Depuis le 19 septembre 2002, la Côte d’Ivoire vit au rythme d’une crise militaire, politique voire sociale. Une situation qui s’est énormément aggravée depuis les présidentielles de 2010, surtout après le scrutin du 28 novembre dernier. La crise postélectorale née du second tour de la présidentielle ivoirienne, en plus de rendre le climat politique, économique, auparavant délétère, a fortement fracturé la réconciliation nationale et la cohésion sociale en terre d’Eburnie. Comment cette situation a véritablement pourri la vie sociale en Côte d’Ivoire ? Enquête.
Les positions tranchées des camps RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix) et LMP (La Majorité Présidentielle) ont pris une allure regrettable, dans le quotidien des Ivoiriens. Des collègues de service, des amis, des frères,…se regardent aujourd’hui en chiens de faïence.
La suspicion entre
les uns et les autres
est de mise
« Depuis cette crise, il y a un véritable malaise dans l’entreprise où je travaille. Les partisans de LMP se regroupent entre eux pour échanger. Pareil pour les militants du RHDP », fait savoir M. Bernard, informaticien dans une entreprise d’assurance. Cette suspicion entre collègues est également relayée par C. Salimata, commerciale dans une banque. « Avec les tueries, dans les nuits, annoncées ça et là, chacun se méfie de celui qui ne partage pas la même vision politique que lui pour ne pas être dénoncé », déclare-t-elle. Tout en lançant ceci : « En Afrique, la politique peut amener un proche de tout temps à être le véritable auteur de vos ennuis ».
Les Relations amicales, fraternelles et
de couple, se sont
détériorées
Au-delà des bureaux, la crise entre les Présidents Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo a déchiré de nombreuses relations amicales dans nos cités. M. Léto F., résidant à Abobo, déplore que son soutien pour le Président Laurent Gbagbo lui ait fait perdre des amis de longue date. Des informations circulent dans son quartier, affirmant qu’il est celui là même qui sert d’indic à des personnes qui viennent nuitamment, tuer des militants du RHDP à leur domicile. « Je ne me reconnais pas dans ces accusations », s’indigne-t-il. Puis de déplorer en ces termes les conséquences de cette situation : « Mes amis, même les meilleurs qui sont du RHDP me tournent le dos aujourd’hui ». Ce malaise national n’épargne, non plus les couples. K. Solange, militante engagée pour la cause du Président Alassane Ouattara, confie qu’elle est mal vue actuellement par son époux et sa belle famille qui soutiennent les idées de LMP. « L’harmonie de mon foyer a pris un coup depuis le déclenchement de cette crise », affirme-t-elle. Tout en ajoutant que sa belle famille supporte difficilement son choix politique qui diffère de celui de son époux. « Ce problème a même conduit certains frères et sœurs de mon mari à m’accuser d’infidélité », regrette-t-elle. La crise née du second tour de la présidentielle 2010 a également divisé des frères et sœurs. Béibro S., étudiant, défenseur des idées du Président Laurent Gbagbo, n’est plus en odeur de sainteté avec son grand frère qui est lui militant du RHDP. Les relations, naguère bon enfant, entre son frère et lui, dit-il, se sont détériorées depuis le début de cette tension. « Il est pour moi un grand frère chéri qui me soutenait beaucoup, surtout financièrement. Cette crise fait qu’il est très réticent à mon égard. A peine, il m’adresse la parole aujourd’hui », déclare Béibro, déçu de la tournure de cette situation. Une tournure qui doit interpeller plus d’un. Afin de pouvoir faire barrage à tous les oiseaux de mauvais augures qui voudraient conduire la Côte d’Ivoire dans un chaos sans précédent. Nos rapports amicaux, notre vie de couple, nos relations fraternelles, faut-il le souligner, transcendent nos divergences politiques. Raison pour laquelle, chacun à son niveau, doit œuvrer pour préserver la cohésion sociale et la réconciliation nationale, nonobstant nos différences.
R.Dibi
L’intelligent d’Abidjan
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