Les paroles fortes de Mamadou Koulibaly à Connectionivoirienne.net “Ce que Ouattara fait n’est pas différent…” [Exclusif]

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Par Gbansé, Douadé Alexis | Connectionivoirienne.net 06.05.2013

 

Exclusif Mamadou Koulibaly – “Ce que Ouattara fait n’est pas différent…”

Le président de LIDER, ex président de l’Assemblée Nationale de Côte-d’Ivoire, Mamadou Koulibaly a récemment reçu [28/02/2013] le patron du site connectionivoirienne.net [Pays-Bas], de passage à Abidjan. C’était au siège de LIDER à la riviera Golf, dans la commune de Cocody. Parti rencontrer le professeur Koulibaly pour une rencontre informelle, Alexis Gbansé avec la permission du président de LIDER, a pu enregistrer pour publications, certains instants du tête a tête. Au moment où LIDER [Liberté et Démocratie pour la République] table sur le bilan de l’an 2 du pouvoir du président Alassane Ouattara de Côte-d’Ivoire, nous avons jugé opportun de rendre public de larges extraits de cette rencontre entre deux hommes de conviction. Le président de LIDER, Mamadou Koulibaly comme à ses habitudes, tient un langage de vérité, franc, simple et direct.

De la révision de la liste électorale

(…) Dans l’opposition certains FPI se disent que la révision de la liste électorale est dangereuse, parce qu’elle va permettre à Ouattara d’intégrer beaucoup plus de personnes qu’il n’a pu le faire en 2009. Et les gens de Ouattara répondent que la révision est dangereuse parce qu’elle va permettre au pro- Gbagbo de venir augmenter leur quota plus qu’en 2009. Pareil pour la commission électorale. Certains dans l’opposition disent que c’est une situation qui arrange la CEI, parlant des signataires de Marcoussis. Quand ça arrange Ouattara, le statuquo demeure. Le moment est venu d’intégrer tous les nouveaux électeurs. Si on le fait, les élections de 2015 vont être calmes parce que la liste sera déjà prête et acceptée. On l’affiche et puis le jour des élections les gens vont voter. Or justement dans le gouvernement, Ouattara n’entend pas les choses de cette oreille. Avant tout cela nous, nous avons demandé aux conclaves de Bassam qu’on refasse le recensement général de la population.

De quand date le dernier recensement en Côte-d’Ivoire ?

Il date de 1998. Il aurait fallu qu’on en refasse encore en 2008, mais on ne l’a pas fait. Et nous irons en 2015. Cela fait près de 20 ans qu’on n’a pas fait de recensement or la population change. La structure, le profil de la population, quel est leur âge, est-ce qu’ils sont au chômage, est-ce qu’ils ont étudié ? Quel est leur niveau d’étude ? Mariés ? Non mariés ? Est-ce qu’ils sont plus urbains que ruraux. Au moins on va savoir que dans les 20 ou 25 habitants, il y a combien de femmes, d’hommes, combien d’étrangers ? On n’en sait rien du tout. Rien ! Rien ! Rien ! Et chaque fois on fait des évaluations, mais qui sont toujours politiques. A l’époque, les gars du FPI ont fait la décentralisation en créant des communes fautives. Il y avait des campements ou des villes qui avaient 10 milles habitants, mais pas de maires et puis il y a des zones où il y avait 3 mille personnes, avec des maires. Il y avait des circonscriptions érigées en départements mais qui avaient tout le look d’un village. Et puis des sites qui avaient des styles de villes qui restaient encore communes ou sous-préfectures. Hamed Bakayoko vient, et il fait pareil.

Augmentation du nombre de députés au profit du RDR

Pour les législatives, ils se réunissent en conseil des ministres et ils disent qu’ils vont augmenter le nombre des députés de 25. De 225 on passe à 250. Sur quel critère ? Rien ! Et les 25 nouveaux où est-ce qu’on va les affecter ? Ils disent qu’ils vont les affecter à différents endroits. Sur quel critère ? Rien ! Or un député représente la population. On doit savoir si un député ivoirien représente 100 mille ou 200 mille ou 250 mille personnes. Et où est-ce que ces personnes habitent. Mais on a augmenté le nombre des députés au profit du RDR. Tant qu’il n’y a pas de recensement général de la population pour qu’on puisse dire à Séguéla, Daloa, Biankouman, Didiévi…voilà la taille de la population. Et à partir de là on se dise, là où la population a diminué on réduit ou on supprime le poste de député. Là où la population a augmenté on augmente les postes de députés pour que la représentation soit correcte. Là où la zone est peu peuplée, on fait un député pour une superficie plus large. Là où il y a une forte condensation de population, on fait un député pour des superficies plus petites mais avec une densité plus forte. Mais au moins, chacun sait pourquoi à Abobo il y a 6 députés, pourquoi à Yopougon il y a 6 députés et pourquoi à Tiébissou il y a 1 ou 2 députés. Mais tant qu’il n’y a pas un recensement général de la population tout va être arbitraire. Et en 2015 on va aller avec l’arbitraire.

