Le Challenger du Mali
L’Afrique m’apparaît de plus en plus comme un grand corps malade couvert de métastases. Ces foyers cancéreux qui, à tout moment, peuvent déclencher des fièvres mortelles, se propagent chaque jour davantage et deviennent de plus en plus inquiétants. Comble de paradoxe, parmi les tissus les plus atteints, nombreux sont les cinquantenaires. Comme si l’âge ne suffisait pas pour mûrir et inspirer confiance.
Guinée-Conakry. Après la mort de Lansana Conté et les grands shows hyper-médiatisés d’un certain Daddis, on avait commencé à nourrir de l’espoir pour ce pays si riche de ses hommes, de sa culture et de son sous – sol. Le premier tour de l’élection présidentielle, malgré quelques couacs, avait suffi pour faire jubiler tous ceux qui rêvent de voir la Guinée – Conakry enfin sortir de l’obscurité politique, économique et sociale. Ceux qui, comme moi, avaient des réserves et faisaient allusion à quelque piège qui bloquerait le processus électoral ou à quelque grain de sable qui gripperait la machine de la transition, étaient perçus par les enthousiastes comme des trouble-fêtes ou des oiseaux de mauvais augure. Et pourtant, la triste réalité aujourd’hui s’impose à nous : après deux reports pour la tenue du deuxième tour, la date du 24 octobre est de plus en plus incertaine, à cause du tango honteux que dansent les politiciens guinéens qui semblent bien se plaire dans leurs enfantillages ridicules ! Donnant ainsi raison, à Moussa Daddis Camara qui n’avait aucune considération pour eux, les invectivait comme ses gosses et les affublait de tous les noms d’oiseaux. L’actuelle comédie autour de la Commission nationale électorale dont l’indépendance reste à vérifier, donne la dimension de l’hypocrisie et de la méchanceté qui animent les acteurs de la scène politique guinéenne. Ainsi, avec ce spectacle pitoyable que Cellou Dalein Diallo, Alpha Condé et les membres de la CENI nous offrent, qui s’étonnera que l’armée en profite pour reprendre le pouvoir ? Et si les partisans de Daddis, qui doit être en train de rire sous cape, sortaient de l’ombre pour » remettre la pendule à l’heure » ? Mais, pour le moment, nous n’en sommes pas là. Dieu est capable de tous les miracles et il pourra en faire pour la Guinée afin que le deuxième tour ait effectivement lieu le 24. Dans le calme et la paix et sans contestation des résultats.
Niger. Au Niger, nous avons applaudi l’arrivée de la bande à Djibo ! Nous avons applaudi leurs premiers discours. Nous avons applaudi le calendrier de leur processus de démocratisation du pouvoir à travers des élections libres et transparentes auxquelles eux-mêmes, les redresseurs des torts, ne prendraient pas part. En tout cas, beaucoup d’Africains, comme moi, ont eu beaucoup d’estime pour ces militaires qui, visiblement, avaient des ambitions aux antipodes de celles de Daddis. Hélas ! Mille fois hélas !! La peur qui s’était envolée très loin du ciel nigérien est en train de revenir avec son lot d’angoisse et de stress au sein des populations. L’arrestation du N° 2 de la junte n’assombrit-elle pas un ciel jusque-là serein ? Que réserver demain aux Nigériens si l’équipe même qui a sauvé le pays de l’autocratie cède au démon de la division ? Le syndrome Daddis serait-il en train de naître quelque part dans le sérail des héros du 18 février ? Il faut prier que le doux rêve ne tourne pas au cauchemar.
Nigeria. Le géant de l’Afrique occidentale est en pleine tourmente. Au-delà des attentats » terroristes » du 1er octobre, jour même de la célébration de ses cinquante ans d’indépendance, un véritable malaise règne au pays du naira. Aux machinations en vue des prochaines présidentielles pour lesquelles le Nord se dresse contre le Sud avec, dans chaque pôle, des dissensions internes, un esprit de mafia sévit dans le plus grand Etat fédéré d’Afrique qui vit au rythme d’enlèvements, d’agressions physiques, d’assassinats à caractère politique, religieux ou tout simplement crapuleux. Pourvu que la grande campagne » anti-kidnapping » qui vient d’être lancée par le gouvernement fédéral puisse ramener la sérénité au sein des populations et dans le milieu des investisseurs.
Côte d’Ivoire. » OUF ! » se sont exclamés de nombreux Ivoiriens et observateurs de la scène politique éburnéenne. Après plusieurs reports, on a eu enfin une date consensuelle des élections et on vient, enfin, d’entrer dans le vif du sujet à travers la campagne présidentielle qui bat son plein dans les quatre coins du pays. Ça y est donc, cette fois-ci, les élections auront bel et bien lieu le 31 octobre prochain.
Cependant, je ne crois pas beaucoup à la liberté des populations de choisir le candidat qu’elles préfèrent. Car une angoisse persiste quant à la personnalité qui prendrait les rennes du pouvoir. Pour que la paix soit durable, n’importe qui ne doit pas être élu président. Beaucoup pensent comme moi que même s’il existait un candidat qui soit le plus valeureux et le plus populaire, son élection entraînerait la Côte d’Ivoire dans une spirale de violences qui pourrait précipiter le pays dans l’enfer. Il faut donc à la Côte d’Ivoire un président par défaut : Laurent Gbagbo. Tout autre choix serait dangereux pour la paix. Car alors, les escadrons de la mort ressusciteront, les » patriotes » reprendront la rue et les milices ethniques foisonneront partout dans le pays. Gbagbo ne dit-il pas à qui veut l’entendre qu’il n’a pas eu le temps de gouverner en dix ans à cause des complots des « ennemis de la Côte d’Ivoire » ? Ne martèle-t-il pas partout, et avec lui ses soldats conduits par un certain « Général » Blé Goudé, qu’il ne perdra pas ces élections ? La joie de savoir que les élections se tiendront est donc teintée par des doutes, des incertitudes, des angoisses, au point que beaucoup prient Dieu pour que Laurent Gbagbo soit maintenu, non pas parce qu’il est le meilleur, mais pour éviter que ses milices incontrôlées ne sèment le désordre et ne rendent le pays ingouvernable.
Le Burundi, la République démocratique du Congo, Madagascar… Voilà d’autres poudrières potentielles qui font peur et qui font douter de la maturité des hommes politiques du continent. Serions-nous si maudits par Dieu au point de toujours tourner le dos à tout ce qui peut nous sauver de la souffrance et de la douleur ? Il faut y réfléchir. Bien à vous.
Minga Siddick
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