Afghanistan: La Chine rejoint les Etats-Unis d’Amérique « il appartient aux Afghans de décider de leur destin » (Lijian Zhao)

Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Lijian Zhao a réagi à la prise de pouvoir par des Talibans en Afghanistan.

Réagissant pour la première fois à la prise de pouvoir par les Talibans, Lijian Zhao a indiqué en s’adressant aux Américains et par ricochet aux Européens que «Longtemps juge moral mondial, les occidentaux doivent savoir qu’ils ne sont pas les maîtres de tout. Le peuple #afghan a le droit de décider de son propre avenir ».

Alors que les pays européens n’arrêtent pas de se lamenter de la décision du président américain Biden de retirer ses troupes d’Afghanistan, ce dernier leur a rétorqué hier qu’il appartenait désormais aux Afghans de décider de leur propre avenir, une fois la menace Al Qaida passée. Selon Biden, l’intention des USA n’a jamais été d’imposer un pouvoir «démocrate» aux Afghans ».

L’ancien vice-président de Barack Obama a insisté sur le fait que l’intervention militaire américaine à la suite des attentats du 11 septembre 2011, avait pour but de tuer les foyers terroristes d’Al Qaida. Ce travail étant fait, Jo Biden ne voit plus de raison de prolonger la présence militaire américaine à des milliers de kilomètres des États-Unis.

Sylvie Kouamé

En Afghanistan, les talibans cherchent à rassurer, la vie reprend à Kaboul malgré la peur

En promettant une « amnistie générale », les talibans multiplient les gestes d’apaisement à l’égard de la population. Mais beaucoup redoutent que les insurgés n’imposent la même version ultrarigoriste de la loi islamique.

Le Monde avec AFP, AP et Reuters

Les talibans ont annoncé, mardi 17 août, une « amnistie générale » pour tous les fonctionnaires d’Etat, les appelant à reprendre le travail, deux jours après s’être emparés du pouvoir en Afghanistan, grâce à une offensive éclair. « Une amnistie générale a été déclarée pour tous (…), donc vous devriez reprendre vos habitudes de vie en pleine confiance », ont déclaré les talibans dans un communiqué.

Depuis qu’ils sont entrés dans Kaboul, la capitale, dimanche, après une fulgurante offensive, qui en à peine dix jours leur a permis de prendre le contrôle de presque tout le pays, les talibans ont multiplié les gestes d’apaisement vis-à-vis de la population.

Les talibans respecteront les droits des femmes dans le cadre de la loi islamique, a déclaré mardi leur principal porte-parole, Zabihullah Mujahid lors de la première conférence de presse des insurgés depuis leur entrée dimanche dans la capitale.

Le port de la burqa, un voile intégral, ne sera pas obligatoire pour les femmes car « ’il existe différents types de voile », a précisé mardi Suhail Shaheen, porte-parole du bureau politique du groupe à Doha, à la chaîne britannique Sky News.

« L’Etat islamique d’Afghanistan est prêt à donner aux femmes un environnement pour travailler et étudier, et [à autoriser] la présence de femmes dans différentes structures [du gouvernement], en accord avec la loi islamique et nos valeurs culturelles », a affirmé un membre de la commission culturelle des talibans, Enamullah Samangani.

Mais beaucoup d’Afghans redoutent que les insurgés n’imposent la même version ultrarigoriste de la loi islamique que lorsqu’ils étaient au pouvoir (1996-2001). Les femmes ne pouvaient alors ni travailler ni étudier. Le port de la burqa était obligatoire en public et elles ne pouvaient quitter leur domicile qu’accompagnées d’un mahram, un chaperon masculin de leur famille.

Mardi, la vie reprenait lentement ses droits à Kaboul. Les magasins ont rouvert, le trafic automobile a repris et les gens sortent de nouveau dans les rues, où des policiers font la circulation, les talibans tenant, eux, des postes de contrôle. Peu de femmes osent toutefois sortir. Des signes montrent aussi que la vie ne sera plus celle d’hier. Les hommes ont troqué leurs vêtements occidentaux pour le shalwar kameez, l’ample habit traditionnel afghan, et la télévision d’Etat diffuse désormais essentiellement des programmes islamiques.

Les talibans sont entrés dans Kaboul, sans faire couler le sang, dimanche. Leur triomphe a déclenché des scènes de panique à l’aéroport de Kaboul, où des milliers de personnes tentaient désespérément de fuir le pays. L’aéroport international Hamid-Karzaï constitue la seule porte de sortie du pays, car les talibans contrôlent désormais tous les autres aéroports du territoire ainsi que toutes les frontières terrestres.

Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montraient des scènes de chaos, comme ces centaines de personnes courant près d’un avion de transport militaire américain sur une piste de décollage, pendant que certaines tentaient de s’accrocher à l’appareil.

Joe Biden et l’OTAN mettent en cause les dirigeants afghans

Lundi, le président des Etats-Unis, Joe Biden, a résolument défendu la décision de retirer les troupes américaines d’Afghanistan. Cible de vives critiques, il a répété que la mission de Washington n’avait jamais été de bâtir une nation démocratique dans un pays instable, mais d’« empêcher une attaque terroriste sur le sol américain ». Les Etats-Unis étaient intervenus en Afghanistan en 2001 en raison du refus des talibans de livrer le chef d’Al-Qaida, Oussama Ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.

