Cette année, 17 pays africains célèbrent le 50ème anniversaire de leur indépendance vis à vis des puissances européennes. Certains l’ont appelé « une célébration de la frustration » en raison de la lenteur des progrès économiques sur le continent en dépit de son énorme potentiel.
L’ancien président de la République de Tanzanie, SE Ali Hassan Mwinyi, déplore le fait que les pays africains disposent d’une indépendance politique, mais pas d’une indépendance économique. Selon lui, « la réalisation de l’indépendance politique par les pays africains n’a pas abouti à l’indépendance économique. Les pays africains ont réalisé assez tôt qu’il y avait encore un long chemin vers la réalisation de l’indépendance économique. »
Quand on regarde comment fonctionne la gouvernance mondiale, même l’indépendance politique de l’Afrique devient discutable. La route vers la pleine indépendance sera toujours difficile à moins que les populations et le leadership africains rendent nécessaires des changements de politique interne pour accélérer l’intégration économique, en vue de permettre des économies d’échelle. La part de l’Afrique dans le commerce mondial est encore à 2%, tandis que le commerce intra-africain représente 10% du commerce africain (40% du commerce en Amérique du Nord est intra-américain et 60% en Europe occidentale est intra-européen).
L’Afrique a perpétuellement joué le rôle de fournisseur des ressources naturelles dans le commerce mondial depuis l’indépendance, permettant à d’autres pays de réussir. Nous sommes toujours dans ce rôle 50 ans après l’indépendance. La plupart des gouvernements africains ont échoué à mettre en place les politiques et les structures qui leur permettraient de bénéficier des ressources naturelles. Ils ont pris l’option de l’aide internationale et des revenus de ressources naturelles. Les pays de l’Afrique doivent générer une valeur ajoutée à ces ressources naturelles et renforcer des institutions fortes et transparentes nécessaires au développement à long terme !
Certains pays ont fait des progrès importants du point de vue de l’amélioration de leur climat d’investissement afin d’attirer les investisseurs, mais beaucoup de travail doit encore être fait. La plupart de ces améliorations cible des investisseurs étrangers alors que les PME et le secteur informel, qui constituent l’épine dorsale des économies africaines, ne reçoivent que peu d’attention.
Selon les estimations du Bureau International du Travail, le secteur informel représente 72% de l’emploi en Afrique sub-saharienne. Il est donc impératif que les gouvernements africains améliorent davantage le climat d’investissement de la région et réduisent les coûts de faire des affaires ; et donc pas seulement pour les grandes entreprises multinationales, mais de manière plus importante encore, pour les PME et le secteur informel afin de les rendre efficaces, productifs et qu’ils puissent employer davantage de personnes.
L’Afrique a un énorme potentiel économique : un milliard de personnes, surtout des jeunes, 40% de la capacité de production hydroélectrique du monde et de vastes ressources géothermique et solaire; 60% des terres arables incultivées du monde et bien plus encore. L’Afrique dispose d’un réel potentiel pour un décollage économique de long terme. Les dirigeants africains et les citoyens doivent opérer des changements fondamentaux dans la façon dont ils exercent leurs activités en se concentrant sur la productivité et la valeur ajoutée. Cela permettra d’assurer une croissance économique durable et de meilleures conditions de vie.
Les dirigeants africains ont salué la présence croissante de la Chine, qui a soif de nouvelles ressources pour maintenir sa croissance économique en cours et qui offre un « Tant pis pour la démocratie », à la différence des puissances occidentales. Excellent pour la Chine ! Mais comment peut-elle contribuer aux intérêts de l’Afrique? L’Afrique a besoin plus que juste un changement de ses partenaires d’Ouest en Est. Changer de partenaire ne suffira pas à résoudre de nombreux problèmes de l’Afrique: la création de richesses pour lutter contre la pauvreté, le renforcement des infrastructures et l’amélioration du climat d’investissement pour les PME et le secteur informel sont des éléments vitaux. L’essence même du développement et de la croissance économique est la création de richesse, la valorisation des ressources et la diversification de l’économie – et non pas simplement exporter des ressources naturelles brutes pour alimenter les industries outre-mer.
Il y a des signes encourageants pour les perspectives économiques de l’Afrique : les économies africaines ont crû en moyenne de 4,9% par an entre 2000 et 2008, plus de deux fois le rythme de la décennie précédente. Cette croissance rapide s’explique en grande partie par le boom des ressources et par de meilleures politiques publiques. Le tout récent Index Mo Ibrahim 2010 sur la bonne gouvernance a aussi amené de bonnes nouvelles dans deux quatre groupes d’indicateurs : 40 des 53 pays africains ont apporté des améliorations au plan des opportunités économiques et du développement humain.
Comme l’ancien Secrétaire général des Nations Unies Koffi Annan le dit, « L’Afrique est un géant endormi sur le point d’être réveillé. » Nous pouvons réveiller le géant endormi, seulement si nous passons de schémas fondés sur l’aide et l’exportation de ressources naturelles à la construction de secteurs compétitives au niveau global, capables de fournir des emplois à notre population plus jeune. Cela exige un leadership et une action collective tous deux forts.
Ndaba Obadias est le directeur régional-Afrique du World Youth Alliance. Les opinions exprimées dans cet article n’engagent pas son organisation. Cet article a été publié en anglais originellement sur AfricanExecutive.com.
Auteur : Ndaba Obadias
Publié en collaboration avec UnMondeLibre.org
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