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Michel Kazatchkine, Jean-François Mattei, Marc Gentilini, Xavier Emmanuelli, Willy Rozenbaum, Awa-Marie Coll-Seck, Ogobara Doumbo, Denis Mukwege…
Dix ans après leur lancement, cinq ans avant leur échéance, les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) feront l’objet d’une évaluation exhaustive par l’Assemblée générale des Nations unies réunie à New York à partir du 20 septembre 2010. Ces OMD visent à réduire la pauvreté dans le monde, promouvoir l’éducation, favoriser l’égalité des sexes, réduire les mortalités maternelle et infantile, combattre le VIH/SIDA et les autres maladies. Les objectifs relatifs à la santé accusent un retard considérable, notamment ceux qui concernent la santé maternelle et infantile.
L’Afrique subsaharienne affiche des taux de mortalité maternelle scandaleux, avec près de 1 décès pour 100 grossesses, cent fois plus élevé que dans les pays riches. L’absence de soins représente la première cause du décès en couches ou dans les jours qui suivent l’accouchement.
C’est pourquoi en tant que médecins, pour la plupart impliqués dans des programmes de santé à international, nous lançons un appel d’urgence à tous les décideurs et financeurs : cessons de considérer les ressources humaines en santé comme un simple fardeau pour les dépenses publiques. La santé est avant tout un droit humain fondamental et tout investissement aujourd’hui est profitable pour l’avenir. La santé reste l’un des principaux piliers du développement humain.
Pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il manque aujourd’hui en Afrique subsaharienne un million de médecins, sages-femmes et infirmiers exerçant auprès des populations les plus défavorisées.
Paradoxalement, dans de nombreuses capitales africaines, de jeunes professionnels de santé qualifiés restent des années sans affectation, conséquence des politiques de restriction budgétaire mises en place dans les années 1980 pour geler les recrutements des personnels de santé dans la fonction publique.
Nous pensons qu’il est possible, par une délégation des tâches bien préparée et accompagnée, de mieux répartir la charge de travail entre médecins et paramédicaux, par exemple en facilitant la prescription, directement par les sages-femmes, du traitement antirétroviral pour les femmes enceintes vivant avec le VIH. Mais dans les zones rurales les plus isolées, les premières affectées par la pénurie de personnel médical, on observe plutôt un « glissement » des tâches qui met en danger la sécurité des patients : dans de nombreuses structures de santé, en l’absence de médecins en poste, les soins médicaux sont confiés à des infirmiers, et les soins infirmiers à des aides-soignants insuffisamment encadrés.
Les conditions de travail des personnels de santé sont très précaires et leurs salaires demeurent dérisoires dans le secteur public. Une rémunération mensuelle d’à peine 200 euros pour un jeune médecin du Sahel ne peut refreiner légitimement sa tentation de se diriger vers la pratique privée ou vers un emploi sous-qualifié à l’étranger. De telles conditions expliquent que la désertification médicale ne cesse de progresser dans les pays les plus pauvres.
UN CODE ETHIQUE INTERNATIONAL
La réponse internationale, aujourd’hui, se focalise sur la formation de plus d’agents de santé dans le Sud et sur les moyens de limiter les migrations des personnels soignants au Nord. L’OMS a adopté en mai dernier un code éthique international de recrutement des professionnels de santé. Ces actions indispensables restent insuffisantes. Des mesures de fidélisation du personnel médical et paramédical dans les pays en développement sont nécessaires et doivent inclure : une augmentation des titularisations dans le secteur public, une amélioration décente des salaires des personnels de santé du secteur public, des processus de partenariat et d’accompagnement permettant l’installation pérenne de médecins en première ligne, des incitations financières spécifiques à exercer en zone isolée, une formation continue de qualité sur le lieu d’exercice, une valorisation des carrières des professionnels de santé, un équipement des centres de santé adapté.
Professionnels de santé, nous appelons à la mobilisation de tous – des bailleurs internationaux comme des gouvernements des pays du Sud et du Nord : investir dans les personnels de santé est une urgence de santé publique et doit constituer une des priorités de l’aide internationale en santé.
Philippe Augoyard, président d’Aide médicale internationale ; Etienne-Emile Baulieu, président du Conseil scientifique d’Equilibre et populations, professeur honoraire au Collège de France ; Olivier Bernard, président de Médecins du monde ; Awa-Marie Coll-Seck, directrice Executive du Partenariat mondial contre le paludisme, ancien ministre (Sénégal) ; Bintou Dembele, directrice d’ARCAD-Sida (Mali) ; Dapa A. Diallo, directeur général du Centre de recherche et de lutte contre la drépanocytose (Mali) ; Ogobara Doumbo, directeur du centre de recherche et de formation sur le paludisme (Mali) ; Youssoufou Joseph Drabo, président des Réseaux africains de formations (Burkina Faso) ; Xavier Emmanuelli, président fondateur du Samusocial international, ancien secrétaire d’Etat ; Guy Farnarier, président de Santé sud ; Carine Favier, présidente du Mouvement français pour le planning familial ; Antoine Flahault, professeur de santé publique ; Marc Gentilini, président honoraire de l’Académie de médecine ; Jean-François Girard, conseiller d’Etat, président de Sorbonne paris cité ; Pierre-Marie Girard, directeur de l’Institut de médecine et d’épidémiologie appliquée (IMEA) ; Lamine Gueye, doyen de la faculté de médecine de Dakar (Sénégal) ; Daniel Henrys, ancien ministre de la santé (Haïti) ; Hakima Himmich, présidente de l’Association de lutte contre le sida (ALCS) (Maroc) ; Christine Katlama, présidente de Solthis ; Michel Kazatchkine, directeur du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme ; Dominique Kerouedan, expert indépendant en santé internationale, maître de conférences à Sciences Po ; Charles Kouanfack, chef de service de l’hôpital de jour à l’hôpital central de Yaoundé (Cameroun) ; Jean-François Mattei, président de la Croix rouge française, ancien ministre ; Denis Mukwege, directeur de l’hôpital de Panzi de Bukavu (RDC) ; Thérèse N’Dri Yoman, doyen honoraire de l’UFR des sciences médicales d’Abidjan, présidente d’Aconda-VS-CI (Côte d’Ivoire) ; Karamoko Nimaga, président de l’Association des médecins de campagne (AMC) (Mali) ; Maminirina Jean-Michel Rabenoavy, président de l’Association des médecins de campagne (AMC-Mad) (Madagascar) ; Willy Rozenbaum, président du Conseil national du sida ; Roger Salamon, directeur honoraire de l’Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement (ISPED).
Michel Kazatchkine, Jean-François Mattei, Marc Gentilini, Xavier Emmanuelli, Willy Rozenbaum, Awa-Marie Coll-Seck, Ogobara Doumbo, Denis Mukwege…
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