Carte d’identité: la solution miracle à la crise identitaire ivoirienne ?

Relwendé Auguste SAWADOGO – Le Pays

La Côte d’Ivoire marche résolument vers l’élection présidentielle du 31 octobre 2010. Cela est observable à l’évolution des préparatifs du scrutin. L’enthousiasme suscité par l’arrivée des cartes d’identité ivoirienne et des cartes d’électeurs le 1er octobre participe de cette dynamique. Au-delà d’être un outil pour voter, la carte d’identité est surtout perçue par les autorités ivoiriennes, notamment le Premier ministre Guillaume Soro, comme un élément devant mettre fin à la stigmatisation d’une partie de la population ivoirienne. On se souvient en effet que le problème de la nationalité a été l’élément déclencheur de la crise ivoirienne.

En activant le levier de l’ivoirité, les héritiers d’Houphouët Boigny n’ont pas su conserver l’unité du pays. Ils ont ouvert la boîte de Pandore et le diable de la xénophobie en est sorti. S’en est suivie la longue traversée du désert que le pays a connue. Mais les Ivoiriens semblent à présent résolus à laisser toutes ces divisions derrière eux. Le processus de sortie de crise a connu ces temps-ci des avancées significatives et c’est tout à l’honneur de la classe politique ivoirienne dans son ensemble. La question de l’identification, un des nœuds gordiens de la lenteur du processus électoral, a connu un dénouement heureux. En atteste l’établissement des cartes d’identité qui prouve que beaucoup d’obstacles ont été levés.

L’établissement des cartes d’identité nationale est important à un double point de vue : il permet la poursuite du processus électoral et consacre aussi et surtout la fin d’une discrimination à l’égard de certains Ivoiriens, notamment ceux du Nord. Mais cette carte est-elle la solution miracle à la crise identitaire dans ce pays ? Suffit-elle, à elle seule, à consacrer une vraie unité de la nation ivoirienne ? Il faudra sans doute beaucoup de volonté et de bonne foi pour que les jalons posés tiennent fermement. Au-delà de ce simple papier, il est nécessaire que les Ivoiriens s’acceptent sincèrement. Il faut que les mentalités changent. Les patronymes, la région d’origine et la religion ne doivent plus être des signes distinctifs mais d’enrichissement. Car, s’il est normal que chaque Etat surveille la dévolution de sa nationalité, il est par contre contreproductif de dépasser les bornes en cherchant à débusquer forcément des « usurpateurs » de nationalité. Dans une telle entreprise, l’on en vient à se regarder comme des gens d’une autre planète. Or, l’union dans la diversité est une grande force. Houphouët Boigny l’avait prouvé en son temps.

De toute façon, la crise qui a secoué la Côte d’Ivoire doit lui servir de leçon. A l’heure de l’intégration des peuples, il est ridicule de dénier la nationalité à des populations et cela sans fondement valable. L’effort qui a abouti à la suppression de la carte de séjour était déjà une preuve de la volonté d’éviter désormais la stigmatisation des populations étrangères dans ce pays. La mise à disposition de tous ceux dont la nationalité ivoirienne est prouvée, d’une carte d’identité nationale, est un autre pas dans le sens du refus de la division inutile. Le président qui sortira des urnes au soir du 31 octobre 2010 a le devoir de poursuivre cet élan. Il devra faire sien cet esprit du père de la nation qui avait su fédérer toutes les énergies pour bâtir une Côte d’Ivoire prospère. Ainsi, il devra favoriser et soutenir l’opération d’établissement de cartes d’identité ivoirienne dans les années à venir pour tous les Ivoiriens sans exclusive. Mais il devra surtout avoir à cœur de poursuivre la campagne de sensibilisation pour qu’au-delà du simple document qui constate la nationalité de ses détenteurs, cette nationalité des uns et des autres soit acceptée dans tous les cœurs et les esprits des Ivoiriens. Cette unité retrouvée de ses fils, l’éléphant d’Afrique en a besoin pour se remettre sur ses quatre pattes et barrir à nouveau dans le concert des nations.

Relwendé Auguste SAWADOGO
Le Pays

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