Allons-nous vers un blocage des élections de 2015 selon vous ?

Au Ghana, il faut qu’on regarde de près ce qui s’est passé, car nous sommes voisins. Nous avons presque le même profil de population. Ils déclarent officiellement 22 millions. Ils sont allés aux élections avec près de 14 millions d’électeurs. Et sur ces 14 millions, 12 ou 13 millions d’électeurs se sont exprimés. Et nous qui avons à peu près le même format, on est allés aux élections avec 6 millions d’électeurs. Et 5 millions se sont exprimés. L’opposant Nanan Ado a eu plus de voix que l’ensemble de notre liste électorale. Il y a quelque chose qui ne va pas. Soit les chiffres ghanéens sont faux, soit les chiffres ivoiriens sont faux. Mais je suis convaincu que quelque soit le lieu où se trouve l’erreur, on peut avoir en Côte-d’Ivoire plus de 6 millions d’électeurs. On peut arriver à au moins 10 où 11 millions d’électeurs. Il ne faut pas exclure ces gens. Il faut les intégrer. Mais ça demande un recensement d’abord. Il dure 6 mois à peu près. Quand on en a parlé à Bassam, Mabri Toikeusse (Ministre du Plan et du Développement/Ndlr) nous a dit qu’il n’y avait pas de problèmes et qu’en 2012 ou 2013 on allait avoir un recensement général de la population. Jusqu’à présent on attend. Voilà un peu le schéma sur lequel nous plaidons.

Pensez-vous avoir les moyens de pressions ?

C’est le plaidoyer qu’on organise en permanence. Ecrire, faire des conférences, publier des papiers pour montrer aux gens que s’ils ne veulent pas tomber dans les même guerres et blocages passés, il faut que nous soyons sérieux. Ça commence déjà par les données démographiques. Mais il y a beaucoup qui pensent que l’important est d’avoir des postes. Ça fait que, Ouattara, au lieu de dissoudre la Commission électorale et la restructurer il nous propose, au 11 partis de l’opposition mis à part le Fpi, trois places et après les élections il nous propose trois autres places au Conseil économique et social. Comme si s’était des postes qu’on cherchait. Mais entre temps le statuquo va demeurer. La crise va demeurer. C’est difficile à accepter. Les moyens de pressions on en a pas d’autres que les plaidoyers, l’explication aux populations jusqu’à ce que les gens finissent par bien comprendre. Mais comme on n’a pas accès à la télévision et à la radio publics, on n’a pas accès aux médias d’Etat, c’est pour Ouattara et son clan c’est tout. Les partis d’opposition sont exclus.

Voyez-vous une évolution de la situation sécuritaire ?

Par rapport à 1999, 2000, 2002, 2011, il y a eu une évolution. Si on compare à 2002 ou bien 2011, là où il y avait des coups de feu, sur le plan sécuritaire les choses se sont arrangées. On entend plus de coup de feu partout, on voit plus trop les FRCI dans tous les barrages à Abidjan. Mais ils sont à coté, dans les environs. Le contrôle de l’Etat par les FRCI, ça, ça n’a pas changé. C’est pareil ! Ouattara ne prend aucune sanction contre ses propres gars. Et si ça continue, il faudra que la justice locale et internationale arrive à nous convaincre de son équité. Nous à LIDER on ne dit pas de « libérer Gbagbo, il n’a rien fait ». Mais si vous cherchez à poursuivre les criminels au FPI, Ouattara et Soro aussi ont des criminels, il faut les prendre. Si vous ne le faites pas, nous allons entrer dans une situation d’impunité qui va faire qu’aux élections de 2015. Les gars vont recommencer les mêmes choses parce qu’ils diront qu’on peut tuer sans impunité. Ils se diront que dans ce pays-là, on ne punie pas ceux qui tuent. Et ça, c’est difficile pour la démocratie.

On a remarqué que les Etats Unis se sont beaucoup impliqués dans la dernière crise. Une explication ?

