Intégration sous-régionale – Woi Messé, vice-président de l’Assemblée nationale « Notre survie dépend de notre capacité à nous rassembler »:‘’Il n’y a pas de débat sur le transfert du Parlement de la CEDEAO à Yamoussoukro’’

Le député Woi Messé, vice-président de l’Assemblée nationale, a représenté du 02 au 05 octobre dernier, le président Mamadou Koulibaly, chef de la délégation du Parlement ivoirien au colloque sur le cinquantenaire des Etats africains à Abuja, qui a regagné Abidjan dès l’ouverture de la cérémonie. Au terme de ce colloque, M. Woi Messé s’est prêté à nos questions sur la rencontre. Entretien

Monsieur le président, vous avez représenté le Parlement ivoirien au colloque international sur le cinquantenaire des Etats africains à Abuja. Qu’avez-vous retenu au terme de cette activité ?

Effectivement, mon collègue Séri Djéhoua Victor et moi avons été mandatés par le président Mamadou Koulibaly et l’Assemblée pour représenter notre Parlement à ce colloque portant notamment sur les 50 ans d’indépendances de nos Etats. Pour nous, députés ivoiriens, c’est la toute première fois que nous assistons à une activité du Parlement de la CEDEAO. Le président Mamadou Koulibaly a pris part lui-même à l’ouverture de ces activités. Il a déclaré officiellement le retour prochain du Parlement ivoirien au sein du Parlement de la CEDEAO. Il a été vivement applaudi. Il faut dire que le Parlement de la CEDEAO est un Parlement de notre communauté ouest-africaine dans lequel nous devons tous être. En ce qui concerne le colloque, il a fait le point du parcours de nos Etats respectifs et surtout envisagé des perspectives importantes qui devront permettre à notre sous-région et à l’Afrique en général d’amorcer véritablement son développement. On a passé en revue les problèmes d’insécurité, de paix et tous les autres sujets majeurs liés au développement, à la démocratie dans nos différents pays. Nous avons beaucoup appris en partant d’ici et nous irons rendre compte à nos collègues à Abidjan par le rapport que nous ferons.

Comment avez-vous apprécié le ton des débats à votre première assise au sein du Parlement régionale ?

Le débat a été enrichissant. La seule chose que j’ai relevée, c’est qu’il n’y a pas eu beaucoup de temps d’échange. Le programme était très chargé. Cela n’a pas permis aux participants d’exprimer tout ce qu’ils voulaient. Mais, ça aussi, c’est comme cela dans tous les colloques internationaux. Quant à notre participation à nous aux débats, nous venons d’arriver, et quand on est nouveau, on observe d’abord avant de se jeter à l’eau. Mais, nous avons apprécié que les uns et les autres ont évoqué des problèmes importants avec le souci de chacun de faire en sorte que dans la sous-région, le Parlement assume totalement ses responsabilités, notamment par la régulation du fonctionnement des institutions de la communauté, la promotion de la démocratie, etc. Les parlementaires ont demandé à ce que les textes pris par nos chefs d’Etat soient vraiment appliqués. Parce que un de nos gros problèmes, dans toutes nos institutions, c’est qu’on prend des textes, on ratifie des traités qui ne sont malheureusement pas appliqués. Ça n’honore pas nos institutions.

Justement, le colloque a décidé du renforcement des pouvoirs du Parlement avec la possibilité non seulement de légifération, mais aussi de contrôle des pouvoirs exécutifs. Pensez-vous que cela soit possible avec la sauvegarde des intérêts nationaux qu’on note à l’intérieur des Etats ?

Ecoutez, il faut que nous arrivions à nous affranchir de tout cela. A travers le monde, avec les différents blocs qui se forment de partout, l’Afrique a intérêt à s’organiser. Au début de nos indépendances, chacun a essayé de s’en sortir individuellement entre les deux blocs qui existaient en Occident. Aujourd’hui, tout cela est fini avec la disparition du bloc de l’Est. Nous sommes en face d’un seul bloc, et il faut dire que les gens ont d’autres chats à fouetter que de continuer à s’occuper de nous. Donc, nous-mêmes devons nous prendre en compte à partir de maintenant. Notre survie dépend de notre capacité à nous rassembler pour constituer une force vis-à-vis de toutes les organisations qui sont en train de se former de partout dans le monde.

On a noté dans débats, la défense de certains intérêts nationaux au détriment de l’esprit de groupe. Croyez-vous vraiment à l’intégration avec ce Parlement ?

