À Abidjan, principale ville de Côte d’Ivoire, les magasins commencent à rouvrir et la circulation reprend. Mais la nuit, les habitants des quartiers pro-Ouattara redoutent des attaques et se protègent derrière des barricades de fortune. Reportage.
Par Cyril VANIER / Karim HAKIKI
FRANCE 24 (texte) La vie reprend peu à peu son cours à Abidjan. Un peu plus de trois semaines après l’élection présidentielle controversée, les taxis circulent de nouveau et les magasins rouvrent leurs portes dans la capitale économique de la Côte d’Ivoire.
Mais derrière cette normalité de façade, les habitants ont peur, notamment dans les quartiers favorables à Alassane Ouattara, le candidat reconnu comme vainqueur de l’élection par la commission électorale indépendante et la communauté internationale, mais écarté du pouvoir par le président sortant Laurent Gbagbo, qui refuse de céder sa place.
Ali est de retour dans son petit commerce, mais il est inquiet. Il témoigne à visage caché par crainte de représailles. « On ne peut pas laisser le magasin fermé, sinon comment va-t-on manger ? », explique-t-il, assis sur les marches de sa boutique. « On préfère venir, même avec la peur au ventre. »
« Que la communauté internationale joigne l’acte à la parole »
Selon Navi Pillay, haut-commissaire des Nations unies pour les droits de l’Homme, plus de 50 personnes ont été tuées ces derniers jours dans le pays et il y aurait plus de 200 blessés – des centaines d’autres auraient également été enlevées chez elles, affirme-t-elle. L’ONU dénonce des pressions et des violences commises à l’encontre de son personnel par le camp Gbagbo, mais assure que rien n’empêchera ses troupes « de mener à bien [leur] mission » : protéger les civils.
Sur le terrain pourtant, les Ivoiriens craignent des attaques d’hommes armés dans leur quartier. Ils ne se sentent pas protégés par les casques bleus, alors que la mission de ces derniers dans le pays vient tout juste d’être prolongée de six mois.
Rondes de nuit et barrières de protection
« Il faudrait que la communauté internationale joigne l’acte à la parole », implore un habitant du quartier, en pleurs. « Il faut que cela cesse le plus rapidement possible. Je pense à mes deux enfants, à ma famille, ça ne va pas, ils vont nous tuer, ces gens-là vont nous tuer. »
Alassane, militant pro-Ouattara, montre les barrières de fortune en bois, érigées le soir par les habitants du quartier en guise de barricades. Il organise aussi des rondes de nuit. « C’est ça ma protection », raconte-t-il. « Qu’est-ce que j’ai pour nous protéger ? Les hommes en face ont des armes, nous on n’a pas d’armes et on nous dit qu’on est des rebelles. Mais ce sont eux les vrais rebelles. »
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