Ils se sont tous basés derrière le conseil de Sécurité. C’est à nous de convaincre les pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU, que les choses ont évolué ici, mais pas forcément dans le bon sens. De la même façon qu’ils se sont mobilisés par le passé, il serait bien qu’ils se mobilisent dans le présent pour regarder de près le comportement du gouvernement, la situation électorale, la situation des droits de l’homme et la situation politique. Car, ce que Ouattara fait, n’est pas du tout différent de ce qu’on a vu les années passées. C’est à eux de prendre conscience.
Ne pensez-vous pas qu’il y a lieu pour LIDER, de tenter des alliances avec les autres partis de l’opposition avec pour but d’accroitre la pression sur les gouvernants actuels ?
C’est possible ! Mais pour aller aux alliances il faut déjà avoir une capacité de négociation substantielle. Et on ne peut l’obtenir qu’en montrant que sur le terrain on est bien implanté et qu’on n’est pas un parti politique de la Riviera Golf de Cocody, mais que dans la Cote d’Ivoire profonde il y a beaucoup de gens qui pensent LIDER. Et qu’en dehors de la Cote d’Ivoire il y a beaucoup de gens qui sont d’accord avec les positions de LIDER. Et que même si on parait minoritaire, même si on parait solitaire, on est dans le cœur des gens majoritaires. Mais ça demande une forte implantation. Lorsque vous avez cette implantation, et que vous discutez avec les gens, on vous voit seul en face, mais ils se disent que vous avez un réel poids politique. Mais quand vous n’avez pas encore une solide implantation après un mois, un an, les gens essaient de vous snober. Du genre vous êtes un petit parti. Mais quand, même sans les élections les gens ont le sentiment que vous êtes bien ancrés, que vous avez une audience populaire, en ce moment c’est eux-mêmes qui vont commencer à discuter, à négocier avec vous. On en est là ! À la phase d’implantation.

Votre parti est constamment en tournée a l’intérieur du pays ?

Des équipes étaient à San Pedro, Fresco, Grand Berebi, d’autres sont montés il y a quelques temps avant à Bondoukou, Kounfao, Transua, d’autres sont allés à Bingerville, Divo, Lakota… On est en train de se déployer, d’installer les bases à l’intérieur du pays. Et c’est en fonction de cela on pourra dire le moment venu, qu’on discute. Pour le moment, les uns et les autres considèrent que c’est des petits.

Est-il possible que le FPI fasse une alliance avec le PDCI ?

C’est possible qu’ils aient des négociations, parce qu’ils ont déjà eu par le passé ce type de pratique. Mais ça finit toujours mal. Parce-que chacun y va non pas sur la base programmatique, mais sur la base politicienne. En Europe, quand des partis politiques font des alliances, c’est sur la base de programmes de gouvernement. Vous, vous êtes pour la protection des animaux ou de la forêt, pour la réduction des impôts, pour l’accroissement de la taxation sur les riches. Nous, nous sommes pour le statut de la femme, la réduction des impôts, l’augmentation des taxes. Et puis, vous vous asseyez pour trouver les points sur lesquels vos programmes convergent. Et puis, sur tous les points divergents on va faire une alliance. Et si c’est vous qui gagnez, vous appliquez votre programme mais vous tenez compte de ces points que nous partageons avec vous. Et on y va et on sait pourquoi on y va. Et quand on gagne au sein de l’alliance, puisque c’est sur les questions de la protection de a nature qu’on est d’accord, on décide que le Ministre de la Protection de l’Environnement viendra de chez vous pour que la politique sur laquelle on est tombés d’accord puisse être pratiquée par quelqu’un de chez vous. Là c’est programmatique. Mais ici, c’est parfois ethnique, sentimental, émotionnel, c’est la haine des uns qui nous poussent dans les bras des autres. Et puis quand la haine change de camp ? C’est sans conviction, sans croyance, sans arrangement idéologique et ça c’est dommage. Si des partis politiques peuvent arriver à des alliances, pourquoi pas ? Mais nous, on est encore en train de nous implanter.

