Chronique des Matières Premières
Par Claire Fages RFI
Les cours du cacao redescendent de leurs sommets, ils ont perdu 25 % en un peu plus d’un mois et la baisse se poursuit à mesure que se multiplient les prévisions de récolte abondante en Côte d’Ivoire, le premier producteur mondial. Pourtant négociants et industriels restent prudents sur le long terme.
Après quatre années de déficit, la production ivoirienne de cacao devrait pour la première fois connaître un surplus. D’après les compteurs de cabosse et les stations météo qui mesurent l’humidité des sols, la récolte principale, qui sera officiellement lancée dans quelques jours, devrait dépasser le million de tonnes, contre seulement 850 000 tonnes l’an dernier.
Les bonnes prévisions se succèdent et elles ont fait redescendre les cours après une folle envolée largement nourrie par la spéculation. Au printemps dernier, un gros négociant coutumier de ces pratiques avait asséché le marché en achetant 240 000 tonnes de cacao, ce qui avait fait grimper les cours à leur plus haut depuis 33 ans : 2 500 livres la tonne à Londres.
A 1 880 livres aujourd’hui, « e cacao revient à des niveaux élevés, mais raisonnables, sa véritable valeur », estime un négociant. Pour autant, les acheteurs ne se pressent pas, puisque les cacaoyers regorgent de cabosses et ils dédaignent les premières fèves qui descendent dans les ports ivoiriens : trop petites pour l’instant, ou trop chargées de moisissure. Quant aux chocolatiers, ils ont interrompu leurs achats en juillet et en août, dans l’attente de la nouvelle récolte, en espérant une baisse des prix.
Mais à force de s’approvisionner au compte-goutte, les industriels du chocolat ont laissé fondre leurs réserves, ils n’ont plus que trois mois d’avance, contre six d’habitude. L’offre reste tendue et l’on ne pourra juger de l’ampleur réelle de la récolte que lorsqu’elle sera dans les sacs ! C’est pourquoi, aux yeux de beaucoup de négociants, la baisse actuelle des cours du cacao n’est qu’une correction, pas l’annonce d’une baisse prolongée. Le patron de Barry Callebaut, numéro un mondial du chocolat, voit même les cours rester « hauts et volatils », il multiplie les acquisitions et les aides aux producteurs locaux pour sécuriser ses approvisionnements.
« Finalement, en Côte d’ivoire, on ne fait que rattraper la mauvaise récolte de l’an dernier », souligne un négociant. Les pluies favorables de cette année ne peuvent faire oublier les problèmes de fond, comme le renouvellement insuffisant des vergers. Sans compter que la campagne électorale pourrait perturber celle du cacao et affoler à nouveau les marchés…
En attendant, la baisse de 25 % des cours est un mauvais coup pour les petits intermédiaires, qui avaient acheté à l’avance leur récolte aux producteurs, à des tarifs élevés. « Comment vont-ils honorer leurs contrats ? », se demande un négociant. « Il risque d’y avoir de gros, gros problèmes en ce début de campagne !»
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