ivoirien, est capable d’apporter un plus par une analyse juste, et équitable pouvant permettre d’éclairer l’UA et la Cedeao. Cette mission surprise, qui fait un peu entorse au calendrier officiel de la médiation de haut niveau, revêt un caractère déterminant. L’appréciation, l’analyse des faits et les propositions d’Obasanjo qui seront contenues dans son rapport pourront, à coup sûr, aider à la manifestation de la vérité afin de sauver la situation qui s’enlise davantage.
Patrice Pohé
L’Intelligent d’Abidjan
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