Depuis quasiment deux mois, les activités économiques sont en berne. A cause de l’élection présidentielle. Si lors du premier tour, vu l’élégance qui a caractérisé la campagne, les opérateurs économiques ont eu moins peur, les violents affrontements du second tour ont créé une psychose chez les commerçants, industriels et autres acteurs du secteur informel. Certes, à l’approche du 28 novembre (date du scrutin), les ménages ont pris d’assaut marchés et supermarchés pour constituer un stock suffisant en denrées alimentaires en vue de parer à toute éventualité, mais cette forte demande n’a été qu’éphémère.
Puisque que depuis le 27 novembre, on observe un calme plat en affaires. Les commerces sont, en général, fermés. Quand ils ouvrent, prudence et peur d’éventuels pillages sont de mise. Le transport est quasi paralysé parce que les véhicules de transport communaux et intercommunaux (taxis compteurs, woro-woro et minicars communément appelés Gbaka) se font rares, notamment dans tout le district d’Abidjan. En cette période où le commerce intérieur des fèves de cacao (la Côte d’Ivoire est premier producteur mondial avec 1,350 million de tonnes par an) connaît traditionnellement son pic ascendant, c’est au contraire à la morosité qu’on assiste. Les pisteurs et autres acheteurs bord champ attendent que la situation se normalise avant d’exprimer vraiment leurs intentions d’achat.
Quant aux exportateurs ivoiriens de la filière cacao, ils ont du mal à honorer leurs engagements à cause du climat délétère et des mesures sécuritaires qui obligent l’arrêt de tout transport avant 19 heures, et ce, jusqu’à 6 heures.
L’administration publique fonctionne au ralenti. L’administration privée (secteur privé formel) aussi. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement quand le couvre-feu oblige les travailleurs à quitter très tôt les bureaux, et quand les rumeurs de manifestations violentes après la proclamation des résultats foisonnent.
Défavorable aux activités économiques
Ou encore quand des images de violences perpétrées ça et là ou de «prise de la télévision ivoirienne» fusent de toutes parts. Situation aggravée par le non-respect par la Commission électorale indépendante (Cei) de ses promesses quant à la proclamation des résultats. En effet, elle avait promis au soir du scrutin, de les publier au fur et mesure qu’elle les recevrait des bureaux de vote.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’ambiance dans laquelle la Côte d’Ivoire est plongée en ce moment n’est pas favorable à la bonne marche de l’activité économique. Et c’est cette évidence que vivent les ménages ivoiriens. En ville comme en milieu rural. Déjà hier, les automobilistes ont commencé à faire la queue dès le matin, pour s’approvisionner en carburant. Le gaz butane se fait aussi rare au point que les ménages parcourent les quartiers en quête de ce précieux combustible pour la cuisine. Dans les villages, l’anxiété et les craintes d’agression contraignent les paysans à «abandonner momentanément» leurs plantations de cacao, café, banane plantain, riz et autres. La faim risque de gagner les populations rurales si cette situation perdure. Les marchés de produits vivriers appelés «marchés Gouro», se vident également. Dur! Vraiment dur d’attendre ces fameux résultats de la présidentielle. Or, la Côte d’Ivoire a besoin d’être au travail pour maintenir au moins le taux de croissance enregistré en 2009, c’est-à-dire 3,8%. Et le grand risque que le pays court est de retomber dans les travers économiques après les succès glanés au cours des dernières années grâce aux efforts d’assainissement des finances publiques et de redressement économique du gouvernement. En tout cas, le coût économique et financier de ces semaines gâchées sera sans aucun doute élevé. Pour tous et pour chacun.
Le budget 2010 de l’état bâti sur une conjoncture positive va certainement en pâtir. Car les ressources budgétaires pourraient être en déça des projections, étant donné qu’une part importante des recettes douanières est, en général, réalisée au dernier trimestre de l’année.
Gooré Bi Hué
Fraternité Matin
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