Grosse pression sur les forces de l’ONU en Côte-d’Ivoire

De notre envoyé spécial à AbidjanAccusées de partialité, l’ONUCI se dit «prête à faire face à toutes les éventualités» et n’exclut pas le départ d’une partie de son personnel.

Arnaud Vaulerin | Liberation.fr

C’est la stratégie de la tension. Plus les jours passent, plus la pression sur les forces de l’ONU en Côte-d’Ivoire s’intensifie. Vendredi soir, au lendemain de troubles qui ont fait au moins 30 morts et 150 blessés dans tout le pays, les Casques bleus ont été vigoureusement accusés de partialité par le clan de Laurent Gbagbo. En un mot «pris pour cible», selon l’expression retenue par le Département des opérations de paix des Nations Unies.

Avec des accents martiaux, la Radio télévision ivoirienne (RTI) a mis en scène un reportage qui avait tout du réquisitoire. En milieu de journal, le colonel Babri Gohorou Hilaire des Forces de sécurité de Côte-d’Ivoire est apparu en plan fixe pour lire un communiqué très explicite: «L’Onuci ne joue plus son rôle de force neutre et d’interposition», a lu d’une voix monocorde le soldat ivoirien. Fustigeant la présence de cette «force étrangère», il a accusé les Casques bleus d’avoir pris aux combats qui se sont déroulés aux abords du Golf Hôtel, jeudi, quand les Forces nouvelles favorables au président élu, Alassane Ouattara, ont tenté une percée hors de la résidence.

En mêlant des images de TF1 avec ses propres reportages, la RTI voulait montrer comment les Casques bleus s’étaient mis dans la «posture du combattant». Sans convaincre. Le colonel Babri Gohorou Hilaire est allé jusqu’à soupçonner l’Onuci de «transporter dans leurs véhicules les troupes des Forces nouvelles». Pis, il les a accusés de les «ravitailler en armes lourdes et légères». Avant de dénoncer les reconnaissances aériennes pourtant effectuées par les troupes de l’ONU depuis des mois et de s’en prendre à radio Onuci, «média de propagande».

«Accusations gratuites et injustes»
Contacté par Libération, ce samedi, les forces de l’Onuci ont rejeté «ces accusations gratuites et injustes qui ne correspondent pas à la réalité», avance Hamadoun Touré, le porte-parole de l’Onuci à Abidjan. Tout en mettant ces accusations sur le compte de la «nervosité», il rappelle que les «Casques bleus feront face à toutes les éventualités» en cas d’escalade. «Nous devons assurer la sécurité de l’hôtel du Golf, c’est le mandat qui nous a été confié. Nous avons une force suffisante pour le faire», précise le porte-parole.

Environ 800 hommes (sur les 10.000 Casques bleus dans tout le pays) sont déployés autour de l’hôtel où sont retranchés Alassane Ouattara, le Premier ministre Guillaume Soro et ses ministres. Ils doivent faire face à ce qui s’apparente de plus en plus à un siège, les accès du Golf Hôtel étant contrôlés et bloqués par les forces de sécurité loyales à Laurent Gbagbo. Dans les prochains jours, ils devraient être ravitaillés. Nul doute que cet acheminement constituera un test pour juger des intentions des forces ivoiriennes.

Car dans le reste de la ville, selon une source du département des opérations de paix des Nations unies, l’Onuci fait face à des pressions croissantes de la part des troupes et des forces de sécurité ivoiriennes. Hamadoun Touré parle de «harcèlement» et «d’interdictions de circuler dans les endroits sensibles comme la RTI et certains endroits du Plateau». Une voiture de l’ONU a d’ailleurs été détruite hier.

Les employés onusiens appelés à emprunter des convois militaires onusiens ont été limités. Et vendredi, les Nations unies n’excluaient pas de faire évacuer de Côte-d’Ivoire une «deuxième vague de personnels si rien ne changeait».

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