Le Colonel à la retraite, Oulatta Gaoudit, Directeur départemental D’Alassane Ouattara à Bangolo, a été mis aux arrêts par la Gendarmerie nationale. Après 24h de détention, il a été remis en liberté. En exclusivité, il s’est ouvert à votre quotidien préféré. Entretien.
Le Patriote : Mon Colonel, après votre arrestation, comment est-ce que vous vous portez ?
Cl Oulata Gaoudit : Je me porte bien, mais ce que je peux dire concernant mon état de santé, c’est que je souffre encore. J’ai des courbatures parce que j’ai été brutalisé par deux fois à Duékoué et à Daloa où j’ai été menotté. J’ai une blessure à l’orteil. Ils m’ont interpellé manu militari, avec une violence extrême. Et c’est cela justement qui me surprend. Pour ce que j’ai vu quand je suis venu à Abidjan, ce que j’ai entendu de la part de la gendarmerie, et du général Mangou, cela me surprend énormément. Parce que, sur la base de la rumeur et d’informations non vérifiables ont interpelle quelqu’un de la sorte. Il aurait fallu pour ma part, m’envoyer une convocation pour que je me présente à la gendarmerie pour qu’on procède à mon audition. Mais cela n’a pas été le cas. Et je trouve cela dommage.
LP : Qu’est-ce qu’on vous reproche exactement ?
AG : J’apprends que j’organise une action subversive à partir de l’ouest du pays. Je suis tantôt avec les trafiquants d’armes, tantôt je recrute des mercenaires libériens. Ce sont, à mon sens, des motifs sans fondement. Et c’est ce qui m’étonne. Je ne comprends pas que sur la base de rumeurs, on vienne m’arrêter. Ça ne fait pas sérieux.
LP : Le général Kassaraté dont les éléments vous ont arrêté vous a-t-il rencontré ?
OG : Oui ! le général Kassaraté m’a fait l’honneur de me recevoir (Ndlr, hier matin) lorsque j’étais incarcéré à Agban où j’ai passé la nuit (Ndlr, le lundi 01 novembre 2010). Le général Kassaraté et moi sommes des amis, nous nous connaissons depuis bien longtemps et je peux dire que sa présence m’a rassuré. Avec lui, je me suis senti un peu à l’aise malgré ce qui c’était passé la veille. Nous sommes allés dans son bureau où le service de renseignements de la gendarmerie est venu m’ entendre sur procès verbal.
LP : Et le général Mangou, chef d’Etat major, ne vous a-t-il pas rencontré ?
OG : Le soir (Ndlr, hier mardi 02 novembre 2010) après mon audition, quand j’ai fait ma déclaration. Par la suite, avec le général Kassaraté, nous nous sommes rendus à l’Etat major, c’est là-bas qu’il m’a reçu en présence des amiraux Vagba Faussignaux (Ndlr, commandant de la marine nationale) et un autre dont j’oublie le nom, mais qui est un de ses proches. Il y avait également à cette rencontre, les généraux Deto Letho Firmin et bien d’autres.
LP : Que vous a-t-il dit le général Mangou ?
OG : Le général Mangou comme il l’a indiqué à la télévision a dit qu’il me donnait des conseils. Mais moi, je ne me reconnaissais pas dans ces conseils puisque je n’ai pas de conseils à recevoir parce que je ne me reproche rien. Donc je ne sais pas quels conseils il pouvait bien me donner. Je suis très bien placé pour savoir que mon pays, la Côte d’ Ivoire n’a pas besoin d’une autre guerre, d’une activité subversive. On sort progressivement de la crise avec les élections démocratiques et je suis persuadé que mon candidat va l’emporter. Je suis directeur départemental de campagne du président Alassane Dramane Ouattara. Donc, je ne vois pas pourquoi j’organiserais une subversion quelconque, au profit de qui ? Et contre qui ? Tous les leaders importants sont candidats, la subversion n’a pas son sens. C’est pourquoi, je ne comprends pas l’attitude de l’armée, et puis cela me surprend et cela discrédite les forces de défense et de sécurité ce genre d’interpellation qui est fait sur la base d’éléments approximatifs qui n’existe même pas. Il aurait fallu des éléments matériels concordants, de vrais renseignements pour pouvoir interpeller quelqu’un avec une telle brutalité.
LP : Y a t-il eu confrontation ou bien ce sont juste des rumeurs avec ceux qui sont venus vous arrêter ?
OG : Non, moi je n’ai pas fait de confrontation. C’est plutôt eux qui à tout moment voulaient me prendre manu militari alors que je pouvais marcher pour aller à mon véhicule, mais ils ne voulaient pas. Lorsque nous étions à Duékoué, devant ma famille, les militaires m’ont rudoyé malgré l’opposition des membres de ma famille. Les membres de ma famille pensaient que j’avais affaire aux escadrons de la mort. Heureusement que Flany, la Directrice départementale de campagne de Duékoué est arrivée. Elle a été extraordinaire, elle a mobilisé les militants et militantes qui sont venus en grand nombre pour s’interposer, et c’est ce qui a fait que les militaires ne sont pas allés bien loin dans leur basse besogne. Et c’est ce qui a fait qu’ils se sont rétractés, parce que cela allait conduire à ma mort.
LP : Vous êtes-vous senti humilié ?
OG : Bien sûr que oui ! Parce que j’ai eu droit à un traitement dégradant et humiliant. Mais, je me dis que je suis en politique et que je comprends que parfois les choses se passent comme ça, parce que les gens qui le font sont à la solde de certains leaders politiques. C’est la politique, il faut l’accepter. Je prends ses coups parce que je me dis que mon souhait aujourd’hui, c’est que le candidat Alassane Ouattara soit le président de la République de Côte d’Ivoire pour que l’Etat de droit revienne, pour que la démocratie revienne, pour que l’Ivoirien soit à l’aise. Pour que son bien- être soit assuré et pour que ce genre de chose ne se répète pas.
LP : Il se raconte qu’on vous a mis des chaines aux pieds. Est-ce vrai ?
OG : J’ai été menotté. Six gendarmes m’ont soulevé, ils m’ont ligoté, ils m’ont jeté dans le véhicule. Je suis resté coincé dans le véhicule entre deux gendarmes en armes jusqu’ Abidjan. Je ne pouvais même pas bouger. Mais je peux dire que je suis déçu.
LP : En tant qu’officier que ressentez-vous ?
OG : Cette pratique me fait sourire. Et je me dis qu’il y a encore du travail à faire dans cette armée, tant dans son esprit que dans son organisation. Tout est à revoir. J’étais à la fois étonné et déçu de voir des soldats se comporter de la sorte et j’avais un petit sourire en coin. Je n’ai jamais vu cela.
Interview réalisée par Coulibaly Brahima
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