Il nous faut une monnaie indépendante du Trésor Public Français…

Nous ne sommes ni pro quelqu’un, ni anti quelqu’un. Nous montrons notre ligne pour que se soit bien connue. Sur les questions foncières, nous, nous disons, qu’il faut faire le cadastrage de la Cote d’Ivoire. Donner les titres fonciers aux gens. Des partis politiques disent que la loi sur le foncier est bonne, sauf qu’on ne l’a pas appliqué. C’est une loi qui date de 1998. Plus de 12 ans après, elle n’est pas appliquée. Ça fait curieux. Mais pour nous, elle n’est pas bonne.
Nous disons que pour la retraite des travailleurs il faut sortir de la retraite financer par les impôts pour entrer dans un système de retraite financé par l’épargne. Les autres pensent que le statuquo est bien et qu’il ne faut pas prendre le risque.
Pour le Franc CFA, nous, nous pensons qu’il faut en finir avec et engager une procédure avec les autres pays pour créer une nouvelle monnaie indépendante du Trésor Public Français. Même si elle est connectée à l’Euro, au Yen au dollar…, mais une monnaie utilisée comme instrument de politique économique. Les autres, même Gbagbo et le FPI pensent qu’il faut laisser le Franc CFA comme ça.
Sur le plan de l’emploi, nous, nous pensons qu’il faut ouvrir notre pays au reste du monde. Et ne pas rester la chasse gardée d’un seul pays. Ne pas non plus s’entrainer dans une autarcie, car c’est dans ce cadre qu’on peu avoir des emplois pour jeunes. Une production agricole qui doit augmenter. Les autres pensent que l’étranger ça fait peur, il ne faut pas qu’on se laisse envahir par des non Ivoiriens. Sur beaucoup de points, il y a des divergences, mais en expliquant tous les jours, on va finir par trouver un point de convergence. Mais ça ne peut arriver que si nous-mêmes nous arrivons à convaincre le maximum d’Ivoiriens que le foncier rural est important et que la loi n’est pas bonne. En ce moment si les autres partis écoutent les Ivoiriens dire que la loi n’est pas bonne, peut être que la conclusion des alliances sera facile sur cette question.
Sur le point de la retraite, l’Etat ivoirien doit plus de 400 milliards CFA aux caisses de retraite, nous on considère que c’est bon, ça suffit.
Pour l’emploi des jeunes, il faut qu’on sache que l’étranger n’est pas un danger sinon le Ghana aurait fermé ses portes aux Ivoiriens qui fuyaient la crise post-électorale. Maintenant, je pense que beaucoup ont compris que l’étranger est une chance. Pas un danger ! Progressivement on explique notre programme, on pose les problèmes que les ivoiriens affrontent et on propose les solutions. Je pense que 2013 nous permettra de bien encrer cela à l’intérieur du pays. Si on couvre 50% du territoire ivoirien par des bases LIDER, je crois que ça sera bien. On le continuera encore en 2014 et puis en 2015 je pense qu’on pourra monter en puissance. Mais ça demande beaucoup de moyens. Et on les cherche, les cadres cotisent, mais ce n’est pas évident.

Qu’en est-il du financement des partis politiques ?

Il n’y a pas de financement. L’Etat nous propose 20 millions FCFA par an par parti politique. Et nous sommes 11 partis politiques qui formons le cadre permanent de dialogue. Le siège ici c’est 550 mille par mois, si on intègre 150 mille de courant, 300 pour les primes, 200 mille pour l’eau, …, cela fait près de 1.300.000 FCFA par mois pour l’entretien du siège. 20 millions de financement par an, ce n’est pas zéro, mais ce n’est pas ce qui va permettre aux partis d’engager les gens partout, d’acheter des moyens logistiques, de créer des siège à Man, San Pedro, Bouaké, Korogho, Aboisso…, pour que dans ces localités les choses fonctionnent, l’argent ne suffira pas . Mais en même temps, on est conscient que ce n’est pas à l’Etat de faire tout cela pour nous. Il faut qu’on s’implante, ça ne va pas être évident, mais on travaille.

Et la Diaspora ?

Elle est relativement dynamique. Moi, je vois passer de nombreuses personnes de la Diaspora à Abidjan, ils viennent ici prendre leur carte, on leur donne des mandats pour représenter LIDER au Canada, aux USA, en Grande Bretagne, ces pays sont vastes et il nous faut beaucoup plus de gens. Mais sur le net, on voit que beaucoup de gens de la diaspora se manifestent.
On envisage des tournées, probablement en 2014. Mais il faut déjà que quelques LIDER soient installés dans ces pays. Et puis, que ce soit eux qui organisent les rencontres et moi je vais en tournée. La caractéristique propre des membres de LIDER, ce sont des gens qui n’ont jamais fait de la politique. Quand ils sont ici, on leur fait des formations. Quand ils sont à l’étranger c’est plus difficile, on leur dit d’aller sur le site web, sur la page facebook, télécharger les documents, s’informer…

Fin
Avec Hervé d’Anvers

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