France24
Du coup d’État de Noël 1999 au long et douloureux processus de réconciliation, retour sur une décennie de crise politico-militaire qui a secoué un pays longtemps érigé en « locomotive économique » des anciennes colonies françaises d’Afrique.
* Aux racines de la crise
7 décembre 1993 – Le chef de l’État, Félix Houphouët-Boigny, premier président de la République de Côte d’Ivoire, décède des suites d’un cancer. Le « père de la nation » meurt sans avoir désigné de véritable successeur. Le président de l’Assemblée nationale, Henri Konan Bédié, assure de fait l’intérim.
8 décembre 1994 – Révision du Code électoral, qui restreint davantage les critères d’éligibilité. Dorénavant, tout candidat à la présidence doit prouver son ascendance et son identité ivoiriennes. Une mesure qui permet à Henri Konan Bédié d’évincer son principal rival, l’ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara, dont l’ »ivoirité » est contestée.
22 octobre 1995 – Opposé à un seul candidat, Henri Konan Bédié remporte l’élection présidentielle avec 96,44 % des voix. Les leaders des principaux partis d’opposition, Alassane Dramane Ouattara, du Rassemblement des républicains (RDR), et Laurent Gbagbo, du Front populaire ivoirien (FPI), ont boycotté le scrutin.
24 décembre 1999 – Henri Konan Bédié est renversé par un coup d’État militaire. Le général Robert Guéï prend la tête d’un Conseil national de salut public. La junte au pouvoir est chargée d’assurer la transition, avant la tenue d’une élection présidentielle.
6 octobre 2000 – La Cour suprême invalide les candidatures à la présidentielle d’Alassane Dramane Ouattara et d’Henri Konan Bédié. Le premier est exclu pour « nationalité douteuse », le second pour dossier incomplet.
22 octobre 2000 – Laurent Gbagbo remporte l’élection présidentielle face à Robert Guéï. Le chef de la junte conteste le résultat et s’autoproclame président de la République. Les partisans de Gbagbo se soulèvent.
La majorité de la population, la gendarmerie et une partie de l’armée rejoignent le mouvement de protestation. Les manifestations donnent lieu à des affrontements entre la population et la garde prétorienne du général Guéï, qui sera rapidement défaite.
26 octobre 2000 – La Commission électorale proclame officiellement la victoire de Laurent Gbagbo à la présidentielle.
* La Côte d’Ivoire coupée en deux
19 septembre 2002 – Profitant de l’absence de Laurent Gbagbo, alors en visite officielle en Italie, des hommes armés venus du nord mènent des attaques simultanées à Abidjan, la capitale économique du pays, à Bouaké (centre) et à Korhogo (nord). Le ministre de l’Intérieur, Émile Boga Doudou, et l’ancien chef de la junte, Robert Guéï, sont assassinés.
Les jours suivant, plusieurs opposants politiques – parmi lesquels des membres du RDR soupçonnés d’être à l’origine de la rébellion -, sont exécutés par l’armée loyaliste. Entre septembre et novembre 2002, 300 personnes sont assassinées.
22 septembre 2002 – La France intervient militairement pour protéger les ressortissants étrangers. Quelque 3 000 Occidentaux sont évacués. C’est le début de l’opération Licorne.
28 septembre 2002 – Au nom des accords de défense qui lient Abidjan et Paris depuis 1961, le gouvernement ivoirien sollicite l’aide de l’armée française. Considérant qu’il s’agit d’une affaire « ivoiro-ivoirienne », la France refuse. Tout juste concède-t-elle à délimiter une « zone de confiance » coupant le pays en deux. Les insurgés prennent position dans le nord. Le sud du pays reste sous le contrôle du gouvernement ivoirien.
29 septembre 2002 – La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) crée un « groupe de contact » et envoie une force de paix dans le pays.
17 octobre 2002 – Signature d’un cessez-le-feu entre les rebelles, représentés par leur chef politique Guillaume Soro, et le « groupe de contact » de la Cedeao.
* L’intenable processus de Marcoussis
26 janvier 2003 – Sous l’égide de la France, les différents partis politiques ivoiriens et les factions rebelles, réunis à Linas-Marcoussis (région parisienne), se mettent d’accord sur un plan de sortie de crise. Selon les termes de l’accord, Laurent Gbagbo, maintenu au pouvoir, s’engage à former un gouvernement de « réconciliation nationale » regroupant l’ensemble des partis ainsi que des rebelles du nord.
4 février 2003 – Premières manifestations anti-françaises. Les militants pro-Gbagbo accusent Paris d’avoir poussé le président ivoirien à signer les accords de Marcoussis.
17 avril 2003 – Le gouvernement de « réconciliation nationale » se réunit pour la première fois.
4 juillet 2003 – La fin de la guerre civile est officiellement déclarée
21 octobre 2003 – Le correspondant de Radio France internationale (RFI) à Abidjan, Jean Hélène, est tué d’une balle tirée à bout pourtant par un gendarme ivoirien.
27 février 2004 – L’ONU met sur pied l’Opération des Nations unis en Côte d’Ivoire (Onuci), chargée de veiller au respect du cessez-le-feu.
25 mars 2004 – Les forces gouvernementales, la gendarmerie et la milice pro-gouvernementale des Jeunes patriotes répriment dans le sang une marche pacifique organisée pour protester contre les blocages du processus de Marcoussis. L’ONU fait état d’au moins 120 morts et 20 disparus.
30 juillet 2004 – Réunis à Accra, au Ghana, le président Gbagbo et les différents partis ivoiriens signent les accords d’Accra III qui fixent un calendrier de désarmement des milices et des rebelles.
15 octobre 2004 – Les rebelles, réunis au sein des Forces nouvelles (FN), refusent de déposer les armes, comme le prévoient les accords d’Accra III.
4 novembre 2004 – Les forces gouvernementales lancent l’opération « Dignité ». Deux avions de combat Sukhoï-25 bombardent Bouaké, « capitale » de la rébellion. L’Onuci et les troupes françaises de l’opération Licorne restent neutres. En visite au Togo, Guillaume Soro, chef des FN, déclarent les accords de Kléber et d’Accra III « caducs ».
Commentaires Facebook