Effectivement, il y a encore des relents d’un renferment sur soi. Mais, je suis persuadé qu’avec le temps et la réalité du monde devenu un village planétaire, ça va évoluer. On ne peut pas rester ainsi. En tout cas, nous, au niveau du Parlement ivoirien, c’est la tendance qui se dégage de plus en plus. C’est vrai que nous n’étions pas dans ce Parlement régional, mais c’était lié à d’autres facteurs qui n’ont rien à voir avec la volonté d’y siéger. Je crois que le président Koulibaly a décanté la situation et la voie est ouverte pleinement pour que nous jouions notre rôle au sein de ce Parlement et que nous apportions notre modeste contribution au développement de cette institution, qui nous parait indispensable au développement de notre pays.

A propos, le président Koulibaly a posé la question de la délocalisation du siège du Parlement à Yamoussoukro. Par la suite, on a suivi le débat quelque peu malsain qui a entouré la question. Qu’en dites-vous ?

Pour moi, il ne devait même pas y avoir de débat sur la question. Réuni en juin 2006, le Conseil des ministres de la CEDEAO a décidé que le siège doit être transféré en Côte d’Ivoire, à Yamoussoukro. Il semble que cette proposition a été faite aux chefs de l’Etat, qui l’ont entérinée. Mais, il ne reste plus que le document qui formalise le projet, qui n’a pas été signé. Sinon, il semble qu’au niveau des chefs d’Etat, il n’y ait pas eu d’opposition. Donc, nous on considère que le Parlement de la CEDEAO doit être transféré ici en Côte d’Ivoire et peut-être que la seule chose qui fait trainer cette délocalisation, ce sont nos élections qui ont lieu dans quelques jours. Une fois que ces élections sont faites, il ne devrait plus y avoir de problème. Le Parlement doit revenir à la Côte d’Ivoire. Pour nous députés ivoiriens, c’est un débat sur lequel il n’est plus question d’engager quelque discussion que ce soit.

La décision a été prise depuis 4 ans et jusque-là, plus rien. C’est quand même assez beaucoup ?

Non, il y a des questions de procédure administratives qui peuvent faire trainer les choses dans les questions de coopération internationale.

Dans les coulisses du colloque, des confidences font état de la tentative du Nigeria de maintenir le Parlement sur son sol. En avez-vous eu vent ?

Oh non ! Il ne faut même pas écouter cela. Nous sommes en politique et il y a tellement de rumeurs qui courent. Jusque-là, le Nigeria n’a pas déclaré officiellement qu’il s’opposait au transfert du Parlement en Côte d’Ivoire. C’est un pays ami avec lequel nous entretenons de très bonnes relations et je pense que ce n’est pas le Nigeria qui s’opposera à quoi que ce soit en ce qui concerne la Côte d’Ivoire.

On a vu l’empressement de certains députés de la CEDEAO pour la délocalisation. En partant d’ici, que comptez-vous préconiser pour que ce transfert devienne réalité le plus rapidement possible ?

Ici même à la tribune d’Abuja, le président Koulibaly a rassuré que les bâtiments sont déjà prêts. Lui qui est la 2ème personnalité de la Côte d’Ivoire, il ne dit pas cela au hasard. S’il le dit, c’est que les dispositions sont prises ou sont en train d’être prises pour qu’il y ait l’effectivité de la mise en œuvre du transfert. Nous sommes prêts pour accueillir le Parlement. Ce ne sont pas les bâtiments qui manquent en Côte d’Ivoire. Que ce soit à Abidjan comme à Yamoussoukro. Ne serait-ce qu’avec toutes les réalisations que le président de la République est en train de faire à Yamoussoukro. Donc, ce dossier-là ne devra souffrir d’aucune réserve. En plus, le président vient d’annoncer l’arrivée du Parlement ivoirien dans l’institution. Nous qui sommes venus ici à Abuja, nous sommes les premiers éléments indicateurs. Nous sommes venus en éclaireurs pour indiquer que la Côte d’Ivoire revient prendre sa place. Donc, il n’y a plus de raison que le transfert ne soit pas effectif.

Donc, en tant que parlementaire, vous repartez convaincu que la Côte d’Ivoire doit siéger dans ce Parlement ?

La Côte d’Ivoire a un rôle prépondérant à jouer au sein de ce Parlement. Nous sommes, dans la sous-région, un pays qui compte. Nous venons après le Nigeria, au niveau économique. A partir de cet instant-là, nous avons un rôle à jouer. Et ce rôle, nous allons venir le jouer. Vous savez, la politique de la chaise vide n’a jamais payé. Nous n’entendons pas continuer la politique de la chaise vide. Si jusque-là nous n’étions pas venus, c’est parce qu’il y a avait quelques problèmes de forme et de procédure à aplanir. Donc, la Côte d’Ivoire doit être là, pour traduire dans les actes son engagement pour l’intégration africaine. Nous qui avons même eu un ministre en charge de cette question. Nous avons intérêt à être ensemble. C’est pourquoi nous devons encourager le renforcement de nos institutions régionales.

Entretien réalisé par F.D.BONY
L’Inter

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