Côte d’Ivoire – pourquoi le gouvernement a rejeté les 47 milliards voulus par les députés

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Les députés réclament les mêmes avantages que les ministres et exigent 47 milliards F CFA à Ouattara

Charles Kouassi in L’Intelligent d’Abidjan 4 janvier 2014

Le Budget global de l’année2014 s’équilibre en ressources et en dépenses à 4.248. 257. 741. 401 FCFA, en hausse de 9,4% par rapport à 2013. Cette augmentation est essentiellement liée à la progression des recettes fiscales (+ 12, 5) qui permettent de prendre les engagements vis-à-vis des partenaires sociaux et de renforcer les dotations d’investissements. Au titre des institutions de la République, il n’y a pas eu de grandes évolutions. Concernant particulièrement l’Assemblée Nationale, le projet initial de budget qui était de l’ordre de 47 milliards de FCFA a été remanié. Si pour le fonctionnement le budget a légèrement augmenté, il n’en est rien au niveau des indemnités des députés.

Pourquoi un tel montant de 47 milliards FCFA avait-il été initialement atteint ?

Les députés avaient estimé avoir droit à un certain nombre d’avantages institutionnels et financiers : leur rang et place dans les cérémonies officielles, l’accès au salon ministériel à l’aéroport, la prise en charge de certains frais domestiques et du personnel de maison, la revalorisation des frais de missions, les voyages en business-class, le personnel de maison, un assistant parlementaire, etc.

UN STATUT COMME RÉGULATEUR SOCIAL ET DÉMOCRATIQUE

En clair les députés réclamaient le même statut que les ministres. Aux dires des uns, tout en revalorisant le député, ce statut réduirait l’attrait pour la course aux postes ministériels et serait un bon régulateur social et démocratique. Entre autres soutiens à leurs requêtes, les députés ont pris l’exemple des hauts fonctionnaires de l’administration ivoirienne, ceux qui sont hors grade ou hors hiérarchie, et ceux bénéficiant de statuts particuliers, dont les salaires avoisinent 3 à 4 millions de FCFA. Les députés estiment que les contraintes de leurs missions ne sauraient admettre qu’ils soient en dessous de ce grade dans la Fonction publique, d’autant plus que le mandat de député est permanent et incompatible avec toute autre activité, comme pour les membres du gouvernement. Pour cette raison, les députés avaient estimé donc qu’ils méritent d’avoir le même traitement que les ministres. C’est la traduction de cette préoccupation qui avait donné lieu à un projet de budget de 47 milliards de FCFA. La question a fait l’objet de négociations et d’échanges entre le Législatif et l’Exécutif. Des séances de travail ont eu lieu entre les services de l’Assemblée nationale et ceux de Nialé Kaba, avant la scission de son ministère. L’on se souvient de la séance de travail entre Daniel Kablan Duncan et Guillaume Soro, le vendredi 8 novembre 2013. S’adressant à la presse, le président de l’Assemblée nationale avait dit ceci : «C’est toujours avec plaisir que nous rencontrons le Premier Ministre. Comme il l’a indiqué lui-même, nous avons abordé des questions qui ont trait à l’actualité parlementaire. Mais aussi, à l’activité gouvernementale. Nous sommes contents de noter qu’avec le Premier Ministre, nous sommes parfaitement en phase, nous avons reconnu et salué les résultats obtenus par le Gouvernement sous son impulsion. Le Parlement n’est pas un contre-pouvoir ni un pouvoirnde confrontation avec l’Exécutif, mais les institutions doivent œuvrer dans la complémentarité. Evidemment, il a été question d’évoquer certaines préoccupations au sein de notre institution ; ce qui a été fait. Je veux très sincèrement remercier le Premier Ministre qui a abordé toutes ces questions avec un grand esprit d’ouverture. Je suis convaincu que tous ces efforts conjugués permettront à la Côte d’Ivoire d’aller de l’avant». Soumis au Conseil des ministres, le projet de 47 milliards de FCFA n’a pas été validé. Le gouvernement, tout en admettant le principe de la revalorisation des indemnités des députés d’une part, et d’autre part celui du débat sur leur statut, a gelé la question concernant l’Assemblée nationale, mais également toutes les autres institutions au titre du budget de l’année 2014. Le chef de l’Etat a fait l’option de satisfaire d’abord les 151 mille fonctionnaires, et a invité les élus de la nation à la patience. «Nous allons servir le grand nombre d’abord, et pour les députés, et les autres institutions, on aura le temps d’aviser», explique une source autorisée. Cet épisode ayant failli brouiller l’ambiance au sein de l’Assemblée nationale d’une part, et ayant créé une confusion entre l’Exécutif et le Législatif, le président de l’Assemblée nationale, lors de la clôture de la deuxième session ordinaire du parlement ivoirien pour l’année 2013, a dit ceci pour clarifier les choses: «Si notre désir est légitime d’avoir un statut pour le député ivoirien, qui reluise sa dignité, je me désole de constater que certains d’entre nous réduisent cette quête en une basse et simple question d’émoluments et d’argent. Et pourtant loin s’en faut. A mon sens il est légitime et noble pour le député de souhaiter et d’acquérir un statut, c’est-à-dire un texte d’un seul tenant, qui définit ce que c’est que le député et y précise aussi bien ses devoirs que ses droits. Un texte qui fasse du député une personnalité de la République, une personnalité digne, respectée, et considérée. Un texte qui fasse du député un acteur productif et engagé dans la République. Notre dignité n’est-elle pas plus importante que l’argent ? Notre honorabilité est-elle à vendre ? Que serions-nous ! Et quel regard le peuple porterait-t-il sur nous ! Si les honorables députés en venaient à se comporter comme de petits personnages vindicatifs, là ou le brave peuple, au prix de mille sacrifices à bâtir ce pays demeure soucieux de la tranquillité sociale». Un message qui devrait clarifier les choses à l’attention des uns et des autres.

UN DÉBAT QUI N’EST PAS NOUVEAU

Pour le moment, les indemnités des députés sont en dessous de 2 millions de FCFA hors « frais sessions extraordinaires » et autres bonifications. Cela dit la question de leur statut n’est pas une question nouvelle. Sous le régime précédent, elle avait été abordée. Et l’on avait eu échos des positions de Simone Gbagbo, qui trouvait excessives les préoccupations de ses collègues, tandis que ceux-ci, en coulisses expliquaient son hostilité par son statut d’épouse du chef de l’Etat. Seules les indemnités des présidents des institutions avaient été alors conséquemment revalorisées, et placées au dessus du traitement des membres du gouvernement. Hormis l’aspect financier de statut, la jouissance du passeport diplomatique pour les conjoints (ou conjointes), pour les enfants mineurs des députés, (les épouses des ministres bénéficient d’indemnités, rappellent des élus de la nation), ainsi que le statut des anciens députés et la question de la pension (ou de la retraite parlementaire), constituent également des sujets de préoccupations dans le cadre du débat sur le statut du député ivoirie.

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