Par MIREILLE DUTEIL | Le point.fr
Quel duel cela va être ! Les Ivoiriens si crédules ne pouvaient même pas imaginer qu’ils assisteraient un jour à une course pratiquement au coude à coude entre Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara (38,3 % contre 32,08 %) pour le fauteuil présidentiel. Une course de trois semaines, le second tour de l’élection devant avoir lieu le 28 novembre si la constitution est respectée. Mais au-delà du duel entre deux rivaux de longue date, la victoire, quel que soit celui qui l’emporte, mettra fin à deux chapitres de l’histoire ivoirienne. Le premier, le plus sombre : c’est la page de dix ans de troubles et de guerre civile qui devrait se tourner définitivement. Second chapitre terminé : celui de la Côte d’Ivoire d’Houphouët-Boigny.
Henri Konan Bedié, dauphin et successeur constitutionnel d’Houphouët, a été battu dans les urnes. Certes, il conteste les résultats, mais si des « tripatouillages » ont eu lieu, pour reprendre ses termes, ils ne pouvaient guère changer l’issue du scrutin. HKB, comme l’appellent les Ivoiriens, n’a pas fait une bonne campagne. Candidat âgé, 76 ans, il est aussi vu comme en partie responsable des troubles qui ont ensanglanté le pays depuis la fin des années quatre-vingt-dix après qu’il a adopté le thème de l’ivoirité, un concept qui visait à écarter de la nationalité ivoirienne des citoyens suspectés d’être d’origine burkinabé. Son électorat a été majoritairement rural, des Baoulés (son ethnie) de la région cacaoyère, au centre du pays. Même les Baoulés citadins semblent l’avoir abandonné.
Pourtant ce sont les 25 % d’électeurs d’Henri Konan Bedié qui vont décider du choix du nouveau roi. En 2005, HKB et Alassane Ouattara, s’alliant contre Laurent Gbagbo, avaient passé un accord électoral de désistement en faveur de celui qui finirait second aux élections. Les électeurs baoulés vont-ils suivre leur chef ? Rien n’est moins sûr. Pour les bons connaisseurs du pays, un tiers des électeurs de Bedié se reporteront sur Ouattara, l’homme du Nord, musulman, vu encore par certains comme un « Burkinabé » ; deux tiers préféreront donner leur voix à Laurent Gbagbo. D’ailleurs, le président sortant a toujours affirmé qu’il aurait de meilleures chances de l’emporter s’il devait affronter Ouattara que Bedié.
Il reste encore trois semaines. C’est long dans un pays où chacun craint toujours que des dérapages ne viennent enrayer la machine électorale qui a, depuis une semaine, si bien fonctionné.
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