Chers frères et sœurs,
Depuis environ trois semaines, j’ai pris sur moi de rappeler à vos consciences la nécessité pour les ivoiriens d’aller aux élections dans un climat apaisé.
Je reviens pour cette dernière invitation avant la date du 31 octobre jours des élections, pour m’adresser à vous, avec les paroles de St Paul « Ayez beaucoup d’humilité, de douceur et de patience, supportez vous les uns les autres avec amour ; Ayez à cœur de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix »
Je sais que dans ces moments sensibles, il se trouve de plus en plus nombreux des gens, hommes et femmes et même des jeunes, qui ont pris conscience de la gravité de la situation et cherchent les voies et moyens pour jeter des passerelles afin que les uns et les autres se reconnaissent fils et filles du même pays, appelés à réaliser le bonheur de leurs concitoyens.
Ceux là ne font pas beaucoup de bruits, mais jour après jour, ils mènent leur combat pour que la sérénité prévale, pour que les mots blessants soient éliminés et que, petit à petit, triomphent les attitudes que commande la civilisation de la tendresse recherchée par tous aujourd’hui. Je prie Dieu pour que d’autres personnes encore plus nombreuses leurs emboitent le pas.
Mais à côté de ces rayons espoir, montent aussi les nuages préoccupants. Quelles images désolantes que les affiches déchirées barbouillées, parce que n’étant pas celui de notre candidat. Au fur et à mesure que s’approchent les échéances électorales, de part et d’autre, on ne se fait plus de concessions. La compétition suscite actuellement d’énormes passions. Il est bon de rappeler que l’exercice du pouvoir doit toujours s’envisager comme un service à la nation. A ce sujet, la conférence épiscopale de Côte d’Ivoire dans sa lettre pastorale intitulée le chrétien face à la politique nous vous dit ceci : « La politique ne doit pas perdre de vue sa dimensions communautaire de recherche du bien commun ou public. Le peuple doit être le premier servi et respecté. C’est en vue de son bien-être que l’on est élu et que l’on travaille dans le domaine politique ».Fin de citation. Dans cette lutte politique, deux dérapages sont à proscrire.
1. La nature même du système démocratique, implique que les décisions prises par la majorité soient respectées par la minorité. Lourde est en effet la responsabilité de celui qui sera à l’origine d’une éventuelle fracture sociale.
2. Les promesses fermes de paix doivent se substituer aux menaces d’affrontement.
Tous les citoyens, tous les partis politiques et tout le pays attendent de la CEI qu’elle organise des élections transparentes, cela est légitime et normale. Mais il est aussi légitime et normal qu’une fois cette condition remplie, tous fassent un effort pour admettre et respecter le verdict des urnes. On ne le répétera jamais assez, des quatorze candidats, c’est C’est un seul candidat qui remportera ces élections. Tous les candidats sont présidentiables mais un seul devra occuper le siège présidentiel. En même temps qu’on envisage sa victoire ce qui est normale parce qu’on ne va pas à une compétition pour perdre, il faut aussi se faire à l’idée qu’on pourrait perdre.
Chers candidats, je voudrais ici avec les mots de saint Paul dans sa lettre aux philippiens en son deuxième chapitre du verset trois à quatre, vous dire ceci : « Ayez un même amour, un même cœur ; recherchez l’unité ; ne faites rien par rivalité, rien par gloriole, mais avec humilité, considérez les autres comme supérieurs à vous. Ne recherchez pas chacun vos propres intérêts mais plutôt, que chacun songe à ceux des autres. »
Chers candidats je voudrais vous inviter fraternellement à respecter le verdict des urnes. Je comprends qu’une défaite soit difficilement acceptable, aussi convient-il que vous vous ouvriez à Dieu qui ne manquera pas de vous grandir si vous savez humblement vous soumettre aux résultats de la compétition électorale. Oui quels que soient ces résultats, vous devrez placer l’intérêt supérieur de la nation au dessus de toute autre considération. Vous ferez montre de grandeur d’âme pour ne pas considérer la victoire comme une occasion de domination et la défaite comme une déchéance humaine. Dans cette dynamique, le vainqueur devra tendre la main aux vaincus qui accepterons en toute humilité et honnêteté de collaborer à l’unique construction du pays dans une opposition responsable. Dans le même temps, s’il est vrai qu’après les élections les élus et leurs partis éprouveront une joie légitime, il faut éviter des manifestations de mépris et d’humiliation à l’endroit des adversaires malchanceux. Le même amour de la patrie habite aussi ces derniers. Eux aussi sont de dignes fils et filles du pays. Il n’ya pas de raison de céder à la tentation de les « écraser » !
La détente de l’atmosphère socio-politique n’a pas de prix dans une nation fragile comme la notre. Tout ce qui va dans le sens de cet apaisement des cœurs ne peut être qu’encourageant, stimulant.
Ne soutenez vous pas tous, que vous aimez la Côte d’Ivoire ? Alors abstenez vous poser des actes qui mettront à mal la cohésion sociale.
Je ne saurai terminer sans vous inviter les uns et les autres à plus de responsabilité. Que la main aimante de Dieu demeure posée sur la Côte d’Ivoire et sur chacun de vous Amen !
Jean Pierre KUTWA
Archevêque d’Abidjan
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