Il ne suffit pas d’être en capacité d’aligner, 3000, 4000 ou 5000 soldats, que ce soit sous l’égide des Nations Unies ou pas pour régler le différend des deux présidents ivoiriens. Régler le différend comment ? Sur le papier c’est simple – dans les rues d’Abidjan ce sera le chaos et les exactions que les deux camps ne se priveront pas de commettre.
Une force de réaction rapide africaine n’aura pour intérêt que d’être rapidement sur place et surtout très vite dépassée parce qu’on ignore totalement la tournure que prendront les évènements et, surtout, leur durée. Toute force confrontée à une guerre civile, et cela en prend l’allure, sera rapidement l’ennemie des deux camps. L’on peut voler de supposition en supposition, mais celle d’un rétablissement rapide de la paix est une illusion que les états majors devront vite abandonner pour des dispositions plus musclées, surtout, durables. L’imminence d’une telle intervention confirme l’échec diplomatique et signe la fin de la démocratie en Côte d’Ivoire puisqu’elle sera là pour départager militairement deux hommes que les urnes ont déjà partagé. Nous ne reviendrons pas sur les noms des heureux gagnants de cette élection mais ce ne sera pas les Ivoiriens.
L’intervention, si elle a lieu, sera conduite exclusivement par des Africains dont on peut douter de la capacité opérationnelle à œuvrer en milieu urbain (et de la volonté politique tout court) ; Abidjan n’est pas un village mais une mégapole. Le moindre mal sera pour les occidentaux, l’affaire restera africaine. On peut se demander toutefois si les soldats africains appelés à intervenir ne seront pas tentés, à un moment ou à un autre, de prendre partie pour l’un des deux camps – sympathies obligent. L’intervention ne se fera pas uniquement contre des hommes armés de machettes mais bien par une soldatesque puissamment armée et motivée formant deux camps qu’il sera difficile de combattre, de désarmer et de rendre à la raison. Les belligérants pourraient être tentés, au passage, de régler des comptes de type représailles à l’encontre d’Africains non ivoiriens ayant, par le passé, montré des sympathies envers tel ou tel camp.
La France, elle, ne bougera pas, du moins tant que ses ressortissants ne seront pas pris à partie sérieusement ; et si elle devait être appelée à le faire, aïe aïe le merdier.
Jean-Marc Trappler
armees.com
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