M. Biden a aussi mis en cause les dirigeants afghans, « incapables de négocier pour l’avenir de leur pays », qui ont « abandonné et se sont enfuis ». « Les troupes américaines ne peuvent et ne devraient pas se battre et mourir dans une guerre que les forces afghanes ne veulent pas livrer pour elles-mêmes », a-t-il ajouté, concédant toutefois que l’effondrement du gouvernement afghan avait été plus rapide « que [l’administration américaine ne l’avait] prévu ».

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a également imputé, mardi, la prise de pouvoir des talibans aux forces armées afghanes, et a défendu l’engagement de l’Alliance, tout en reconnaissant que des « leçons » devraient être tirées.

« Les autorités politiques afghanes ont échoué à s’opposer aux talibans et à parvenir à la solution pacifique que les Afghans réclamaient désespérément. C’est l’échec des autorités afghanes qui a conduit à la tragédie que nous voyons aujourd’hui ».

Les forces de l’OTAN ont été surprises par « l’effondrement politique et militaire des dernières semaines, avec une rapidité qui n’avait pas été anticipée », a observé le responsable norvégien lors d’une conférence de presse.

Les Etats-Unis ont par ailleurs affirmé, lundi, que leurs relations avec l’Afghanistan dépendraient « du comportement des talibans ». « Un futur gouvernement afghan qui préserve les droits fondamentaux de son peuple (…), y compris de la moitié de sa population – ses femmes et ses filles – [et] qui n’offre pas de refuge aux terroristes » est « un gouvernement avec lequel nous pourrions travailler », a déclaré le porte-parole du département d’Etat, Ned Price.

Lundi, la Chine a été le premier pays à déclarer vouloir entretenir des « relations amicales » avec les talibans. La Russie et l’Iran ont aussi fait des gestes d’ouverture. Mardi, la Turquie a estimé que les messages envoyés par les talibans depuis dimanche avaient été « positifs », ajoutant qu’elle avait des discussions avec le mouvement islamiste radical.

Washington a envoyé 6 000 militaires pour sécuriser l’aéroport de Kaboul et faire partir quelque 30 000 ressortissants américains et civils afghans ayant coopéré avec les Etats-Unis. Les vols, civils et militaires, suspendus lundi après-midi en raison de l’envahissement des pistes, ont repris dans la nuit, a annoncé le Pentagone. M. Biden a menacé les talibans d’une réponse militaire « rapide et puissante » s’ils perturbaient les opérations d’évacuation.

De Madrid à La Haye, en passant par Paris, Bucarest, Londres, Bruxelles, plusieurs autres pays s’activent également pour rapatrier leurs ressortissants.

De son côté, la France a procédé dans la nuit à sa première évacuation grâce à un pont aérien reliant la capitale afghane aux Emirats arabes unis, a annoncé sur RTL la ministre des armées, Florence Parly, mardi matin. L’appareil, parti de France lundi, a amené des forces spéciales françaises à Kaboul pour qu’elles participent aux opérations d’évacuation.

Dans ce contexte d’incertitude, « il est trop tôt » pour décider du maintien ou non de l’ambassade de France à Kaboul, a précisé l’Elysée, mardi. Pour le moment, l’ambassade reste opérationnelle, même si elle a été délocalisée à l’aéroport de la capitale, où l’ambassadeur, David Martinon, et son équipe gèrent les opérations d’évacuation des derniers ressortissants français et des Afghans ayant travaillé pour la France.

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a appelé à « interdire les retours forcés de ressortissants afghans » vers leur pays, y compris les demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée. De son côté, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a demandé à la communauté internationale d’apporter tout son soutien aux Afghans qui se trouvent confrontés à un « risque imminent » dans leur pays.

Le cofondateur des talibans est rentré en Afghanistan

Le mollah Abdul Ghani Baradar, cofondateur et numéro deux des talibans, est rentré mardi en Afghanistan, en provenance du Qatar. « Une délégation de haut niveau menée par le mollah Baradar a quitté le Qatar et atteint notre pays tant aimé cet après-midi, et a atterri à l’aéroport de Kandahar », dans le sud de l’Afghanistan, a déclaré sur Twitter Mohammad Naeem, un porte-parole des talibans.

C’est la première fois qu’un très haut dirigeant des talibans en activité rentre publiquement en Afghanistan, depuis qu’ils ont été chassés du pouvoir par une coalition menée par les Etats-Unis dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001. Abdul Ghani Baradar, né dans la province d’Uruzgan, dans le sud du pays, et élevé à Kandahar, a fondé les talibans avec le mollah Omar, disparu en 2013, mais dont la mort avait été cachée deux années durant.

Ecouté et respecté par les différentes factions talibanes, il a été nommé chef de leur bureau politique, situé au Qatar. De là, il a conduit les négociations avec les Américains menant au retrait des forces étrangères d’Afghanistan, puis aux pourparlers de paix avec le gouvernement afghan, qui n’ont pas abouti.

Le Monde avec AFP, AP et Reuters

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